Dix-huit citoyens ont été incarcérés, ce dimanche 23 juin, pour avoir brandi lors des marches du 18e vendredi à Alger « un emblème autre que le drapeau national », en l’occurrence la bannière amazighe.
Trois personnes ont été en outre relâchées, faute de preuves sur la présence d’un drapeau en leur possession au moment de leur interpellation.
Vendredi dernier, la police a tenté de saisir les bannières amazighes des mains des manifestants, arrêtant plusieurs d’entre eux. Cela faisait suite au discours prononcé mercredi par le chef d’état-major de l’ANP dans lequel il avait mis en garde contre « les tentatives d’infiltration des marches populaires, au cours desquelles des drapeaux autres que l’emblème national sont brandis par d’infimes minorités », indiquant que « des ordres et instructions fermes ont été donnés aux forces de sécurité afin de faire respecter strictement les lois en vigueur et de faire face aux individus qui essayent d’attenter à nouveau aux sentiments des Algériens ».
Au cours des marches à Alger et à travers tout le pays, les bannières amazighes étaient plus présentes que d’habitude, ont toutefois relevé les observateurs.
Ce dimanche matin, quatorze manifestants ont été présentés devant le tribunal de Sidi M’hamed pour « outrage à corps constitué lorsque les forces de l’ordre ont tenté de « saisir les emblèmes brandis, autres que l’emblème national », avait indiqué un communiqué du parquet repris par l’ENTV.
Devant le siège du tribunal de Sidi M’hamed à Alger, des dizaines de citoyens se sont rassemblés pour apporter leur soutien aux personnes interpellées, scandant des slogans hostiles au pouvoir et favorables aux revendications du mouvement populaire.
Noureddine Benissad, avocat et défenseur des droits de l’Homme, était présent sur les lieux. « Les manifestants arrêtés vendredi sont accusés de port d’un emblème autre que l’emblème national et d’atteinte à l’unité nationale », déclare-t-il.
En début d’après-midi, la télévision officielle annonce la mise sous mandat de dépôt de cinq manifestants par le juge d’instruction du tribunal de Bab el Oued, pour les mêmes motifs. De son côté, une avocate membre de RAJ, Aouicha Bekhti, déclarait que tous les manifestants arrêtés à Alger ont été incarcérés à la prison d’el Harrach. Elle indique elle aussi que les mis en cause « sont poursuivis pour atteinte à l’unité nationale ».
Ce chef d’inculpation sera confirmé quelques heures plus tard par la télévision officielle. Cette dernière détaille, vers 16 heures, que treize et cinq personnes ont été placées sous mandat dépôt respectivement par les juges d’instruction des tribunaux de Sidi M’hamed et de Bab el Oued pour « atteinte à l’unité nationale en brandissant un emblème autre que l’emblème national conformément aux dispositions de l’article 79 du code pénal ».
Réagissant à ces décisions, Noureddine Benissad, indique que « le collectif des avocats fera appel dès demain matin des ordonnances des juges d’instruction plaçant ces personnes en détention provisoire ».
« Nous plaiderons leurs causes car il n’y a aucune disposition pénale qui sanctionne le port d’un emblème autre que l’emblème national. Les poursuites engagées sur ces faits n’ont aucune base légale. Pas de peine sans texte légal », a dénoncé l’avocat et défenseur des droits de l’Homme.