Pour tous, c’était simplement “Johnny”: l’incarnation du rock français, une voix puissante ayant traversé les modes, une star à la vie tempétueuse et accidentée, mais aussi un survivant chantant la solitude, finalement vaincu par le cancer… Johnny Hallyday est mort dans la nuit de mardi à mercredi à l’âge de 74 ans.
C’est par un communiqué envoyé à l’AFP à 02h34 (01H34 GMT) que son épouse Laeticia a annoncé le décès de celui qui se nommait Jean-Philippe Smet dans le civil: “Johnny Hallyday est parti. J’écris ces mots sans y croire. Et pourtant c’est bien cela. Mon homme n’est plus. Il nous quitte cette nuit comme il aura vécu tout au long de sa vie, avec courage et dignité.”
“Jusqu’au dernier instant, il a tenu tête à cette maladie qui le rongeait depuis des mois, nous donnant à tous des leçons de vie extraordinaires. Le coeur battant si fort dans un corps de rocker qui aura vécu toute une vie sans concession pour son public, pour ceux qui l’adulent et ceux qui l’aiment”, poursuit-elle.
Evoquant “le papa” de leurs deux filles adoptées Jade et Joy, de Laura (née de son union avec l’actrice Nathalie Baye) et de David (né de son union avec la chanteuse Sylvie Vartan), Laeticia Hallyday conclut: “Johnny était un homme hors du commun. Il le restera grâce à vous. Surtout ne l’oubliez pas. Il est et restera avec nous pour toujours. Mon amour je t’aime tant”.
“On a tous en nous quelque chose de Johnny Hallyday”, a réagi l’Elysée.
Il n’y avait plus trop d’espoir depuis que Johnny Hallyday avait été hospitalisé il y a un mois pour détresse respiratoire.
Laeticia n’envoyait plus de messages sur les réseaux sociaux, elle qui s’était régulièrement employée à donner des nouvelles rassurantes de Johnny, depuis qu’il avait annoncé début mars être traité contre la maladie. Un cancer dont il savait déjà qu’il était métastasé.
Détecté dans les poumons de la star en novembre 2016, le cancer l’aura donc terrassé en un an. Le rocker avait déjà tutoyé la mort, lors de sa tentative de suicide en 1966 après la demande de divorce de Sylvie Vartan, puis plus récemment lorsqu’il plongea plusieurs jours dans le coma en 2009 en raison de complications consécutives à une opération.
– 100 millions de disques –
Johnny Hallyday s’est pourtant battu. En montant sur scène, en juin et juillet, avec ses copains Jacques Dutronc et Eddy Mitchell, pour la tournée des “Vieilles Canailles”. Des moments parfois difficiles, comme cette première à Lille (nord) où il était apparu affaibli par une chimiothérapie subie quatre jours plus tôt, mais aussi l’impression d’aller de mieux en mieux, au fil des concerts, comme porté par l’énergie de ce public qu’il croisait pour la dernière fois.
Pour “rester vivant”, comme s’intitulait sa dernière tournée marathon (2015-2016), cette “bête de scène”, qui a rempli en 57 ans de carrière tous les plus grands lieux de France, travaillait aussi à un nouvel album.
Avec plus de 100 millions de disques vendus et dix Victoires de la musique, “l’idole des jeunes” puis des moins jeunes a traversé les époques: celles des débuts du rock’n’roll où il ressemblait à un “Elvis Presley” made in France, des yé-yés, de la variété plus “mainstream” avec Michel Berger ou Jean-Jacques Goldman dans les années 80, pour revenir avec bonheur ces dernières années aux sources du blues et du rock.
Cette longévité exceptionnelle, depuis “T’aimer follement”, sa première chanson enregistrée en 1960, est ponctuée de dizaines de succès entrés dans la mémoire collective: “Souvenirs souvenirs”, “Le Pénitencier”, “Noir c’est noir”, “Retiens la nuit”, “Pour moi la vie va commencer”, “Que je t’aime”, “Gabrielle”, “La musique que j’aime”, “Ma gueule”, “Quelque chose de Tennessee”, “Allumer le feu”, “Marie”…
Jusqu’à “Un dimanche de janvier”, chanson hommage aux victimes des attentats de Paris qu’il a interprétée en janvier 2016 aux côtés de François Hollande, lors de l’hommage marquant le premier anniversaire de ce drame.
– Excès et amours –
Au fil d’une vie menée à fond de train, avec ses accidents, ses excès relayés en une des gazettes, ses amours tempétueuses et médiatiques (Sylvie Vartan avec qui il aura un fils, David Hallyday, Nathalie Baye, avec qui il aura une fille, Laura Smet), ses maisons en Suisse et aux Etats-Unis sur fond d’accusation d’exil fiscal, “Johnny” était devenu plus qu’un artiste.
Une légende vivante, un chanteur quasi-officiel mais aussi un personnage parfois agaçant pour certains, égratigné pour sa façon de s’exprimer, à l’image du “Ah que…” popularisé par sa marionnette des Guignols.
“Ma vie a été un tunnel de souffrances, où je ne me sentais pas toujours en accord avec moi-même, vivant au jour le jour, tenaillé par la peur du lendemain”, se confiait en 2014 à Télérama celui qui était au civil Jean-Philippe Smet, du nom de son père, Belge, qu’il a si peu connu.
Ces dernières années, c’est sa santé qui était devenue un sujet sensible. Avec ce coma qui a fait craindre le pire en 2009 aux Etats-Unis et ce cancer qui l’a poussé à son dernier combat.
Des “souffrances” qu’il oubliait toutefois quand il retournait en studio ou remontait sur scène, pour, jusqu’au bout, “être Johnny Hallyday”, ce qu’il appelait “un métier”.
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