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Cocaïne : comment le patron du « FBI marocain » a survendu sa dernière opération

Cocaïne : comment le patron du “FBI marocain” a survendu sa dernière opération

AIC PRESS
Abdelhak El Khiam, patron du BCIJ

À l’origine

Quinze personnes ont été arrêtées dans le cadre de l’opération, qui a permis la saisie lundi dernier de 2,588 tonnes de cocaïne brute, a annoncé à grand renfort de communication le Bureau central d’investigations judiciaires (BCIJ).

En novembre 2016, les services de sécurité avaient procédé à l’avortement, au large des côtes de Dakhla, d’une des plus grandes et dangereuses opérations de trafic de drogues dures, dans le cadre d’une opération d’envergure menée avec la Gendarmerie maritime et la Marine royale chargées de la surveillance des eaux territoriales.

L’opération avait permis la saisie d’1, 230 tonne de cocaïne soigneusement emmaillotée dans plusieurs ballots dont la valeur avait été évaluée de 2 milliards de dirhams. Un chiffre déjà assez grossi.

Problème, le très médiatique patron du BCIJ, Abdelhak Khiam, s’est cette fois-ci, à l’évidence emmêlé les doigts sur la calculette annonçant des chiffres totalement surréalistes qui rappellent ceux évoqués dans les grandes opérations contre les trafics menés par les cartels colombiens du temps de leur splendeur…

Les détails

La prise record, sensationnelle par son poids, mais aussi par sa valeur, a donc donné lieu à des extrapolations pour le moins extravagantes. Abdelhak Khiam a déclaré lors d’une conférence de presse ce 4 octobre que « la valeur totale de la quantité de cocaïne saisie s’élève, après traitement, à 25 milliards 850 millions de dirhams (environ 2,75 milliards de dollars) ».

Un petit calcul sur la base de cette évaluation (2,7 milliards dollars pour 2,6 tonnes) nous indique que selon Khiam, le gramme vaudrait ainsi 1 038 dollars !

Si l’on compare aussi avec la saisie tout aussi spectaculaire de novembre 2016, le prix de la cocaïne aurait ainsi été multiplié au moins par 10…

Les faits réels

Si la cocaïne demeure toujours la drogue la plus chère, comparativement à l’héroïne et aux opoïdes, elle n’atteint jamais les prix stratosphériques annoncés par le patron du BCIJ. Selon la plus récente enquête américaine sur les drogues, le prix moyen pour un gramme de cocaïne est de 78 dollars, la pure à 120 dollars, selon diverses sources dont la fiabilité est incontestable.

À l’appui du rapport mondial des Nations Unies sur les drogues et des données obtenues auprès du marché, le Havocscope, site de marché noir, a compilé les données mondiales sur l’offre et la demande de cocaïne dans le monde. Le Koweït caracole en tête avec un prix dépassant les 330 dollars le gramme, tandis que la Colombie affiche les prix les plus bas à 3,50 dollars le gramme. Entre les deux la palette est large, mais ne dépasse jamais cette fourchette.

Aux États-Unis, les prix vont de 8 dollars à 300 dollars, et cela repose sur l’emplacement (toujours moins cher à Los Angeles, puisque la Californie du sud est la plus empruntée depuis la frontière mexicaine par le point de passage de Tijuana) et la « blanche » davantage quand elle est coupée (puisque la cocaïne est souvent diluée pour maximiser le profit).

Le gramme de cocaïne pure, aux Etats-Unis est évalué à 120 dollars (sources diverses), le tarif « grossiste » doit être tout au plus deux à trois fois inférieur à cela. L’évaluation de Khiam est donc surévaluée d’environ 20 à 30 fois.

Le verdict

À l’évidence, Khiam, pris par l’euphorie de sa prise, a mélangé centimes et dirhams, entrainant avec lui dans sa fantaisie l’agence MAP et la presse. Sur les réseaux sociaux, on siffle la faute de calcul, mais jusqu’ici, le BCIJ, imperturbable comme en matière de terrorisme, n’a pas corrigé sa copie…Les médias non plus.

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