Redouane Bougheraba pose bientôt ses valises en Algérie. Les fans de l’humoriste franco-algérien l’attendent impatiemment. Son humour corrosif, trash et grinçant attire des milliers de followers sur Internet et les foules dans les salles où il se produit un peu partout dans le monde.
De parents algériens, Redouane Bougheraba est né et a grandi à Marseille. Après des études de sciences économiques, et divers petits boulots, il s’installe à Londres en 2012 pour perfectionner son anglais. En 2015, il se fait connaître grâce à son premier spectacle : « Redouane s’éparpille », suivi de « On m’appelle Marseille ».
Redouane vit actuellement à Londres. Le stand-up lui a ouvert une autre porte : celle du cinéma. Il a joué dans des films tels que « Patients », « C’est tout pour moi », « Taxi 5 » ou encore « La vie scolaire ».
Le public d’Oran pourra le voir sur scène au Méridien le 25 août, avant de se produire à l’Opéra d’Alger les 26 et 27 août prochains. Nous l’avons interviewé pour vous.
TSA : à quand remonte votre dernier spectacle en Algérie ?
Redouane Bougheraba : en 2019, je m’étais produit dans la salle Casino, de la rue Larbi Ben M’hidi, à Alger. Je suis tellement heureux et impatient d’aller à la rencontre de mon public à Oran, et à Alger, au Méridien et à l’Opéra d’Alger, deux salles mythiques.
TSA : quelles sont vos origines ?
Redouane Bougheraba : mon père est originaire de Bejaia. Ma mère est née à Tablat. Quand j’étais petit, je venais en vacances à Blida. Je passais beaucoup de temps chez mon oncle qui habitait à la rue Didouche Mourad, à Alger.
D’ailleurs, je parle bien le « dardja ». Je venais souvent en Algérie avec ma famille. Les événements qui ont marqué la décennie noire ont mis fin à nos villégiatures jusqu’aux années 2000. Je n’ai jamais coupé le lien avec l’Algérie. Mes sœurs ainées habitent toujours à Bejaia.
TSA : comment est née cette envie de faire rire les autres ?
Redouane Bougheraba : j’ai toujours été un incorrigible bout en train. A l’école déjà, j’amusais mes camarades en enchaînant blagues et pitreries. Cela a continué au collège. Je dessinais des caricatures de mes professeurs. Cela faisait beaucoup rire mes copains de classe.
TSA : quels sont les humoristes qui vous ont inspiré et vous ont donné envie de faire ce métier ?
Redouane Bougheraba : Fellag et Gad Elmaleh. Je suis un humoriste autodidacte. Je n’ai jamais suivi un cursus théâtral contrairement à mon frère, Ali, qui a eu un Molière pour une pièce théâtrale intitulée « Evo livi », le vrai nom d’Yves Montand.
Je suis fier de lui. Il m’a donné l’opportunité de m’exercer à ce métier en assurant les premières parties de ses spectacles. J’ai appris sur le tas. Cela m’a donné envie de faire du stand-up. En 2015, j’ai fait mes classes à Paris, au Paname, un petit comedy club. J’y jouais tous les soirs. Cela m’a donné un coup de pouce.
TSA : comment qualifieriez- vous votre humour ?
Redouane Bougheraba : de piquant, corrosif et transgressif. Autrement dit, c’est un whisky-coca, mais en Algérie, il n’y aura que le coca (rires).
TSA : comment expliquez-vous votre succès ?
Redouane Bougheraba : j’ai 10 ans de stand-up derrière moi. C’est beaucoup de travail. Les gens ne s’en rendent pas compte. Ils disent : « Ah il est bien le petit jeune ! » Mais rien ne vient par hasard.
Les réseaux sociaux ont beaucoup aidé à ma médiatisation. Signe des temps : avant, pour se faire connaître, il fallait faire pas mal de passages à la télévision, à la radio… La donne a changé aujourd’hui. Vous postez une vidéo sur Internet et tout de suite, vous atteignez votre cible.
La triche n’a plus droit de cité. Si vous êtes bon, les gens le voient. J’enregistre trois vidéos par semaine que je publie sur YouTube. J’ai plus de 700 000 abonnés dont de nombreux Algériens qui me suivent. La diaspora algérienne est là à chaque fois que je me produis dans un pays. Ce fut le cas dernièrement au Canada. J’étais très fier !
TSA : est-ce que vous adaptez vos vannes à votre public, d’un spectacle à un autre ?
Redouane Bougheraba : évidemment. Par exemple, pour mes spectacles en Algérie, les textes seront modérés. Je prends toujours en compte la culture et la sensibilité de chacun, et je fais mienne la tirade de Desproges qui disait : « On peut rire de tout mais pas avec n’importe qui ».
TSA : est-ce que vous ne sentez pas que certaines de vos blagues mettent mal à l’aise les spectateurs à cause de leur côté cru ?
Redouane Bougheraba : non, car les gens qui viennent à mes spectacles savent à quoi s’attendre. Les personnes qui sont sensibles, fragiles ou qui n’apprécient pas ce genre d’humour restent à la maison (rires).
TSA : à votre avis, y a-t-il un humour « algérien » ?
Redouane Bougheraba : oui. C’est un humour direct, imagé et cru. Je trouve que les Algériens ont un humour propre à eux. Il y a toute une nouvelle génération d’humoristes qui sont hyper drôles, dont beaucoup ont été révélés grâce aux réseaux sociaux.
TSA : vous dialoguez beaucoup avec votre public. C’est de l’improvisation ?
Redouane Bougheraba: j’ai les grandes lignes avant d’entrer sur scène, bien-sûr, mais j’improvise pas mal, pour créer une interaction avec mon public.
TSA : une anecdote lors d’un spectacle à nous raconter ?
Redouane Bougheraba : lors d’une représentation au Théâtre de 10 heures à Paris, j’entends des bruits de bouteille qui claquent derrière la scène. En fait, c’était le voisin qui mettait ses bouteilles dans la poubelle de tri. J’ouvre la porte et je vois un monsieur en short. Je l’ai tiré par le bras et l’ai fait monter sur scène.
TSA : quel est votre regard sur l’Algérie ?
Redouane Bougheraba: je vis à Londres avec ma femme et mes deux filles mais j’ai beaucoup d’attaches en Algérie. Ma famille et mes amis y vivent. L’Algérie, c’est mon ADN.
Grâce à Internet, j’ai une fenêtre sur mon pays d’origine. Je suis tout ce qui s’y passe. Je serai au Méridien d’Oran le 25 août. A l’Opéra d’Alger les 26 et 27 août. Je n’y vais pas seul mais avec des amis, Ahmed Sparrow et Djimo. On va tout faire pour divertir le public algérien. J’espère que ce sera une première et qu’il y aura un festival du rire un jour.
TSA : vous avez tourné dans plusieurs films. Est-ce que cette nouvelle casquette vous plaît ?
Redouane Bougheraba : énormément ! D’ailleurs, il y a un nouveau film qui va sortir en septembre, intitulé « Classico » avec Ahmed Sylla, Hakim Jemili, Alice Belaïdi, et Elie Semoun. C’est une comédie autour de la rivalité entre les supporters parisiens et marseillais. J’ai d’autres projets de tournage mais je préfère garder le silence pour le moment.
TSA : un dernier mot à nous dire ?
Redouane Bougheraba : j’ai hâte d’arriver à Alger. Me balader, manger des « mhadjeb », boire du « Hamoud » et siroter du thé dans la basse Casbah avec un kilo de sucre (rires). Très impatient de retrouver les odeurs et les parfums d’Alger.