Le Professeur Kamel Bouzid n’est plus. Le célèbre oncologue algérien s’est éteint ce dimanche 27 octobre à Alger des suites d’une longue maladie. Le destin a voulu que celui qui a consacré sa vie à la lutte contre le cancer parte quelques jours après une importante réunion présidée par le président de la République et consacrée à cette terrible maladie.
Abdelmadjid Tebboune s’est réuni mardi 22 octobre avec les membres du Comité national de prévention et de lutte contre le cancer.
Diminué par la maladie, le Pr Kamel Bouzid, fervent défenseur de l’hôpital algérien, n’y a pas pris part mais c’est une partie de son combat qui aboutit avec cette prise en main du fléau par les plus hautes autorités du pays.
Il y a près de dix ans, ce pionnier de l’oncologie médicale en Algérie, a salué la mise en place du plan anti-cancer 2015-2019. “Ce plan a le mérite d’exister et de générer une prise de conscience aussi bien au niveau des personnels soignants que des patients”, s’est-il réjoui.
Avec sa disparition, l’Algérie perd l’un de ses plus grands médecins. Le Pr Bouzid n’était pas seulement une éminence dans sa spécialité, l’oncologie, il était surtout un médecin engagé, presque un militant.
Sa disponibilité à donner suite aux sollicitations des médias nationaux en dit long sur sa détermination à faire bouger les choses dans la lutte contre le cancer et la prise en charge des malades.
Parallèlement à ses fonctions de chef du service oncologie du plus important centre anti-cancer en Algérie, le Centre Pierre et Marie Curie (CPMC) de l’hôpital Mustapha-Bacha d’Alger, qu’il a rejoint en 1996, le Pr Kamel Bouzid était aussi le président d’une société savante, la Société algérienne d’oncologie.
Quand il n’est pas au CPMC, il faisait le tour des salles de conférence et des rédactions pour dire sans langue de bois ce qui ne va pas et ce qui doit être fait face au fléau qui emporte des milliers d’Algériens chaque année, qui est le cancer.
Pr Kamel Bouzid, l’homme de tous les combats contre le cancer en Algérie
Le franc-parler est un trait de caractère chez cet homme qui était toujours là à chaque fois que la terrible maladie fait parler. Sur les plateaux télé, les ondes des radios ou les colonnes des journaux, le Pr Bouzid abordait tous les aspects liés au cancer, la prévention, le transfert à l’étranger, la pénurie ou la disponibilité des médicaments ou même les protocoles de soins.
Le professeur était le mieux placé pour constater l’inquiétante montée des cas de cancer en Algérie. Chaque année, plus de 60 000 nouveaux cas de cette terrible maladie sont diagnostiqués. En 2022, il y a eu près de 65 000 nouveaux cas tous cancers confondus et plus de 35 000 décès dus à cette maladie.
Dans la philosophie de Kamel Bouzid, le cancer n’est pas une fatalité et c’est pourquoi il insistait sur la prévention et le dépistage précoce. Dans 95% des cas, le cancer peut être guéri s’il est détecté à temps, disait-il.
L’amélioration de la prise en charge et des protocoles sanitaires et l’autre combat qu’a mené inlassablement le professeur, n’hésitant pas à mettre la pression sur les services concernés pour l’importation de médicaments innovants, le déblocage de plus de moyens pour la cause de la lutte contre la maladie, l’ouverture de centres anti-cancer aux quatre coins du pays où même le transfert à l’étranger des cas qui ne peuvent pas être pris en charge en Algérie.
“C’est d’autant plus inacceptable que ces médicaments sont des génériques qui servent à soigner des malades, des enfants atteints de leucémies aiguës, de lymphomes, de tumeurs osseuses et surtout qui permettent de les guérir dans deux tiers des cas”, a-t-il tonné en 2021 au forum d’El Moudjahid suite à une pénurie nationale de certains anticancéreux.
Cela fait déjà plusieurs mois que l’homme reconnaissable à sa moustache et ses lunettes ne prend plus le métro d’Alger à partir de la station de Hai El Badr pour se rendre à son deuxième chez-soi, le CPMC.
Infatigable, il n’a pris sa retraite que très tardivement. En juillet dernier, un vibrant hommage lui a été rendu à l’hôtel Aurassi en présence de générations d’oncologues qu’il a formés, ainsi qu’au professeur Hamladji Rose-Marie, une autre pionnière de l’oncologie en Algérie. Le pays gardera de Kamel Bouzid l’image d’un médecin émérite et dévoué.