La France doit-elle indemniser l’Algérie pour les crimes commis pendant 132 ans de colonisation ? Bien que l’Algérie ne le réclame pas officiellement, la question est régulièrement soulevée.

Un politologue français vient de la remettre sur le tapis. Arguments à l’appui, Thomas Guénolé a expliqué sur Sud Radio pourquoi la France doit verser des compensations à l’Algérie.

La question des indemnisations n’est pas posée dans le cadre du processus de “réconciliation des mémoires” lancé ces dernières années par le président Abdelmadjid Tebboune et son homologue français Emmanuel Macron.

Par exemple, elle n’a pas figuré parmi les propositions contenues dans le rapport Stora remis au président français Emmanuel Macron en janvier 2021. Néanmoins, l’Algérie peut légitimement réclamer des compensations pour les nombreux crimes coloniaux commis sur son sol pendant 132 ans.

“La France doit financièrement indemniser l’Algérie pour les crimes de la colonisation”, a estimé Thomas Guénolé. Celui-ci a cité un exemple que la France devrait suivre : celui de l’Allemagne qui a versé, 1,1 milliard d’euros à la Namibie pour les crimes qu’elle a commis dans ce pays d’Afrique au début du 20e siècle.

Guénolé a listé les crimes de la colonisation française en Algérie, chiffres à l’appui.

“Un tiers de la population algérienne de l’époque a été tué pendant la conquête, on parle d’un million de morts par des massacres et par la famine provoquée délibérément comme stratégie de conquête qui a fait en elle-même 400 000 morts”, a-t-il rappelé, citant également les massacres de 1945 à Sétif, Guelma et Kherrata.

Quant au Code de l’indigénat, Thomas Guénolé l’a décrit comme ”l’organisation de quelque chose qui est tout simplement l’Apartheid en Algérie française”.

Pourquoi la France doit indemniser l’Algérie pour ses crimes coloniaux

“En termes de coût humain total, on ne peut vraiment pas mettre sur le même plan tout ce qui a pu être fait à des colons ou à des Français par des Algériens. En fait, je n’ai pas connaissance que les Barbaresques aient fait un million de morts, qu’ils aient fait des camps de déportés, etc.”, a-t-il ajouté.

Surtout, le politologue a tordu le cou à “l’argument bidon” des supposés “bienfaits de la colonisation” qui est souvent brandi par l’extrême-droite, comme la construction de routes ou d’hôpitaux, démontrant par les chiffres que tout ce qui a été réalisé en Algérie l’a été au seul bénéfice des colons et “en priorité pour le pillage des ressources”

“En 1954, 50 % des Algériennes accouchaient à la maison tandis que c’était 8% des femmes des colons”, seuls “15 % des enfants de colonisés qui étaient éduqués” et “3 % des propriétaires c’était des colons” qui “détenaient à eux seuls 25 % des terres, et c’était les meilleurs terres disponibles”.

Publiée sur la plateforme X mercredi en fin de journée, la vidéo de la proposition de Thomas Guénolé a été vue plus de 400.000 fois et a suscité plus d’un millier de réactions en 24 heures. Elle a fait bondir l’extrême-droite dans un contexte de fortes tensions entre l’Algérie et la France. Le politologue a été aussitôt traité de traître”

Dans un communiqué officiel diffusé en octobre 2021 en réaction à des propos d’Emmanuel Macron sur l’histoire de l’Algérie, la présidence de la République avait souligné que 5 630 000 Algériens ont été tués pendant la colonisation française entre 1830 et 1962.

En octobre dernier, le président Abdelmadjid Tebboune a estimé que “l’Algérie a été choisie pour le vrai grand remplacement qui consistait à chasser la population locale et la remplacer par la population européenne”.

“Il y a eu génocide en Algérie. Nous étions quatre millions d’habitants en 1830. À l’indépendance, la population de l’Algérie ne dépassait pas les 9 millions d’habitants”, a ajouté le président algérien, exigeant de la France la “reconnaissance de ses crimes coloniaux”.

A la même occasion, Abdelmadjid Tebboune a évoqué un autre crime de la colonisation, celui des essais nucléaires effectués dans le Sahara algérien.

“Si vous voulez aborder les sujets sérieux, venez nettoyer les sites où vous avez effectué des essais nucléaires. Il y a des gens qui meurent encore et d’autres sont impactés. Vous êtes devenus une puissance nucléaire, et nous avons eu les maladies”, a-t-il dit à l’adresse des autorités françaises.

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