La mouture finale du projet de nouvelle loi de santé que la commission Santé de l’APN soumettra au débat dimanche prochain modifie les modalités de consentement pour le prélèvement d’organes sur les personnes décédées.
Un registre de refus pour faciliter la tâche des médecins
L’article 378 modifié par la commission introduit la notion de registre de refus de dons d’organes qui sera détenu par la nouvelle Agence nationale des greffes.
Tout citoyen algérien pourra s’inscrire sur ce registre pour exprimer son refus de donner ses organes après son décès. Les individus décédés non-inscrits sur le registre seront présumés donneurs consentants. Mais, même dans ce cas, le dernier mot reviendra à la famille du défunt qui sera consultée par l’équipe médicale.
« L’équipe médicale chargée du prélèvement est tenue de consulter le registre de refus en vue de chercher l’avis du décédé. En cas de non-inscription sur le registre, les membres majeurs de la famille du défunt sont consultés dans l’ordre suivant : père, mère conjoint, fils, frères et sœurs ou représentant légal si le défunt n’avait pas de famille, en vue de connaître sa position sur le don d’organes », stipule l’article 378 du projet de loi de Santé.
Une disposition attendue depuis longtemps par les médecins exerçant dans le domaine et saluée par le Dr Chater Fahed, médecin réanimateur au CHU Frantz Fanon de Blida.
« C’est le modèle français qu’on est en train d’importer mais en l’adaptant à la réalité sociale algérienne », explique-t-il, ajoutant qu’en France « si le défunt n’est pas inscrit sur le registre de refus, la famille n’est pas consultée et les organes sont prélevés ».
L’utilité de cette nouvelle mesure est non pas de prélever automatiquement des organes, mais de gagner du temps et d’aider les médecins à convaincre les familles.
« Entre le moment du décès et celui où on demande l’accord de la famille, des analyses et des examens immunologiques sont lancés, ils prennent beaucoup de temps et ils sont souvent réalisés en vain puisque, dans la plupart des cas, les familles refusent qu’on prélève les organes. Avec cette nouvelle loi, nous n’approcherons les familles des défunts que si leur proche n’était pas inscrit sur le registre, ce qui nous évitera de perdre du temps », remarque le Dr Chater.
Autorisation du don croisé
Dans l’actuelle législation, la greffe d’organes à partir de donneurs vivants n’était permise que dans le cadre familial. La loi dispose que le prélèvement d’un organe sur un donneur vivant ne peut être effectué que si le donneur était un membre de la famille du receveur (le père, la mère, le frère, la sœur, le fils, la fille, la grand-mère, le grand-père, l’oncle ou la tante paternels et maternels, cousin ou cousine paternels ou maternels, neveu ou nièce, conjoint, belle-mère ou beau-père).
Cette situation limitait les possibilités de prélèvement d’organes sur des personnes vivantes et compliquait la situation des malades, notamment lorsqu’aucun des membres de la famille du receveur autorisés à lui donner un organe n’était immunologiquement compatible.
Avec la mise en place du don croisé, il sera possible d’effectuer des « échanges d’organes » entre deux paires de donneurs et de receveurs issues de deux familles différentes, si la compatibilité immunologique le permet.
Le don croisé sera soumis à des règles strictes et sera conditionné par le consentement éclairé des donneurs et des receveurs. Un consentement qui devra être exprimé devant le tribunal territorialement compétent.
Prélèvement de cellules souches hématopoïétiques sur les mineurs
Jusqu’à présent, il était interdit de prélever des organes, tissus ou cellules, y compris des cellules souches hématopoïétiques sur des mineurs. Mais l’article 377 du projet de loi de santé prévoit de l’autoriser, à condition que le don soit destiné à un frère ou à une sœur.
Toutefois, cette autorisation pourra être élargie aux cousins et cousines paternels et maternels, dans le cas de « l’absence d’autres solutions thérapeutiques » et à condition d’avoir le consentement éclairé des parents ou du tuteur du donneur mineur.
La greffe de cellules souches hématopoïétiques est vitale pour les personnes atteintes de maladies causant la destruction ou l’altération du fonctionnement de la moelle osseuse à l’origine de la génération des cellules sanguines. C’est le cas notamment dans la leucémie ou cancer du sang et certaines maladies héréditaires.
Ces maladies touchent très fréquemment les enfants et n’ont d’autre traitement que la greffe de cellules souches.