Acheuk Youcef Chawki, directeur général de la Caisse nationale de sécurité sociale des non-salariés (Casnos), invité du TSA Direct, ce mardi 13 février, a rappelé que l’affiliation et la cotisation à cette caisse est une obligation légale.
« En 2014, j’étais frappé par le nombre bas des cotisants et des personnes non affiliées. Il n’y avait que 450.000 qui cotisaient sur un potentiel de trois millions de non-salariés. Idem pour les affiliés dont le nombre était estimé à 1,2 millions de personnes. C’était très peu alors qu’il s’agit d’une obligation. Certains pensaient que l’affiliation n’avait pas de caractère obligatoire. Toute personne se doit d’avoir une couverture sociale », a-t-il déclaré.
Depuis 2014, la Casnos a lancé une campagne d’information et d’explication pour convaincre les artisans, les commerçants, les industriels, les agriculteurs et les professions libérales de venir s’affilier à la caisse.
« Le message doit arriver par tous les moyens pour rendre plus visible la Casnos. Nous avons revu l’organisation puisque nous sommes passés de 13 à 49 directions de wilayas sans augmenter d’effectifs. Chaque agent a plusieurs tâches », a-t-il dit.
Le nombre des cotisants est, selon lui, passé à 900.000, à fin 2017. « 900.000 sur trois millions. Ce nombre est appelé à s’élever très vite puisque nous n’avons pas encore intégré l’informel et les personnes qui travaillent pour leur compte et qui n’ont pas encore d’identité professionnelle. Le nombre des affiliés est de 1,7 millions actuellement. Là aussi, il y a un travail à faire. Pour cette année 2018, nous tablons pour un nombre de cotisants de 1,1 millions et au-delà », a-t-il souligné.
« La Casnos n’est pas déficitaire »
Acheuk Youcef Chawki a évoqué aussi le manque d’information ou de conscience puisque la couverture sociale des non-salariés concerne aussi les ayants droits (conjoints, enfants, parents, beaux-parents, sœurs, frères).
« Chaque cotisant a, pour lui, même une couverture sociale et sanitaire, a une carte Chiffa, a la possibilité, en cas de coup dur, d’aller dans les cliniques, notamment de chirurgie cardio-vasculaires ou d’hémodialyse où les coûts sont très élevés. Il a aussi la retraite. C’est toute la famille qui en bénéficie », a-t-il détaillé.
Les non-salariés pensaient, selon lui, que la Casnos était en difficultés financières et que, par conséquent, ils ne voulaient pas cotiser.
« La Casnos n’est pas déficitaire. Nous sommes solvables notamment sur le volet retraite. Les études que nous avons faites jusqu’à 2025, nous donne une aisance financière. Notre but est d’aller au-delà de 2035 et faire en sorte que la Casnos soit une caisse pérenne. La Casnos a payé toutes ses dettes », a-t-il précisé. Les recettes de la Casnos sont passées de 35 milliards de dinars, en 2014, à 70 milliards de dinars en 2017.
« Les avocats qui ne payent pas leurs cotisations, risquent d’être radiés du barreau »
La Casnos et la Cnas (Caisse nationale des assurances sociales) travaillent ensemble actuellement avec la mobilisation de 900 contrôleurs sur le terrain.
« Ils vérifient, par exemple, si les employeurs payent leurs cotisations et déclarent leurs salariés. Savez-vous qu’un salarié au SMIG, 18.000 dinars, cotise annuellement 70.000 dinars alors qu’un non-salarié insiste pour cotiser au minimum, ce seuil légal doit être une exception. Est-il acceptable qu’un employeur paie moins que son employé ? », s’est-il interrogé.
Le seuil minimal de cotisation annuelle est de 32.400 dinars et le maximal à 640.000 dinars. Cette somme est considérée comme une charge et est, par conséquent, déductibles d’impôts.
Le seuil minimal est calculé sur la base de 18.000 dinars. Selon le DG de la Casnos, les jeunes qui démarrent une activité, comme ceux des dispositifs ANSEJ et CNAC, sont autorisés à cotiser le minimum.
« Nous avons tenu une réunion avec les bâtonniers pour dire que les avocats qui débutent peuvent cotiser au minimum pendant les deux premières années. Pour les autres avocats, c’est en fonction de leurs revenus. Les avocats qui ne payent pas leurs cotisations, risquent d’être radiés du barreau. Ce n’est donc pas aussi simple», a-t-il averti.
Il s’est étonné que les avocats, « qui ne méconnaissent pas la réglementation », ne payent pas leurs cotisations. Il a annoncé l’envoi de 300.000 mises en demeures pour non payement de cotisation ou d’affiliation et le transfert de 40.000 dossiers au contentieux pour tous les non-salariés.
« Nous allons envoyer encore des mises en demeure. Sur les 300.000, la moitié des non-salariés se sont présentés pour régulariser leur situation. Nous allons interpeller les retardataires par d’autres voies. Si le dossier est envoyé au contentieux, tous les avantages et facilités sont perdus pour les non-salariés. Ceux qui viennent régulariser leur situation sont gagnants. Après payement, ils reçoivent leur carte chiffa et leur attestation de mise à jour. Ils bénéficient d’un calendrier de payement pour les années précédentes. Payement qui va rentrer dans le calcul de la retraite. Ils font ensuite un recours pour que les pénalités de retard soit réduite jusqu’à 50 % », a-t-il expliqué.
« Nous pouvons bloquer les avoirs »
Il n’a pas écarté le recours au recouvrement forcé en cas de refus d’affiliation et de cotisation après mise en demeure. « Cela va du blocage du compte, à la relance par l’huissier et à la démarche vers la justice. À ce niveau-là, nous pouvons bloquer les avoirs et les comptes et procéder à une saisie conservatoire pour récupérer notre argent. Nous allons passer à la phase 2 avec l’application de la réglementation dans toute sa rigueur. La loi nous permet de faire des contrôles sur place. Nous contrôlons même les lieux de l’activité en présence de l’Inspection de travail. Nous pouvons demander aux impôts de venir jeter un coup d’œil aussi », a mis en garde le DG de la Casnos.
Il a estimé que la sous déclaration est un acte frauduleux. « Une personne peut déclarer son revenu mais nous évaluons après, selon plusieurs critères, pour faire un redressement. Si elle accepte, elle a accès à son attestation de mise à jour. Nous ne pouvons pas mettre sur le même pied d’égalité, un commerçant qui est sur une grande artère avec un commerçant qui est installé en zone rurale. Maintenant qu’un grossiste cotise au minimum prétextant des revenus de 200.000 dinars par an, c’est inadmissible », a-t-il noté.
Il a rappelé que plus un non-salarié cotise, plus sa retraite augmente. « Le non salarié décide de sa retraite alors que le salarié dépend de son employeur. La retraite peut atteindre les 200.000 par mois. Quand on cotise au minimum, on va se retrouver avec une retraite de 15.000 dinars », a-t-il dit.
« J’aurai admis que 10% de la population cotise au minimum. Dans celle-ci, il y aura le petit artisan, la couturière qui travaille chez elle, le jeune de l’ANSEJ qui démarre, le jeune avocat ou médecin qui commence. Mais, pouvez-vous imaginer que 89% des non-salariés cotisent au minimum. À moins d’être dupes, qui va croire que 89% des grossistes, des commerçants et des professions libérales et autres font uniquement 18.000 dinars de revenus par moi ? », s’est-il interrogé. Selon lui, une opération sera lancée prochainement pour ceux qui activent dans le secteur informel.