La convocation du corps électoral, qui était attendue comme l’acte qui allait faire décanter la situation, n’aura finalement servi qu’à fixer tout le monde sur la date du scrutin.
Pour le reste, l’essentiel, on n’a pas avancé d’un iota depuis vendredi si l’on excepte l’annonce d’une candidature jugée « sérieuse », celle du général-major à la retraite Ali Ghediri.
L’incertitude qui entoure la candidature ou le renoncement du président Bouteflika demeure entière même si trois des partis de l’Alliance sont sortis de leur long mutisme. En fait, le RND, le FLN et TAJ n’ont fait que déterrer le discours qu’ils tenaient avant de se taire énigmatiquement à la mi-décembre, réitérant leur appel au chef de l’Etat de briguer un cinquième mandat.
Le MPA, lui, refuse toujours de se prononcer. Il a décidé ce dimanche 20 janvier de s’en remettre encore à son conseil national. Soit un brusque retour à la situation qui a prévalu pendant tout l’été et une partie de l’automne avec un président muet sur ses intentions, trois partis de la majorité qui l’appellent à « continuer », un soutien, le même, qui temporise, et une opposition résignée et presque aphone.
Plus clairement, la convocation du corps électoral ne vaut pas acte de candidature du chef de l’Etat et les supputations sur son avenir continueront sans doute pendant quelques semaines encore. La loi électorale fixe le délai de dépôt des dossiers de candidature à 45 jours après la convocation du corps électoral. Ce sera donc le 4 mars.
En 2014, Bouteflika avait remis son dossier en mains propres au Conseil constitutionnel quelques heures avant l’expiration du délai, le 3 mars, mais sa candidature fut annoncée dix jours plus tôt, le 22 février, par son directeur de campagne Abdelmalek Sellal. Mieux, c’est le 22 janvier que le secrétaire général du FLN, Amar Saâdani, avait déclaré que Abdelaziz Bouteflika sera « officiellement » le candidat du parti à la présidentielle.
Si le scénario devrait se répéter, ce sera avec un retard certain sur les délais pour ce qui est de l’engagement des principaux soutiens du président. A pareille période en 2014, Amar Saâdani avait déjà multiplié les meetings et annoncé plus d’une fois que Bouteflika était partant pour un quatrième mandat. Beaucoup avaient douté de la parole du chef du FLN en dépit du fait que, parallèlement, la campagne avait commencé avant l’heure et c’était perceptible à la mobilisation des médias publics et des états-majors des partis de la majorité pour ressasser les réalisations du président.
Cette année, il y a comme une frilosité dans l’attitude des soutiens réputés indéfectibles d’Abdelaziz Bouteflika. Même ceux qui l’ont appelé à se représenter juste après la convocation du corps électoral l’ont fait presque du bout des lèvres.
Le FLN, le RND et TAJ se sont contentés de laconiques déclarations adossées à leurs instances dirigeantes, pour replonger tout de suite après dans leur mutisme. Amara Benyounès, lui, campe sur sa « position de principe » à savoir que c’est son « conseil national qui déterminera au moment opportun et de manière définitive la position du parti vis-à-vis de cette élection. » Pas un mot sur Bouteflika, encore moins un appel franc pour qu’il se représente.
Il y a bien anguille sous roche. Bouteflika a participé à quatre scrutins et son modus operandi est maintenant éculé : il attend toujours la dernière minute pour formaliser les choses mais ses soutiens se mettent en bleu de chauffe bien prématurément, ainsi que les médias publics.
Connaissant le mode de fonctionnement des partis proches du pouvoir, il est aisé de déduire que s’ils n’ont pas encore investi le terrain, c’est qu’ils n’ont pas été instruits expressément de le faire.
Pourquoi ? Rien ne permet d’avancer que le chef de l’Etat a décidé de renoncer à cause de son état de santé que le monde sait en déclin, mais on peut supposer au moins qu’il n’a encore rien tranché. Ce n’est qu’une lecture mais qui peut être corroborée par les révélations du président du MSP, qui a rencontré du monde lorsqu’il tentait de vendre son initiative de conférence nationale. Selon Abderrazak Makri, deux visions s’affronteraient en ce moment au sommet de l’Etat : la reconduction du président ou une candidature parrainée par le système.
A moins que tout cela ne soit qu’un leurre destiné à attirer le maximum de beaux lièvres dans le collet…
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