En pleine crise entre l’Algérie et les Émirats arabes unis, il s’en est fallu de peu pour qu’un important partenaire de Sonatrach tombe sous le contrôle d’un fonds d’investissement de ce pays du Golfe.
Il s’agit évidemment de l’Espagnol Naturgy que le fonds d’Abou Dhabi Taqa a tenté de racheter en avril dernier.
Les négociations n’ont pas abouti et le projet a été abandonné, a annoncé lundi 10 juin le fonds d’investissement Criteria qui détient 26,7 % du capital du géant gazier espagnol.
Taqa avait approché Criteria en avril dernier pour le rachat de ses parts, ainsi que les deux autres principaux actionnaires, les fonds d’investissement privés CVC et GIP, qui détiennent 20 % chacun.
Cette procédure devait obligatoirement déboucher sur une offre publique d’achat (OPA) sur l’intégralité du capital de la société, en vertu de la loi espagnole. Or, parmi les autres actionnaires de Naturgy, figure l’Algérien Sonatrach qui détient 4 % des parts de l’opérateur énergétique espagnol.
Le projet du rachat de Naturgy par Taqa avait provoqué des remous à Alger en raison des tensions avec les Émiratis sur plusieurs dossiers. Il est reproché à Abu Dhabi de mener des actions hostiles à l’Algérie dans la région du Sahel et au Libye.
Maintenant que le projet est tombé à l’eau, Sonatrach pourrait réagir en augmentant ses parts dans le capital de Naturgy afin d’avoir plus de poids en prévision d’une autre tentative de rachat de l’opérateur espagnol qui menacerait ses intérêts. Le dossier serait à l’étude, selon nos sources.
Naturgy, un dossier stratégique pour Sonatrach
D’autant plus que, dans son communiqué de lundi dernier annonçant la fin des négociations avec les Émiratis, Criteria n’a pas fermé la porte à d’éventuels autres “investisseurs”.
Le fonds espagnol a fait savoir qu’il maintenait “normalement des conversations pour explorer les partenaires possibles qui pourraient soutenir le plan de transformation de Naturgy”. Cela, tout en réitérant son engagement en tant qu’investisseur dans le projet industriel de Naturgy sur le long terme.
Sonatrach a plus d’une raison de garder un œil sur ce qui se passe autour de l’entreprise espagnole. D’abord il s’agit de l’un de ses clients les plus importants dans le domaine du gaz.
Des contrats importants de livraison de gaz sur le long terme lient les deux compagnies. Malgré la crise politique entre Alger et Madrid qui a provoqué entre autres le gel des échanges commerciaux entre les deux pays, l’Algérie est restée l’un des principaux fournisseurs de gaz à l’Espagne.
Les deux pays sont reliés par deux gazoducs sous la Méditerranée, dont un, le GME (gazoduc Maghreb-Europe), qui passe par le Maroc, a été fermé par Alger en novembre 2021 à cause de la crise politique avec ce pays voisin.
Le Medgaz, lui, est toujours fonctionnel. Il est détenu à parts presque égales par Sonatrach et Naturgy qui contrôlent 51 et 49 % respectivement du capital de la société qui le gère. Le dossier est donc pour Sonatrach d’abord stratégique, avant d’être commercial.