Des milliers de réfugiés de la minorité musulmane rohingya sont passés au Bangladesh depuis une dizaine de jours pour fuir les opérations militaires dans l’ouest de la Birmanie, ont rapporté mercredi des responsables communautaires.
L’armée birmane mène depuis octobre dernier une offensive, qualifiée de “politique de la terreur” par l’ONU, dans l’Etat Rakhine (ouest de la Birmanie) contre cette communauté paria. Le 12 août, elle a annoncé l’envoi de centaines de troupes dans cette région pour intensifier ses opérations.
Depuis cette date, au moins 3.500 Rohingyas sont entrés clandestinement au Bangladesh en franchissant la rivière Naf qui sépare les deux pays, et ce malgré le renforcement des patrouilles de gardes-côtes bangladais.
“Pour le seul camp de Balukhali, quelque 3.000 Rohingyas sont arrivés de leurs villages au Rakhine”, a déclaré Abdul Khaleq, en référence au camp de réfugiés le plus proche de la rivière côté bangladais.
Kamal Hossain, un leader rohingya basé dans un autre camp, a lui fait état de l’arrivée de 700 familles rohingyas au cours des onze derniers jours.
Nombre de nouveaux arrivants doivent dormir dehors en raison de la surpopulation des camps de réfugiés déjà débordés.
Dacca estime que 400.000 réfugiés rohingyas se trouvent sur son territoire, legs des vagues de violences successives. A la fin de l’année dernière, 70.000 d’entre eux ont passé la frontière au péril de leur vie, apportant avec eux des récits d’exactions de l’armée birmane: viols collectifs, meurtres, tortures.
L’ONU estime que des centaines de personnes auraient été tuées en quelques mois au Rakhine lors de ce qui pourrait être l’épisode le plus sanglant de la longue persécution des musulmans rohingyas de Birmanie.
Considérés comme des étrangers au sein de ce pays à plus de 90% bouddhiste, les Rohingyas sont apatrides même si certains vivent dans le pays depuis des générations.
Ils n’ont pas accès au marché du travail, aux écoles, aux hôpitaux et la montée du nationalisme bouddhiste ces dernières années a attisé l’hostilité à leur encontre.
Les arrivées de Rohingyas ne sont guère vues d’un bon œil par le Bangladesh, nation à majorité musulmane. La police les accuse de se livrer à des délits comme le trafic de drogues.
Le gouvernement réfléchit à déplacer ces populations sur une île déserte du golfe du Bengale présentant des risques d’inondations. Un projet dénoncé à grands cris par les défenseurs des droits de l’homme.
Le week-end dernier, les gardes-côtes bangladais ont renvoyé vers la Birmanie un bateau transportant 31 réfugiés rohingyas, dont des femmes et des enfants. Les Nations unies ont exprimé leur “vive inquiétude” quant à ce geste.