Les autorités ont pris des mesures drastiques pour freiner la progression de l’épidémie du coronavirus, incluant notamment un confinement obligatoire, total à Blida, partiel dans dix autres wilayas, dont la capitale. Mais sur le terrain, les choses ne se passent pas toujours comme prévu et souhaité.
Au moment où les Algériens sont censés rester chez eux et réduire leurs déplacement et contacts au strict nécessaire, des images partagées sur les réseaux sociaux ont de quoi choquer. Aux quatre coins du pays, des files d’attente et scènes de bousculade devant les magasins ou les dépôts de produits alimentaires sont signalées quotidiennement.
Le plus souvent, ces citoyens qui font fi des règles élémentaires de précaution le font pour acquérir des denrées alimentaires devenus rares sur le marché, notamment la semoule ou le lait en sachet subventionné.
Le risque de contamination dans pareils rassemblements est très élevé et cela, ni les autorités ni les citoyens ne l’ignorent. Dans les dizaines de vidéos partagées sur les réseaux sociaux, aucune ne montre une file d’attente où la distance sociale recommandée d’un mètre est respectée. Impuissantes, les forces de l’ordre se contentent de maintenir l’ordre et d’éviter de sérieux problèmes.
Ces scènes rappellent celles des retraités, la frange la plus vulnérable à la maladie, entassés devant les bureaux de Poste le jour du versement de leur pension, le 21 mars. Dans les deux cas, ceux qui prennent des risques insensés pour eux-mêmes et pour les autres, n’ont pas d’autre choix.
Les citoyens redoutent une longue période de confinement et s’empressent de disposer de leur argent ou de constituer des réserves suffisantes. L’urgence de faire face à la progression de l’épidémie n’a pas laissé le temps aux autorités pour mettre en place des mécanismes efficaces d’approvisionnement et c’est tout le confinement qui s’avère difficile à appliquer.
À Blida, ville la plus touchée et astreinte aux mesures les plus drastiques, des vidéos sont partagées quotidiennement, montrant des citoyens se plaindre de ne pouvoir s’approvisionner en denrées alimentaires indispensables. Ces vidéos sont tournées dans la rue au moment où les plaignants étaient censés se trouver chez eux. Mais ont-ils le choix ?
Les mêmes cris de détresse sont entendus dans d’autres villes, comme Mostaganem, pourtant non concernée par le confinement partiel. Au fur et à mesure que remontent ces dysfonctionnements, le gouvernement multiplie les mesures supplémentaires qui, comme les traitements médicaux testés partout dans le monde, n’offrent aucune garantie de résultat.
À Blida par exemple, il est demandé aux habitants de désigner des représentants de quartiers pour faciliter l’acheminement et la distribution des approvisionnements au moment où des autorisations exceptionnelles de déplacement sont accordées aux transporteurs de fruits et légumes et d’autres produits alimentaires.
Toute décision pouvant faciliter la vie aux populations dans cette période de crise est la bienvenue, mais beaucoup s’interrogent, devant ces dysfonctionnements constatés au bout de quelques jours, s’il est possible de tenir un confinement de longue durée.
Si, sur cet aspect, le gouvernement est pris de court et se trouve face à une équation compliquée, il a en revanche toute la latitude d’agir avec fermeté contre ceux qui, sans y être contraints, bravent le confinement et les règles de prévention ou, plus grave, ceux qui présentent des signes de contamination et qui refusent de se conformer au dépistage et autres prescription. C’est dans cette optique que s’inscrit la dernière instruction du Premier ministre, prévoyant des mesures de réquisition et rappelant les peines encourues en vertu du Code pénal.
L’inconscience n’a parfois pas de limites. Des personnes se sachant atteintes ont fui leurs chambres d’isolation dans les établissements de santé.
Enfin, avec tous les aléas liés à l’approvisionnement, le confinement risque d’être très peu pris au sérieux si l’illusion de la disponibilité d’un traitement, voire d’un vaccin, continue à être entretenue. Il s’agit d’une manière d’appeler la population à baisser la garde alors que le pire est peut-être à venir. Il serait salvateur que le ministère de la Communication explique aux médias qu’en continuant à inviter sur leurs plateaux des charlatans d’un autre âge, ils ne rendent pas service à la société.