À peine le processus de rapprochement entamé, l’Algérie et la France sont entrées dans une nouvelle phase de turbulences. À l’incarcération d’un fonctionnaire d’un consulat d’Algérie en France, Alger a répliqué par l’expulsion de 12 agents de l’ambassade de France en poste en Algérie.
Pour désamorcer cette nouvelle crise, les président Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron doivent de nouveau se parler, comme ils l’ont fait il y a quelques semaines, estime le député français Éric Coquerel qui se demande si le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau n’est pas à l’origine de ce retour brusque à la case départ. M. Retailleau est partisan de la ligne dure avec l’Algérie.
Après huit mois de crise inédite, les deux pays ont repris langue lundi 31 mars, à travers un entretien téléphonique entre les présidents Tebboune et Macron.
Algérie – France : chronologie du début d’une nouvelle crise
Les deux chefs d’État ont établi une feuille de route pour un retour à la normale de la relation bilatérale. Le 6 avril, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot s’est rendu à Alger. Les deux parties sont convenues de remettre sur la table tous les dossiers en suspens.
Et alors que tout le monde entrevoyait la fin de la brouille, une nouvelle affaire a éclaté vendredi 11 avril avec l’annonce de l’incarcération en France de trois individus accusés d’être impliqués dans l’enlèvement présumé d’Amir Boukhors, connu sur les réseaux sociaux sous le nom de Amir DZ.
Parmi les personnes incarcérées, un agent consulaire algérien. L’Algérie a exprimé sa protestation à l’ambassadeur de France Stéphane Romatet, convoqué samedi au ministère des Affaires étrangères.
Ce lundi, le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot a indiqué que l’Algérie a décidé d’expulser 12 agents de l’ambassade de France à Alger. Une mesure inédite depuis l’indépendance.
Selon Le Figaro, les agents objet de l’expulsion relèvent tous du ministère de l’Intérieur dirigé par Bruno Retailleau. « On peut se demander si ce n’est pas Bruno Retailleau qui essaie de reprendre le dossier en main alors qu’il avait été heureusement cornorisé par le président de la République », s’est interrogé ce lundi matin sur TF1 le député de La France Insoumise (LFI) Éric Coquerel.
Algérie – France : Bruno Retailleau soupçonné de vouloir reprendre le dossier
Le député de la LFI soupçonne les services du ministère de l’Intérieur d’avoir procédé à l’arrestation de trois Algériens, dont un agent consulaire, pour saboter le processus de réconciliation entre les deux pays. « Parce que, a-t-il expliqué, il est évident qu’à partir du moment où on arrête trois personnes, trois membres de l’ambassade d’Algérie, il y aurait des représailles. »
« La réaction est automatique. On sait que Alger ne se laisse pas faire et que dans ce genre de confrontations, ils haussent le ton », a-t-il rappelé. Tout en pointant du doigt la responsabilité de Retailleau, le député a appelé les deux chefs d’Etat à se reparler immédiatement.
« On veut repartir à la confrontation que le président de la République a heureusement arrêtée, déclenchée par Bruno Retailleau pour je ne sais quel objet présidentiel, parce qu’il a dû penser que ça faisait bien d’attaquer l’Algérie, donc moi ce que à quoi j’appelle, c’est que les deux présidents se reparlent tout de suite », a-t-il suggéré.
Paris menace de riposter
Jean-Noël Barrot a affirmé que la France était prête à des « représailles » immédiates si Alger mettait à exécution l’expulsion de ses agents.
Sur X, l’ancien ambassadeur de France aux États-Unis Gérard Araud a estimé qu’une telle réaction est inévitable. « L’Algérie expulse douze agents de notre ambassade. Nous devons pratiquer l’exacte réciprocité », a écrit le diplomate, qui a expliqué ce qu’il qualifie de « B-A-BA des relations internationales » : « rendre la gifle reçue. Pas un de plus, pas un de moins. De même grade, de fonctions comparables ».
En somme, les deux capitales risquent d’entrer dans un nouvel engrenage au moment où les observateurs s’y attendaient le moins.
L’Algérie expulse douze agents de notre ambassade. Nous devons pratiquer l’exacte réciprocité. C’est le B-A-BA des relations internationales : toujours rendre la gifle reçue. Pas un de plus, pas un de moins. De même grade, de fonctions comparables.
— Gérard Araud (@GerardAraud) April 14, 2025