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Comment Emmanuel Macron a remporté le premier tour de la présidentielle française

Comment Emmanuel Macron a remporté le premier tour de la présidentielle française

Il y a tout juste un an, Emmanuel Macron, encore ministre de l’Économie, lançait son propre mouvement En Marche!. Quelques mois plus tard, il démissionnait de son poste au gouvernement pour se lancer pleinement dans la course à l’Élysée. Dimanche soir, le candidat sans étiquette, ni de droite ni de gauche, âgé de 39 ans seulement, est arrivé en tête du premier tour de l’élection présidentielle française, avec 23,9% des suffrages. L’argument d’une forte envie de renouvellement avancé dans les médias français est-il la seule explication ?

« Emmanuel Macron a joué sur la décomposition du système et il a vu juste », confiait à l’Express, en janvier dernier, Benjamin Grivaux, son porte-parole. Ce rejet des partis traditionnels s’est donc confirmé dimanche soir puisque ni la droite, ni la gauche ne sont parvenus à décrocher leur ticket pour le second tour.

Mais le candidat sans étiquette a surtout bénéficié d’un alignement des planètes lui laissant un boulevard pour obtenir sa qualification. Fin novembre, le favori des sondages Alain Juppé, candidat du centre-droit est éliminé de la primaire de la droite et du centre face au candidat très conservateur François Fillon. Le 1er décembre, pour la première fois de la Vè république, le président en fonction renonce à briguer un second mandat. C’est-à-dire que Macron dispose désormais d’un espace politique, le centre, pour imposer sa candidature. En prime, le renoncement de Hollande lui évite une situation embarrassante.

Aidé par les affaires de Fillon

Le scénario idéal se confirme fin janvier à la primaire de gauche. Contre toute attente, Benoît Hamon, candidat « à gauche de la gauche » remporte ce scrutin. C’est à cette période que Emmanuel Macron parvient à s’imposer dans les enquêtes d’opinion, et dépasse la barre symbolique des 20%. Un sondage Kantar-Sofres-OnePoint diffusé le 29 janvier le crédite de 21% face à François Fillon. L’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy, vainqueur de la droite et du centre, recueille alors 22% des suffrages.

Les révélations en cascade vont progressivement atomiser la candidature Fillon et le parti des Républicains. Donné favori, le candidat de la droite et du centre, perd progressivement son avance. Mis en examen dans le cadre d’une affaire d’emplois familiaux présumés fictifs, il refuse d’abandonner la bataille. Son camp se disperse. Certains en appellent au retrait de la candidature Fillon. D’autres prennent le parti de laisser pourrir la situation, conscients que la bataille de la droite pour la présidentielle est désormais perdue.

Dans ce contexte, le jeune candidat qui n’a jamais exercé le moindre mandat obtient un soutien décisif à deux mois du premier tour. Le centriste François Bayrou annonce qu’il propose une alliance à Emmanuel Macron. «  Jamais dans les 50 dernières années la démocratie en France n’a été dans une situation aussi décomposée », déclare-t-il estimant que la France encourt «  le pire des risques de flambée de l’extrême droite, qui fait planer la menace d’un danger majeur et immédiat pour notre pays et pour l’Europe ». Ce deal avec Bayrou, politique de centre-droit, est une bénédiction.

Le PS atomisé

Pendant que Macron obtient le soutien du troisième homme de 2007 (18,5% des suffrages au premier tour), le PS est quant à lui proche de l’implosion. Les affaires de Fillon occupent l’espace médiatique à tel point que la campagne de Hamon est inexistante. Pire, elle se transforme en chemin de croix. Le vainqueur de la primaire n’obtient que très peu de soutiens au sein même de sa propre famille politique.

Alors même que les électeurs de gauche ont plébiscité le programme de Hamon, la plupart des ténors du parti contestent un programme…trop à gauche. Fin mars, Manuel Valls, ancien Premier ministre de François Hollande, candidat malheureux à la primaire de gauche, apporte son soutien à Emmanuel Macron. Un nouveau coup de théâtre quand on sait à quel point il existe une aversion réciproque entre les deux hommes. Pourtant, face à cette hémorragie, même le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis n’apporte pas son soutien au candidat Hamon. Il se contente de rappeler qu’il faut respecter les choix du parti.

Pendant ce temps, le silence du chef de l’État est assourdissant. Dix jours avant le premier tour, le locataire de l’Élysée donne le coup final. Il remet en cause la légitimité de la primaire. « Il ne doit plus y avoir de primaires dans des partis de gouvernement », dit-il dans Le Point. Et appelle, in fine, sans le dire clairement à voter pour son ancien ministre de l’Économie.

Un vrai casse-tête commence

Si Emmanuel Macron l’a remporté dimanche soir, c’est donc très largement à cause de l’absence de dynamique et d’unité au sein des partis traditionnels. Car, face à une telle déconfiture, le candidat sans étiquette politique  est devenu la seule alternative. Et les Français n’ont pris aucun risque préférant plébisciter un candidat haut dans les sondages plutôt qu’un candidat plus proche de leur sensibilité politique initiale.

La victoire d’Emmanuel Macron face à Marine Le Pen est quasi certaine le 7 mai, mais l’autre bataille, celle des législatives est loin d’être gagnée. Il faudra que le candidat « ni de droite, ni de gauche » parvienne à constituer une majorité au Parlement. Certes, il a promis le renouvellement aux Français, et sa campagne s’est essentiellement jouée sur la mort du logiciel classique gauche-droite. Il devra pourtant composer avec les autres forces politiques, quitte à tomber dans le piège du recyclage politique.

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