« Je déteste la religion musulmane ». Ces propos n’émanent pas d’une personnalité d’extrême-droite. Ils ont été tenus cette semaine par Yves Thréard, directeur adjoint de la rédaction du journal français Le Figaro lors d’une émission sur la chaîne française LCI.
Ils sont tenus dans un contexte de déferlement sans précédent de haine contre la communauté musulmane. Le prétexte est toujours le même – le voile à l’école et dans l’espace public- mais le discours haineux est monté d’un cran.
Vendredi, en pleine assemblée plénière du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté (est du pays), Julien Odoul, président du groupe Rassemblement National, avait sommé la présidente socialiste, Marie-Guite Dufay, de demander à une des accompagnatrices scolaires présente dans l’hémicycle de retirer son voile. La mère de famille accompagnait la classe d’école primaire de son fils.
Lundi, les pompiers de la caserne de Creil, en région parisienne, ont refusé une visite scolaire au motif qu’une accompagnatrice, parent d’élève, portait un voile islamique. L’accompagnatrice, âgée de 36 ans et mère de deux enfants, s’est dite « choquée ». « Je ne m’y attendais pas, j’étais abasourdie », a-t-elle confié, expliquant avoir « pris sur (s) on temps libre » pour accompagner la sortie, « à la demande de l’école, qui manquait d’accompagnateurs », rapporte le journal 20 Minutes.
« Le venin de la haine »
Plus tôt en ce mois d’octobre, le polémiste Eric Zemmour a fait l’objet de l’ouverture d’une enquête pour « injures publiques » et « provocation publique à la discrimination, la haine ou la violence » après des propos sur l’islam. « Tous nos problèmes aggravés par l’immigration sont aggravés par l’islam », avait affirmé Zemmour qui sillonne les plateaux de télévision pour déverser sa haine de l’islam et des musulmans.
« Les jeunes Français vont-ils accepter de vivre en minorité sur la terre de leurs ancêtres ? Si oui, ils méritent leur colonisation, sinon ils devront se battre pour leur libération », a estimé Zemmour dans son discours, comparant les djellabas aux « uniformes des armées d’occupation » et assimilant l’islam au nazisme.
« Macron a (r)ouvert les vannes de l’islamophobie », résumait, mardi 15 octobre, Medipart. « Après Nicolas Sarkozy et Manuel Valls, Emmanuel Macron, à son tour, laisse la porte ouverte au déferlement de haine contre les musulmans », écrit le site d’investigations.
Macron interpellé
« Des médias aux responsables politiques en passant par les gratte-papier d’une administration publique, le venin de la haine s’est diffusé, ces dernières semaines, à une vitesse impressionnante, meurtrissant les principaux concernés, les Français de confession musulmane, et, à travers eux, toutes celles et tous ceux qui ne les considèrent ni comme des ennemis ou des menaces, mais comme des compatriotes comme les autres. Il n’est plus l’apanage de quelques agitateurs trop contents de profiter de l’intérêt suscité par leurs provocations, il s’est banalisé », ajoute Mediapart.
Dans ce contexte, un collectif de personnalités françaises a publié une lettre ouverte ce mardi appelant le président français Emmanuel Macron à prendre ses responsabilités.
« L’image a fait le tour des réseaux sociaux : celle d’une femme réconfortant dans ses bras son propre fils, en pleine assemblée plénière du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, à Dijon, après son agression verbale par un élu d’extrême droite. Si l’image nous révolte tant, c’est parce que nous en sommes tous collectivement responsables », affirme le collectif de 90 personnalités, parmi lesquelles l’acteur Omar Sy ou encore le musicien Jean-Michel Jarre.
« Cette scène, ces mots, ce comportement sont d’une violence et d’une haine inouïes. Mais par notre lâcheté, par nos renoncements, nous avons contribué, petit à petit, à les laisser passer, à les accepter », estime le collectif.