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Dans l’Angola pétrolier en crise, le rêve de la diversification par la pêche

Dans l’Angola pétrolier en crise, le rêve de la diversification par la pêche

Le président angolais Joao Lourenço le répète à l’envie : le salut de son économie en crise passe par la fin de l’ère du tout-pétrole. Une autre ressource naturelle, la pêche, s’annonce prometteuse mais le manque de moyens limite, pour l’heure, son potentiel.

Ex-ministre de la Défense, M. Lourenço a succédé en septembre à Jose Eduardo dos Santos, à la tête du pays pendant trente-huit ans, en promettant rien moins qu’un « miracle économique ».

Il y a urgence. En 2014, la chute des cours de l’or noir, qui fournit à l’Etat 70% de ses recettes fiscales, a plongé l’Angola en plein marasme. Plus de la moitié de sa population vit aujourd’hui avec moins de 2 dollars par jour, selon l’ONU.

Pour relancer la machine économique, le nouveau chef de l’Etat compte sur ses 1.600 km de côtes, le long de l’Atlantique.

« La diversification de l’économie est notre priorité », a-t-il récemment assuré. « Nous allons relancer la pêche et l’agriculture et ouvrir le pays aux investissements étrangers ».

Joao Lourenço a visité en février trois usines de Tombwa, dans la province de Namibe (sud-ouest). On y congèle les poissons ou les y transforme en huile, utilisée pour les cosmétiques et la pharmacie, et en farines, prisées dans l’élevage.

Leur production est avant tout destinée à l’exportation.

Le plan élaboré par le gouvernement pour la période 2017-2022 s’est fixé pour priorité « d’améliorer les infrastructures pour soutenir la pêche et le développement de l’industrie de transformation et traitement du poisson ».

Le volume de poissons pêchés doit passer de 528.000 à 614.000 tonnes par an, celui des farines de 20.000 à 30.000.

Peu de bateaux

Mais réduire la dépendance au pétrole s’avère une tâche titanesque pour son deuxième producteur d’Afrique subsaharienne, qui a tout misé depuis des décennies sur ses seuls hydrocarbures.

« Nous pouvons transformer le poisson en farines et en huile mais nous n’avons pas la capacité de satisfaire le marché international », reconnaît Jose Gomes da Silva, le directeur de l’administration des pêches pour la province de Benguela (centre-ouest).

« Nous n’avons pas assez de bateaux et seulement une usine pour fabriquer farines et huile », déplore-t-il.

A Benguela, la capitale de la province, la pêche emploie déjà 13.200 personnes. M. Gomes da Silva en aimerait bien plus, notamment pour rouvrir l’usine de conserves de sardine qui y existait juste après l’indépendance en 1975.

Dans la région de Baia Farta, à 30 km de Benguela, l’entreprise privée Pesca Fresca transforme du poisson congelé en farines et huile de poisson, vendues ensuite en Amérique latine, en Chine ou, plus près, en Namibie et en Afrique du Sud.

Elle s’approvisionne auprès d’industriels mais aussi beaucoup de pêcheurs artisanaux, comme Orlando Eduardo.

« La pêche nous a sauvés », témoigne ce jeune homme de 32 ans. Dans un contexte de chômage très élevé, ce secteur artisanal est déjà le refuge de nombreux sans emploi.

Sur une plage écrasée de soleil, des pêcheurs déchargent de leur petite embarcation en bois colorée sardines, bars et chinchards. Les bons jours, Orlando gagne jusqu’à 20.000 kwanzas (75 euros). Plus que le salaire minimum mensuel de 18.000 kz.

Pertinence

Malgré cet apport, l’usine Pesca Fresca, qui emploie 200 salariés, peine à acheter assez de poisson pour satisfaire la demande.

Compte tenu de son prix, « très bas pour une protéine animale de haute qualité », « la demande est très élevée », explique son directeur, José Neves. La tonne de farine de poisson se vend ainsi 300.000 kwanza (environ 1.100 euros).

Mais le manque de gros bateaux de pêche et d’usines de transformation limite la production de son usine. Et les chalutiers déjà en service restent parfois à quai.

« Nous sommes confrontés à des difficultés de maintenance qui nuisent gravement à l’industrie », regrette M. Neves.

L’accès aux pièces détachées vire au casse-tête. Faute de magasins spécialisés, elles viennent d’Afrique du Sud ou du Brésil, souvent des semaines voire des mois après leur commande.

Pour doper le secteur de la pêche, l’Angola doit viser la production industrielle. Dans ce but, le ministère des Pêches a annoncé l’achat d’un navire pour 3,7 millions de dollars.

Pas suffisant toutefois pour faire la différence.

« Le secteur de la pêche représente moins de 1% du produit intérieur brut » (PIB), tempère Alves da Rocha de l’université catholique d’Angola à Luanda, « je ne vois pas comment il pourrait jouer un rôle utile dans la diversification ».

« L’agriculture en revanche me paraît plus pertinente, l’industrie manufacturière ou la construction aussi », ajoute-t-il, « le +miracle économique+ va prendre beaucoup de temps ».

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