Société

Droit d’asile : qu’en est-il pour l’Algérie ?

L’Algérie ne dispose pas d’un cadre législatif qui encadre le droit d’asile et des réfugiés, malgré sa ratification de la convention de Genève de 1951 qui l’y oblige, selon l’avocat Noureddine Benissad.

« L’Algérie a ratifié la convention de Genève de 1951 sur le droit d’asile et des réfugiés dès 1963 et quand on dit ratifier, du point de vue du droit international, ça veut dire que l’Algérie a pris des engagements internationaux qu’elle doit respecter », explique Me Benissad.

L’Algérie a « l’obligation » de légiférer sur le statut des réfugiés et demandeurs d’asile selon l’avocat pour qui un traité international ratifié par l’Algérie est « au-dessus des lois internes, ce qui veut dire que même s’il y a une loi interne qui contredit les principes de la convention, c’est cette dernière qui prévaut ». Une règle qui est contenue dans la Constitution algérienne, d’après l’avocat.

« Malheureusement, depuis 1963, l’Algérie n’a pas de cadre législatif interne, ça veut dire qu’on n’a pas de loi interne qui soit conforme à la convention internationale qu’on a ratifiée et pour organiser toute cette question des réfugiés et des demandeurs d’asile », développe Me Benissad.

« Les amendements apportés à la Constitution en 2016 ont introduit un article qui prévoit que l’Algérie mette en place un cadre juridique pour les demandeurs d’asile », complète-t-il.

Les demandeurs d’asile dans le flou

Cette loi qui encadre le droit d’asile n’a pas encore été promulguée selon l’avocat qui voit comme conséquence de ce flou juridique un « manque de visibilité sur les procédures à entamer par les demandeurs d’asile ».

« Chez nous, il y a ce qu’on appelle le HCR, le Haut-commissariat aux réfugiés qui est un organe de l’ONU. Le HCR a un petit bureau à Alger que les demandeurs d’asile et les réfugiés sollicitent. Le bureau étudie leurs demandes d’asile et délivre une carte de réfugié, mais cette carte n’a aucune valeur juridique », explique l’avocat.

Le document délivré par le HCR n’étant pas reconnu officiellement par les autorités algériennes, les demandeurs d’asile contrôlés par les forces de sécurité subissent des sorts différents selon l’interlocuteur auquel ils ont affaire.

« Il y a des services de sécurité qui ferment les yeux, il y a d’autres qui disent que le papier n’a aucune valeur juridique et le réfugié devient dans ce cas expulsable », déplore Me Benissad.

Pour l’avocat habitué aux questions des droits de l’Homme, « le grand problème est qu’il n’y a pas de cadre juridique pour que la personne qui demande un asile politique en Algérie sache exactement quoi faire pour obtenir l’asile politique » et même lorsque l’Algérie accorde l’asile à un demandeur, « on ne sait pas sur quels critères elle le fait, il n’y a pas de transparence ».

Les expulsions collectives interdites par le droit international

L’Algérie a été la cible de plusieurs ONG et médias occidentaux qui l’ont accusée de procéder à des expulsions collectives de migrants subsahariens en les « abandonnant dans le désert ».

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Sans affirmer ou infirmer la réalité de ces expulsions collectives, l’avocat Benissad affirme qu’ « à propos des expulsions collectives, on ne sait pas comment ça se passe mais en tout état de cause, du point de vue du droit international, les expulsions collectives sont interdites ».

Pour l’avocat, « il y a un gros problème, c’est que parmi ces migrants expulsés, certains travaillent depuis longtemps en Algérie, ont demandé à être régularisés et ne l’ont pas été ».

Les droits des migrants et des travailleurs étrangers en situation irrégulière ne sont pas respectés, pointe l’avocat. « Il n’y a aucun mécanisme de protection, en l’occurrence quand le migrant est expulsable, il n’a aucun moyen de faire un recours. On ne sait pas où ils les mettent et leurs droits, notamment ceux à recevoir les visites d’avocats et d’associations ne sont pas respectés ».

En ne mettant pas en place le cadre législatif qui encadre de façon plus transparente le droit d’asile et les droits des travailleurs étrangers, l’Algérie enfreint les traités internationaux qu’elle a ratifiés, « notamment la convention de l’Organisation internationale du travail », remarque Me Benissad.

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