La journée du lundi 29 juillet a été marquée par une succession de réponses négatives à l’appel lancé la veille par Karim Younès, coordinateur du panel de dialogue, à vingt-trois personnalités nationales pour rejoindre son instance.
L’ancien président de l’APN sait maintenant au moins qu’il ne pourra pas compter sur le concours de grosses cylindrées de la scène politique pour la suite du processus qu’il a accepté de mener et que, au mieux, il aura à ses côtés des seconds couteaux sans aura. Du moins, si les choses restent en l’état.
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M. Younès a réagi ce mardi aux critiques qui le ciblent depuis sa rencontre avec le chef de l’État jeudi dernier en compagnie des cinq autres membres du panel. S’il n’a pas encore craqué, il semble néanmoins très affecté par « la manière inique dont certains opèrent ».
« Que ceux qui pensent détenir la Vérité, en s’installant dans le confort du censeur fassent mieux. J’applaudirai à leur succès », met-il au défi ses détracteurs dans un post publié sur sa page Facebook. Une autre menace de jeter l’éponge ? Ça y ressemble fortement, même si l’homme se dit prêt à sacrifier sa réputation. « Je suis plus soucieux du futur de mon pays que du présent de ma propre image. C’est alors, en mon âme et conscience que je me suis senti obligé… l’obligé de mes compatriotes, l’obligé de nos enfants, adultes en devenir, exclusivement. Même si je dois encore être victime de mise en accusation, je continuerai à agir de façon équitable », assure-t-il.
En plus des accusations dont il fait l’objet lui et les membres du panel, que ce soit sur les réseaux sociaux ou lors des marches populaires, Karim Younès est particulièrement peiné par le rejet presque unanime essuyé par son appel de dimanche. « Je suis triste de constater que mon appel à l’action se transforme en appel à la réaction ».
L’incompréhensible attitude du pouvoir
L’homme met en avant sa bonne foi et évoque presque un malentendu. « Tenter d’obtenir la libération de jeunes manifestants pour avoir porté le drapeau de ses couleurs identitaires est une tare ? De faire arrêter les violences policières sur les manifestants est une hérésie ? Faire sauter les verrous qui empêchent l’accès de la capitale les jours de marches, une faute grave ? D’appeler à l’ouverture des médias aux opinions qui courent dans la société une ineptie ? De porter la voix de millions d’Algériens pour le départ de l’actuel gouvernement, une lubie ? Que veut-on au juste ? De laisser tous ses leviers de pouvoir au pouvoir que l’on veut abattre ? ».
Des interrogations qui constituent autant de réponses à la solitude du panel et aux critiques acerbes qui le ciblent. Mis à part Mouloud Hamrouche qui a fait savoir qu’il n’était intéressé par aucune médiation ni aucun poste, tous ceux qui ont été sollicités, et même ceux qui ne l’ont pas été, ont été plus que clairs en signifiant qu’il ne peut y avoir de dialogue dans un climat fait d’atteinte aux libertés et de fermeture des champs médiatique et politique.
M. Younès a lui-même menacé de prononcer l’autodissolution de la commission qu’il coordonne si les mesures d’apaisement unanimement réclamées ne sont pas mises en œuvre sous une semaine.
« Cette semaine sera décisive. Si les engagements pris par la Présidence ne connaissent pas un début d’exécution, le panel, Tajma3th n’el khi, se réunira et examinera l’éventualité de la suspension de ses travaux et pourra même aller jusqu’à son autodissolution », a-t-il mis en garde au soir du vingt-troisième vendredi.
Le facteur de blocage est clairement identifié et ni la classe politique ni les personnalités nationales n’y sont pour quelque chose. La solitude de Younès et de son panel est d’abord causée par cette incompréhensible attitude du pouvoir qui, en hésitant à satisfaire un préalable loin d’être irréalisable, prend le risque insensé de tuer la modération parmi le hirak et l’opposition.
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