Société

De retour d’un voyage en Algérie, il découvre à l’aéroport d’Orly qu’il n’est plus Français

La France multiplie les OQTF (obligation de quitter le territoire français) et accélère les procédures de leur mise en œuvre. Elles visent évidemment les étrangers en situation irrégulière. Il semble toutefois que même des Français à part entière se retrouvent dans le collimateur de cette fermeté vis-à-vis de l’immigration. C’est le cas d’un fils d’un immigré algérien, auquel on a signifié, à 55 ans, qu’il n’est plus Français. 

« Kafkaïen ». C’est ainsi que son avocat décrit la mésaventure de ce Français d’origine algérienne. Français depuis sa naissance et fonctionnaire, Abdel a été empêché de rentrer en France après un court séjour en Algérie. Dans le système de la police des frontières (PAF) une fiche est sortie le désignant comme “étranger”. 

Une explication surréaliste de la PAF de l’aéroport d’Orly

Abdel raconte au journal Le Parisien qu’il s’est rendu en Algérie le 9 juillet pour assister à l’enterrement de son père. De retour en France le 21 juillet, avec sa femme et son fils de 19 ans, il a eu la surprise de sa vie à l’aéroport d’Orly.

Les policiers de la PAF lui signifient qu’il ne peut pas entrer en France, malgré le passeport français qu’il a présenté. Il ne comprend pas. Il est fonctionnaire et il a l’habitude de voter et de voyager avec ce même passeport. Il n’a jamais douté un instant qu’il n’était pas français. Pourtant c’est ce que dit cette fiche qui sort du système de la police. La fiche a été émise en 2020 par la préfecture de Seine-Saint-Denis. 

L’explication qui lui a été fournie est lunaire. Son père aurait signé un document en 1970 dans lequel il s’engageait à renoncer à la nationalité française pour lui et ses enfants. Abdel, né en 1969, a donc été déchu de sa nationalité après sa naissance. “C’était complètement fou”, dit le quinquagénaire qui assure n’avoir jamais entendu parler de ce document, ajoutant qu’à l’époque, “on faisait signer de force beaucoup d’Algériens”. 

La mésaventure d’un fils d’Algérien qui découvre à 55 ans qu’il n’est pas Français 

Selon les explications du Parisien, le document en question trouve sa base légale dans un décret publié après les accords d’Évian, en 1962. Mais le décret a été aboli sous François Mitterrand et est donc caduc. 

Toujours est-il que Abdel sera traité à l’aéroport comme un étranger qui tente d’entrer illégalement sur le territoire français. Sa femme et son fils ont pu passer, mais pas lui. Il est mis en zone d’attente avec de nombreux autres refoulés. Une pièce fermée avec une petite cour qu’il décrit comme “une prison de haute sécurité”. Il y reste quatre jours. “C’était humiliant”, dit-il.

La police assure qu’elle n’a fait que suivre les règlements, expliquant que quand une fiche sort, le concerné est gardé pendant 96 heures, le temps de procéder aux vérifications et la justice prend ensuite le relais. Et c’est ce qui s’est passé. 

Présenté à une juge

Abdel est présenté devant une juge des libertés du tribunal de Créteil. L’histoire ne tient pas la route et l’homme est remis en liberté. La PAF fait appel et Abdel se retrouve devant la cour d’appel de Paris. Il a été autorisé à rentrer chez lui et a même repris son travail. 

Mais le combat ne fait que commencer pour lui. Le tribunal lui a accordé un visa de huit jours, le temps de régulariser sa situation. Il doit donc faire vite. Il a engagé une procédure pour l’établissement d’un lien de filiation et une autre pour obtenir un titre de séjour. Dans ses démarches, il est épaulé par le maire de Bobigny, qui n’est autre que son beau-frère. 

Abdel veut obtenir réparation pour le préjudice subi et ne compte pas se taire. “Je ne veux pas que ça arrive à d’autres fils d’Algériens », dit-il. 

 

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