Confinement ou pas, le terrorisme routier continue de sévir. L’Algérie détient une triste prouesse avec 3000 à 4 000 morts chaque année sur les routes. Le ratio pour la taille du parc automobile est l’un des plus élevés au monde.
Les accidents de la route demeurent un fléau contre lequel toutes les formules testées se sont avérées inefficaces, même si, faut-il le souligner, le nombre de décès baisse constamment depuis quelques années.
À chaque grand drame routier, la question fait l’objet de débat pendant un temps et des mesures fermes sont promises, parfois concrétisées mais souvent sans grande incidence sur les statistiques morbides.
Au début de l’année en cours par exemple, alors que les autorités chargées de traquer le fléau se félicitaient d’une baisse continue du nombre de décès sur les routes (3 275 en 2019 contre 3 300 en 2018 et 3 400 en 2017), une série d’accidents impliquant des bus de transport de voyageurs et des camions de gros tonnage a fait réagir les plus hautes autorités du pays.
La question est abordée en Conseil des ministres, l’un des tout premiers du président Abdelmadjid Tebboune. Celui-ci a instruit le gouvernement de prendre des mesures comme le recours aux « moyens modernes de contrôle à distance de la vitesse », « la double dissuasion », « le durcissement des mesures rigoureuses à l’encontre de tout comportement criminel dans la conduite », « la mise en place de l’éclairage public », « l’inspection régulière de la signalisation », « l’implication des imams dans la sensibilisation »…
C’étaient des mesures supplémentaires s’ajoutant à l’arsenal de répression et de sensibilisation existant. Six mois après, la question est de nouveau sujet à débat dans la société après la diffusion sur les réseaux sociaux d’une vidéo choquante d’un conducteur qui provoque sciemment un grave accident.
Le comportement incroyable du chauffard, qui harcèle une petite Marutti jusqu’à la faire déraper. Le conducteur sort miraculeusement indemne, mais il aurait pu y laisser la vie. La scène s’est déroulée sur la rocade autoroutière sud d’Alger, entre Ben Aknoun et Zéralda. Si ce genre de scènes peut se produire dans la capitale qui connaît une forte présence des services de sécurité et des moyens de surveillance, que peut-il en être à l’intérieur du pays, sur les routes du Sud et des Hauts-Plateaux ?
Défaillance psychologique et laxisme
Grâce aux réseaux sociaux et à la généralisation des smartphones, la scène a pu être filmée et diffusée. Les Algériens en ont été choqués et les services de sécurité ont fait le nécessaire pour identifier le chauffard et l’arrêter dès le lendemain.
Présenté devant la justice, il a été écroué ainsi que ceux qui étaient à bord de son véhicule au moment des faits. Et alors que se multipliaient sur les réseaux sociaux les appels pour un châtiment exemplaire, une autre vidéo non moins choquante est diffusée, montrant une voiture à grande allure en sens inverse sur la pénétrante autoroutière de Béjaïa.
Des comportements qui relèvent du pénal et qui peuvent être mis dans la case des crimes et qualifiés de tentatives délibérées de tuer. Qui ne sont malheureusement pas des cas isolés, puisque les routes du pays sont infestées de chauffards qui roulent sans aucun respect du code de la route
Qu’est-ce qui les engendre et pourquoi sont-ils fréquents sur les routes d’Algérie ? La défaillance psychologique de leurs auteurs est indéniable certes, mais il y a aussi le laxisme, le manque de fermeté de la législation qui ne peuvent que conduire à un sentiment d’impunité.
L’arsenal répressif est appelé à être adapté pour distinguer l’infraction routière du comportement délictuel et criminel. Les scènes vues cette semaine sur la rocade Sud d’Alger et la pénétrante de Béjaïa relèvent clairement de la seconde catégorie.