Alors que Facebook a laissé filer les données personnelles de 87 millions d’utilisateurs, une étude américaine révèle que des milliers d’applications pour enfant, accessibles depuis Google Play Store, récoltent des données sensibles sans le consentement de leurs parents. La semaine dernière, YouTube, la plateforme vidéo de Google, a été visée par une plainte collective portée par 23 associations américaines pour collecte illégale de données sur des enfants de moins de 13 ans.
En plein scandale Cambridge Analytica, les pratiques des géants de l’Internet en matière de collecte de données personnelles sont passées à la loupe. Facebook est accusé de laxisme, pour avoir permis au cabinet d’analyse Cambridge Analytica de mettre la main de façon détournée sur les données personnelles de 87 millions d’utilisateurs. Depuis la semaine dernière, les regards se tournent vers Google.
En effet, YouTube, filiale de Google, a été visée lundi dernier par une plainte collective de 23 associations américaines de défense des droits numériques et de protection de l’enfance. Elles accusent YouTube, officiellement interdit aux moins de 13 ans, de récolter des informations sur les enfants (géolocalisation, appareil utilisé, numéros de portables…) pour réaliser un ciblage publicitaire – et ce, sans en informer les parents.
Deuxième coup de massue : une étude, publiée la semaine dernière également, passe au crible 5.855 applications pour enfants les plus populaires sur la version américaine de Google Play Store, le magasin d’applications du géant américain. Selon l’étude, chaque application a été téléchargée en moyenne 750.000 fois. Verdict : “environ 57% des applications étudiées sont susceptibles de violer la Children’s Online Privacy Protection Act (Coppa)”, la loi américaine sur la protection de la vie privée des enfants sur internet. Adoptée en 1998, elle interdit notamment la collecte d’informations d’enfants de moins de 13 ans sans le consentement des parents.
39% des appli ne respectent pas la vie privée des enfants
Les chercheurs ont utilisé une plate-forme de test leur permettant de voir en temps réel à quelle fréquence les applications accédaient à des informations sensibles – telles que les données de localisation et les listes de contacts – sur un téléphone et quelles autres entités partageaient ces informations. Ainsi, plus de 1.000 applications ont collecté des informations d’identifications des enfants en utilisant un logiciel de suivi dont les termes interdisent explicitement leur utilisation pour les applications destinées aux enfants, selon l’étude. Dans le détail :
- 4,8% des applications étudiées sont des “violations évidentes”. C’est le cas lorsqu’elles partagent l’emplacement ou les coordonnées sans consentement
- 40% des applications étudiées partagent des informations personnelles “sans appliquer de mesures de sécurité raisonnables”
- 18% des applications étudiées partagent des “informations permettant l’identification des utilisateurs à des fins interdites”, comme la publicité ciblée
- 39% des applications étudiées montrent “une ignorance ou le non-respect des obligations contractuelles visant à protéger la vie privée des enfants”
“Nous prenons très au sérieux le rapport de ces chercheurs et nous examinons leurs résultats”, écrit Google dans un communiqué de presse. “Si nous déterminons qu’une application viole nos politiques, nous prendrons des mesures.”
Facebook ne veut pas être la bête noire de la Sillicon Valley
Facebook a affirmé, lundi 16 avril, collecter des données personnelles sur ses utilisateurs – y compris lorsqu’ils ne sont pas connectés. Le plus grand réseau social au monde va plus loin : il amasse également des informations sur les internautes n’ayant pas de profil Facebook. Dans sa note de blog explicative, Facebook refuse d’être perçu comme la bête noire de la Silicon Valley. L’entreprise de Mark Zuckerberg a d’ailleurs pris soin de pointer du doigt les entreprises ayant des pratiques et des services similaires aux siens.
“Google dispose d’un service d’analyse populaire (ndlr : Google Analytics). Et Amazon, Google et Twitter offrent toutes de s’identifier à d’autres services grâce à leurs identifiants. Ces entreprises – et bien d’autres – offrent également des services de publicité. En fait, la plupart des sites Web et des applications envoient les mêmes informations à plusieurs entreprises chaque fois que vous les visitez”, explique David Baser, responsable produit chez Facebook.
Vers un démantèlement de Google ?
En effet, si Facebook collecte des données, Google n’est pas en reste. Contrairement au réseau social, la firme de Mountain View a réussi en 20 ans à construire un écosystème permettant de couvrir tous les usages – ou presque – sur Internet. Google est né comme un simple moteur de recherche. Le géant américain est désormais décliné en service vidéo (YouTube), messagerie (Gmail), cartographie (Google Maps), système d’exploitation (Android)…
En plus de couvrir de nombreux secteurs, Google est en situation de quasi-monopole dans certains domaines. Son moteur de recherche représente plus de 90% du marché mondial, son système d’exploitation Android équipe plus de 80% des smartphones dans le monde et YouTube revendique plus de 1,5 milliard d’utilisateurs connectés par mois. À tel point que la menace d’un démantèlement de Google a été remise au goût du jour récemment par la Commission européenne.