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Couper Internet, la nouvelle arme des régimes africains

L’ONG Internet sans frontières a lancé ce 19 janvier une campagne de mobilisation internationale contre la censure d’Internet au Tchad « pour agir contre le blocage des réseaux sociaux et le coût exorbitant d’accès à Internet dans ce pays d’Afrique centrale ».

« Le Tchad est parmi les pires États de la planète s’agissant du respect des droits numériques. Depuis la réélection contestée en avril 2016 du président Idriss Déby, au pouvoir depuis 29 ans, plus de 400.000 internautes tchadiens sont régulièrement privés d’un accès normal à Internet et aux réseaux sociaux pour des raisons politiques », affirme ISF.

« A cette censure gouvernementale s’ajoutent le coût exorbitant d’accès à Internet et la qualité médiocre de la connexion, imposés par les compagnies de télécommunications », ajoute l’ONG.

Le Tchad n’est pas un cas isolé. Les régimes africains sont régulièrement épinglés par Internet sans frontières pour leurs mesures visant à couper l’accès à Internet à leurs ressortissants.

Au Gabon, l’accès à Internet avait été coupé le 7 janvier dernier lors de la tentative de coup d’Etat militaire. Des centaines de milliers de Gabonais se sont ainsi retrouvés dans l’impossibilité de se connecter à la bande passante internationale. Le blocage avait notamment affecté les principaux opérateurs du pays que sont Gabon Télécom et sa filiale mobile Libertis, ainsi que l’opérateur Airte.

Internet a aussi été totalement coupé en République démocratique du Congo au 31 décembre dernier, et l’Etat a unilatéralement décidé au 1er décembre d’augmenter le coût d’accès à la bande passante de 60%. Internet ne sera rétabli que le 19 janvier dernier, après 20 jours de coupure.

L’accès à Internet avait déjà auparavant été coupé au RD Congo en février 2018. « Le gouvernement congolais doit savoir qu’au 21e siècle, l’Internet est devenu un outil indispensable à la vie. En conséquence, il ne devrait pas être coupé pendant les manifestations. Il devrait plutôt être disponible à la fois pour l’État et la société civile afin de promouvoir la transparence et protéger la démocratie », déclarait en réaction Blaise Ndola, un activiste congolais consultant en communications numériques.

Au Mali, les autorités avaient coupé l’accès au réseau social Twitter et à l’application de messagerie WhatsApp le 29 juillet 2018, jour des élections présidentielles. Les autorités maliennes avaient également le même jour rendu inaccessible le site du Guardian project, qui met à disposition des informations sur les outils de contournement de la censure. Le gouvernement malien avait déjà ordonné en août 2016 l’accès à Facebook et Twitter, alors qu’avaient lieu des manifestations contre l’arrestation d’un animateur radio populaire.

En septembre 2017, au Togo, les réseaux des deux seuls opérateurs et fournisseurs d’accès Internet (FAI) Togocell et Moov ont été rendus inaccessibles alors que de nombreuses manifestations étaient organisées par l’opposition dans tout le pays, pour s’opposer à l’avant-projet de modification constitutionnelle visant à lever la limitation des mandats présidentiels et à modifier le mode de scrutin à deux tours.

En 2017 encore, le gouvernement au Cameroun avait ordonné la coupure de l’accès à Internet dans les régions anglophones du pays pendant quatre mois entre le 17 janvier et le 20 avril. En octobre, le gouvernement camerounais avait une nouvelle fois ordonné aux fournisseurs de services de télécommunication une coupure totale du réseau Internet dans la région anglophone. Les services de messagerie par téléphone portable comme Whatsapp ou Facebook Messenger avaient ainsi été suspendus dans les régions nord-ouest et du sud-ouest.

Par ailleurs, le gouvernement égyptien a instauré une série de lois depuis septembre 2018 visant officiellement à réguler Internet. Ainsi, tout site qui publie des informations jugées fausses ou portant atteinte à la paix sociale ou aux valeurs de la société est passible d’une peine de prison et d’une lourde amende pouvant atteindre l’équivalent de huit années de salaire minimum. En outre, tout compte suivi par plus de 5 000 personnes est désormais considéré comme un média et peut tomber sous le coup de cette loi jugée comme étant une « épée de Damoclès ».

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