L’Algérie a annoncé mercredi la suspension du Traité d’amitié avec l’Espagne, en signe de représailles à la décision du gouvernement espagnol d’apporter son soutien au plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental.
Le même jour, l’Association des banques et établissements financiers algériens a annoncé le gel des domiciliations bancaires des opérations de commerce extérieur de et vers l’Espagne. Ce qui signifie qu’il n’y aura ni exportations et importations de produits avec l’Espagne.
Algérie – Espagne : les chiffres du commerce extérieur
Quel est l’impact de cette mesure sur l’Algérie qui exporte principalement du gaz vers l’Espagne et importe divers produits et services de ce pays ?
En 2020, l’Espagne a exporté pour près de deux milliards de dollars vers l’Algérie (contre près de 3 milliards en 2019) et acheté pour un peu plus de 2,3 milliards de dollars de produits algériens (contre 4 milliards en 2019, principalement du gaz, selon les données des Douanes algériennes. En 2020, l’Espagne était le 3e client de l’Algérie derrière l’Italie et la France et son cinquième fournisseur derrière la Chine, la France, l’Italie et l’Allemagne, selon les chiffres des Douanes algériennes.
En résumé, l’Algérie n’importe pas de produits stratégiques d’Espagne alors que ce dernier est dépendant en partie du gaz algérien pour son énergie.
Sa proximité avec les ports algériens rend les produits espagnols compétitifs, mais d’autres alternatives pour les remplacer existent. C’est ce que soutient le président de l’association des opérateurs économiques algériens (Anoea), Smail Namane.
« Nous allons nous adapter à cette nouvelle donne. Et voir quelles sont les options vers lesquelles nous pouvons nous diriger », assure-t-il à TSA.
Il cite le cas de la céramique dont l’Espagne était jusque-là le principal fournisseur du marché algérien. Parmi les pistes envisagées, pour pallier au produit espagnol, figurent des pays comme l’Italie, avec qui l’Algérie a renforcé ses relations économiques et politiques, bien que le prix soit plus cher que la céramique espagnole.
A côté, il y a aussi les céramiques turque et chinoise, voire indienne. En dehors de la céramique, il y a aussi la viande espagnole qui peut être remplacée par celle brésilienne. En dehors du fait que la Chine peut à elle seule assurer le gros des importations, souligne le représentant des importateurs algériens. « Chaque secteur a son alternative espagnole », assure M. Namane.
Effet d’éviction des importateurs
Que pose en creux l’épisode espagnol qui s’ajoute à d’autres paramètres ? L’économiste Brahim Guendouzi observe que la pandémie du Covid-19 et les crises politiques sont en train de « réajuster » les flux de commerce mondial.
« Depuis la pandémie (de Covid) il y a des manques à gagner pour pas mal d’exportateurs. Depuis 2019, il y a eu une perturbation des chaînes d’approvisionnement à l’échelle internationale. Des compagnies aériennes étaient à l’arrêt et beaucoup d’entreprises ont cessé leurs activités. Cela s’est répercuté sur le niveau des approvisionnements », relève-t-il, ajoutant qu’il s’est opéré un réajustement sur une catégorie de produits qu’on a pu améliorer grâce à la production nationale.
Le secteur automobile reste un maillon faible. « Le manque à gagner est dans l’automobile. Beaucoup de concessionnaires sont à l’arrêt. Il n’y a plus d’importations d’automobiles, des activités CKD/SKD sont à l’arrêt. La mesure imposant une catégorie de produits limite le champ d’activités de pas mal d’entreprises importatrices. Et plus récemment, la mesure prise par le ministère du Commerce faisant passer les importateurs par un portail d’Algex avant de domicilier leurs opérations », explique M. Guendouzi.
Il en conclut que toutes ces mesures « vont entraîner un effet d’éviction », certains importateurs seront éliminés de l’activité et d’autres vont s’adapter en opérant une révision de leur stratégie en matière de produits à importer et le choix des fournisseurs.