« Dans ce climat général de panique, à Alger les gens sont profondément choqués (…) toute cette panique-là les Algériens la vivent seuls». Ces mots du secrétaire général de Jil Jadid, Soufiane Djillali prononcées hier dans une intervention sur la chaine satellitaire El Magharibia, sont d’une justesse frappante.
Du jeudi 23 août au dimanche 26 août, les Algériens étaient dans la solitude la plus totale. Livrés à eux-mêmes, pour ainsi dire. Un “abandon” en règle qui a d’ailleurs valu des critiques très acerbes au gouvernement et particulièrement au ministre de la Santé et de la Réforme hospitalière. Hier, Mokhtar Hasbellaoui s’est défendu comme il a pu, arguant qu’ « une stratégie vaut mieux qu’une visite », sans toutefois convaincre grand monde.
Des moments dramatiques
Des récriminations tout à fait justifiées car s’escrimer à mettre en place une stratégie pour faire face au fléau ne le dispense nullement d’une sortie sur le terrain. C’est son rôle. Car en ces moments dramatiques, les Algériens ont grandement besoin de sentir la présence physique du gouvernement pour s’assurer de l’engagement effectif de l’État.
Ceci dit, le secrétaire général de Jil Jaddid a omis de préciser que la désertion du terrain pendant ces trois jours de grande panique n’est pas le seul fait des membres du gouvernement mais aussi de toute la classe politique, partis du pouvoir et opposition confondus.
Alors que les citoyens, notamment ceux des quatre wilayas les plus touchées par l’épidémie, étaient gagnés par une vive inquiétude, on n’a pas entendu une seule voix politique s’élever pour leur apporter assistance et réconfort et exiger une prise en charge efficiente des malades. À croire que l’épidémie s’est déclarée dans un autre pays que l’Algérie !
L’éclipse de l’opposition
On le sait, les partis dits proches du pouvoir (RND, TAJ, ANR, MPA, …) ne peuvent décemment s’inscrire en faux contre une situation dont, directement ou indirectement, le gouvernement dans lequel ils siègent (c’est le cas pour le FLN et le RND, du moins), a une part de responsabilité. S’il est injustifiable, leur silence peut être, toutefois, compréhensible même si, quelque part, ils ont privilégié la discipline militante, voire la fidélité à un homme, au devoir de solidarité avec les citoyens.
Mais les plus condamnables sont, à coup sûr, les partis de l’opposition qui sont tenus pourtant de porter la contradiction à l’action du gouvernement et sensés incarner l’alternative. Or, c’était l’éclipse totale. Ils ont même trouvé un moyen de ne pas assurer le minimum syndical : à savoir présenter des vœux de rétablissement aux malades.
Sous d’autres cieux autrement plus démocratiques, avec une telle épreuve, c’aurait été le branle de combat. Des visites des militants voire même des dirigeants des partis auraient été organisées dans les régions touchées par le fléau histoire de rassurer la population, un grand élan de solidarité auprès des victimes de l’épidémie et leurs familles se serait fait jour, des interventions dans les médias pour réconforter les citoyens mais aussi, s’il y a lieu, pointer du doigt les défaillances du gouvernement ou de sa prise en charge des malades, etc.
Et personne n’aurait crié à la récupération s’ils ont fait preuve d’un engagement sur le terrain et du devoir de solidarité. Bien au contraire. Les citoyens auraient beaucoup apprécié qui ne manqueront certainement de leur rendre la pareille à l’occasion des futures élections. Et le pouvoir qu’ils brocardent à toutes occasions, serait confondu et discrédité davantage. Mais rien de tout cela. Le pouvoir les a-t-il empêchés de parler en public ou de se rendre à Blida ou Tipaza ? Bien sûr que non.
Aussi, le moins que l’on puisse dire est que l’épidémie du choléra qui a frappé quatre wilayas du centre du pays a mis à nu la défaillance qui frise la démission de la classe politique algérienne, l’opposition en premier chef. Et en s’engonçant ainsi dans sa léthargie, le pouvoir peut bien dormir sur ses lauriers.
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