Le président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Mohcine Belabbes, a dénoncé ce samedi la stratégie de dialogue du pouvoir, critiquant les partis d’opposition ayant rencontré le président Abdelmadjid Tebboune.
« Aujourd’hui, vouloir reconstruire l’État et la société avec les débris de l’ancien système ne peut avoir l’adhésion citoyenne et ne peut être synonyme d’une nouvelle Algérie. La crise de l’autorité et de légitimité et la paralysie des institutions rendent le dialogue politique inclusif indispensable pour construire un consensus démocratique et insuffler de la confiance, de l’optimisme et un renouveau politique dans la vie institutionnelle », a affirmé M. Belabbes dans une allocution prononcée ce samedi 20 mars en ouverture du conseil national du RCD.
Pour le président du RCD, ce dialogue « ne peut être réduit à des réceptions protocolaires, sans ordre du jour concerté, au cours desquelles le pouvoir présente à ces interlocuteurs des résolutions et des décisions inopérantes prises de façon unilatérale ».
« Des rencontres où le pouvoir fait semblant d’écouter et de dialoguer et les convives reçus font semblant d’arracher des concessions au point de se transformer en mégaphone du chef de l’État pour annoncer ‘’les bonnes nouvelles’’ », a-t-il fustigé, allusion aux chefs de partis politiques qui annoncent des décisions des autorités, après leurs rencontres avec Tebboune.
« La rupture avec cette politique de mise en scène médiatique de la vie politique doit cesser. Elle est indispensable à la réussite de toute démarche de sortie de crise », a tranché Mohcine Belabbes, estimant que « ce dialogue, si dialogue il y’ aura, doit être organisé et structuré de façon à permettre à tous les participants de contribuer à l’élaboration d’une feuille de route de sortie de crise qui doit être approuvée et respectée par tous ».
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« Une nouvelle tragi-comédie électorale le douze juin prochain »
« L’institution militaire doit se conformer à ses missions de protection de l’intégrité du territoire de la nation et rester en dehors de toute influence ou tractation politiques », a encore réclamé le président du RCD, qui a dressé un tableau noir de la situation politique, économique et sociale en Algérie.
Pour le président du RCD, le pouvoir est incapable d’ouvrir un « dialogue sérieux ».
Sa position sur les législatives du 12 juin ne fait aucun doute. « C’est sur ce fond fait de répression, de maintien en prison de détenus d’opinion, de restriction des libertés individuelles et collectives et de régression économique et sociale que le pouvoir en place, disqualifié à deux reprises par un boycott massif et historique des urnes, s’apprête à jouer une nouvelle tragi-comédie électorale le douze juin prochain ».
« Les prémisses de violences programmées et orchestrées par les officines habituelles sont déjà là »
Il explique que les « véritables décideurs », « incapables d’ouvrir un dialogue sérieux pour aller à une véritable transition démocratique et faute de ne pouvoir neutraliser le Hirak par la répression », « semblent parier l’avenir du pays sur l’option du pourrissement ». Il met en garde que « les prémisses de violences programmées et orchestrées par les officines habituelles sont déjà là ».
À l’adresse de ses adversaires et détracteurs, Belabbas a répondu que le « RCD est définitivement sorti de la bourse des trocs. Une bourse qui suppose l’instauration d’un contrôle policier sur les militants et les structures du parti et la constitution de cliques en lieu et place d’un contrôle politique qui sied à toute organisation politique qui inscrit son combat dans l’émancipation du plus grand nombre ». Le RCD affirme « sans ambages son AUTONOMIE DE DECISION socle de toute formation politique démocratique, décisions que seules ses instances élues par ses propres militants sont à même d’élaborer en toute transparence », appuie-t-il.
Dans son long discours, Mohcine Belabbas pointilleux a répondu aussi à ceux qui critiquent le fameux slogan brandi du Hirak : « État civil et non militaire ». « L’Algérie libre et démocratique et l’État civil et non militaire qui sont repris en chœur partout sur le territoire national renvoient à la mise en place d’un système politique où les missions des militaires sont définies par les politiques et renvoient à l’instauration d’un État de droit, libre et démocratique où la souveraineté est au peuple garantissant la paix et le vivre ensemble. Seules ces exigences permettront de rétablir la confiance dans les institutions et les dirigeants », explique-t-il.
Mohcine Belabbas remarque que sur le plan économique, « aucune mesure sérieuse n’est prise pour amorcer un début de relance ». « Les réformes de structures maintes fois annoncées sont reportées sine die. En réalité depuis 2018, des milliers d’entreprises ferment leurs portes et des dizaines de milliers de salariés sont licenciés », assène-t-il.
Il poursuit en décrivant une « situation de pauvreté et les inégalités croissantes imposées à notre peuple par un régime prédateur sont intolérables. »
Pour le président du RCD, le « dernier rapport de l’ONU sur l’état des libertés dans notre pays qui conjugue arrestations arbitraires et allégations de torture sur des activistes du mouvement révolutionnaire est une offense de plus à la mémoire des révolutionnaires et résistants algériens torturés ou condamnés à mort durant la longue nuit coloniale »
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