Des informations contradictoires circulent sur l’état de santé de Karim Tabbou. Certains de ses avocats assurent que le militant politique est partiellement paralysé des suites du malaise qu’il a fait mardi dans la salle d’audience de la 5e chambre pénale de la Cour d’Alger, son frère parle de signes d’amélioration et le parquet d’Alger dément que Tabbou ait été victime d’un AVC.
Dans un communiqué mis en ligne ce jeudi soir par Me Abdelghani Badi au nom du collectif de défense et en réponse à celui publié dans la journée par le parquet, il est indiqué que M. Tabbou a bel et bien eu un malaise mardi 25 mars dans la salle d’audience et transféré sur le champ à l’infirmerie de la Cour d’Alger.
« Le jour même, des membres du collectif de défense se sont rendus à l’établissement pénitentiaire de Koléa pour se rassurer sur l’état de santé de leur client, et après une longue attente et des informations contradictoires, il leur a été permis de le voir à 16h45 pour une durée qui n’a pas dépassé vingt minutes et ils ont pu constater une paralysie apparente du côté droit (le visage, la main et le pied), ce qui est une conséquence d’une hypertension artérielle », indique le communiqué du collectif de défense.
Mostefa Bouchachi, contacté ce soir par TSA, confirme que l’état de santé de Tabbou « ne permet pas de le laisser en prison », mais ne parle pas de paralysie.
« Karim tient bon »
Son frère, Djafar Tabbou, s’est exprimé, en début de soirée, sur les réseaux sociaux et tient à peu près les mêmes propos que Me Bouchachi, rassurant que le détenu « montre des signes d’amélioration ».
« Karim est en danger tant qu’il demeure en prison. Pourquoi et qui est derrière tout cela ? Des avocats ont pu lui rendre visite ce soir, même s’il montre des signes d’amélioration, son état de santé nécessite toujours une prise en charge médicale urgente. Mais nous rassurons tout le monde qu’il tient bon et il vous remercie de votre solidarité avec lui et avec toute la famille. Il devait passer cette nuit avec ses enfants mais le système en a décidé autrement », a-t-il indiqué en fin de journée sur sa page Facebook. Djaffar avait indiqué hier que son frère se trouvait toujours à l’infirmerie de la prison au lendemain de son procès en appel au cours duquel il a eu un malaise.
D’autres avocats, contactés également par TSA, ont affirmé qu’ils se sont présentés à la prison de Koléa mais il ne leur a pas été permis de voir leur client.
Le parquet d’Alger, lui, dément que Tabbou ait été victime d’un AVC. Dans un communiqué rendu public ce jeudi soir – avant la publication de celui des avocats-, le parquet a indiqué que « Karim Tabbou a subi des examens médicaux approfondis au CHU Mustpaha Bacha » où « il a été pris en charge par trois professeurs spécialisés ».
Ce qu’il convient d’appeler désormais l’affaire Tabbou suscite une vive polémique depuis mardi dernier. Le coordinateur de l’Union démocratique et sociale – UDS, non agréé), arrêté une première fois le 11 septembre, puis le 26 du même mois, avait été condamné le 11 mars par le tribunal de Sidi M’hamed à une année de prison dont six mois ferme.
Il devait quitter la prison de Koléa ce jeudi 26 mars après avoir purgé sa peine. Mais à la surprise générale, son procès en appel a été programmé 48 heures avant la date prévue pour sa sortie. Ses avocats avaient dénoncé cette programmation surprise et la poursuite du procès malgré un malaise qu’a fait leur client dans la salle même d’audience. Leur demande de reporter le procès a été rejetée et Tabbou verra finalement sa peine avec sursis, prononcée en première instance, transformée en peine de prison ferme, synonyme de six mois supplémentaires derrière les barreaux.
Beaucoup d’organisations indépendantes de défense des droits de l’Homme, même à l’étranger, ont dénoncé « un procès politique » et les avocats se sont élevés contre des « atteintes aux droits de la défense ». Le barreau d’Alger a décidé de suspendre toute collaboration avec les instances judiciaires et l’Union nationale des ordres des avocats (UNOA) a appelé à l’intervention des hautes autorités du pays.
Le parquet d’Alger a rejeté ces accusations. Il a assuré que la procédure a été respectée. Pour sa part, le Conseil national des droits de l’Homme (gouvernemental) a affirmé que «le refus du report du procès « relève légalement du ressort exclusif de cette juridiction (la Cour d’Alger, ndlr) ».