On la craignait. Elle est arrivée. L’Algérie est confrontée à une troisième vague du covid-19 en pleine période estivale. La barre des 800 cas a été franchie pour la deuxième fois depuis le début de la pandémie dans le pays fin février 2020. La première fois, c’était début novembre dernier.
Alors que le covid-19 connait un bond spectaculaire des contaminations, que les hôpitaux sont saturés et que la vaccination avance lentement, un relâchement spectaculaire est observé chez les citoyens, surtout les plus jeunes.
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Le protocole sanitaire est foulé aux pieds, les masques ne couvrent plus les visages des citoyens, et quand ils sont portés, ils couvrent juste le menton : en résumé, les gestes barrières sont complètement oubliés.
Accolades, bises et poignées de main sont de retour comme si le virus avait été vaincu. Dans les rues, d’interminables cortèges de mariées défilent avec klaxons et youyous au nez et à la barbe des policiers.
Les salles des fêtes, censées être fermées, font le plein pour célébrer des mariages et des réussites au brevet. Dans les commerces, les gens font leurs emplettes dans une incroyable promiscuité, sous l’œil nonchalant des gérants.
Pendant que la pandémie entre dans sa troisième vague, les Algériens font preuve d’une indifférence qui laisse perplexe le corps médical, exsangue après plus d’un an et demi de lutte auprès des malades atteints de covid-19.
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Les jeunes ont baissé la garde
Place du 1er-Mai, en plein centre d’Alger. Sous les chapiteaux de vaccination anti-Covid installés sur la placette à proximité du CHU Mustapha, la chaleur est suffocante.
La foule se presse pour s’inscrire sur les listes. Pas de jeunes mais plutôt des personnes âgées, avons-nous pu constater sur place. « Je suis arrivé à 6 h 30 ce matin pour être sûr de recevoir ma première dose de vaccin aujourd’hui », nous confie Omar (79 ans).
Médecins et personnels de santé s’activent pour vacciner le maximum de personnes, comme l’explique le Dr Nadia Djili, responsable de ce vaccinodrome dépendant de l’établissement public de santé de proximité Sidi M’hamed Bouchenafa.
« Suite aux instructions du président de la République, nous essayons d’accélérer la cadence. Hier samedi, nous avons vacciné 370 personnes entre 8 h et 18 h. Ce sont les personnes âgées qui s’inscrivent principalement », détaille-t-il, inquiet.
Malgré le rebond de la pandémie qui signe actuellement sa troisième vague en Algérie, les médecins sont confrontés à un étrange paradoxe.
« Pendant qu’une partie de la population s’alarme, de nombreux citoyens agissent comme si ce virus n’existait pas. Les célébrations de mariage et autres réussites aux examens de 6e et de brevet battent leur plein apportant chaque jour leurs lots de contaminations. Les services réanimations des hôpitaux sont pleins. J’ai l’impression que la population est inconsciente de la gravité de la situation », se désole le Dr Djili.
Le spécialiste pointe l’irresponsabilité des jeunes. « Malgré les appels à la vigilance, ils continuent à profiter de l’été comme si nous étions dans une période normale ! », déplore Dr Djili.
Oublié, le protocole sanitaire !
Rue Hassiba Ben Bouali, les commerces de vêtements accueillent du monde. Ni les vendeurs ni les clients ne portent un masque. Interrogé sur ce laisser-aller en plein rebond de l’épidémie, le propriétaire de l’une de ces boutiques nous confie sa lassitude.
« Cette situation a assez duré. Je suis las et les clients aussi. D’ailleurs, certains m’envoient carrément promener lorsque je leur fais une remarque sur le non-port de la bavette, alors je laisse couler », reconnaît-il.
Galerie marchande de la rue Ferhat Boussaad, un agent est posté à l’entrée pour contrôler que les clients qui mettent un pied à l’intérieur portent bien leur masque.
Mais sitôt à l’intérieur, certains se dépêchent de le retirer. Du côté des commerçants, pas de masque également sur les visages. Il n’y a ni gel, ni gestes barrières. On touche les produits, on se parle à des distances rapprochées, dans une indifférence totale.
Même constat dans les marchés, les rues commerçantes et les cafés. Aux arrêts de bus de la Place Audin où nous nous sommes rendus, certains usagers portent un masque, d’autres non.
Ni les conducteurs, ni les receveurs des bus ne les rappellent à l’ordre. Les bus sont également bondés, avons-nous pu observer. « J’étouffe avec ce fichu masque sur le nez, se plaint un jeune homme. Cette histoire de covid commence à me monter à la tête. Advienne que pourra ».
Depuis quelques jours, les contaminations au covid-19 connaissent un rebond inquiétant en Algérie. Les hôpitaux sont à nouveau saturés et le personnel de santé dépassé.
L’Aïd-el-Adha, occasion de grandes retrouvailles familiales, approche à grands pas. Il sera célébré mardi 20 juillet. Face à la détérioration de la situation sanitaire que connaît notre pays et devant l’inconscience de nombreux citoyens, les pouvoirs publics prendront-ils des mesures afin de juguler un tant soit peu cette déferlante ?