En pleine tourmente, le FLN a sonné l’heure de l’union sacrée. Mercredi 6 mars, l’instance dirigeante mise en place en novembre dernier pour gérer les affaires courantes suite à la « démission » de Djamel Ould Abbas, s’est réunie et décidé d’élargir sa propre composante de 7 à 22 membres.
Depuis le début des manifestations contre le cinquième mandat, le vieux parti, qui se définit comme celui du président et qui s’est imposé comme le principal soutien de ce dernier, s’est logiquement retrouvé en ligne de mire des contestataires.
« FLN dégage » est l’un des slogans les plus scandés par la foule, étant donné que la révolte n’est pas seulement contre le président Bouteflika mais vise tout le système. La vieille revendication de mettre le FLN, patrimoine commun à tous les Algériens, au musée, refait surface.
L’opportunisme aidant, les premières fissures n’ont pas tardé à lézarder les murs de la bâtisse. Sid-Ahmed Ferroukhi, ancien ministre et tête de liste du parti à Alger aux dernières législatives, démissionne du parti et remet son mandat de député. Quelques jours plus tard, il est suivi du mouhafedh de Sétif. Il y a bien le feu en la demeure.
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Au sein du parti, les doigts accusateurs sont vite pointés sur le jeune coordinateur provisoire Mouad Bouchareb, sorti de nulle part l’automne dernier pour se voir confier d’un coup et le perchoir de l’APN et les clés du parti majoritaire. A 47 ans, Bouchareb fut préféré aux caciques du parti pour donner une image d’un FLN qui se rénove, se rajeunit et développe un discours en adéquation avec les aspirations de la nouvelle génération. Grossière erreur. Finalement, le député de Sétif se fera plus zélé que Ould Abbas, avec de nombreuses maladresses à la clé.
Le 23 février, soit au lendemain des premières grandes manifestations populaires, il se distingue par des propos provocateurs qui trahissent son inexpérience. Les vieux démons du « redressement » se réveillent subitement et la tête du coordinateur provisoire est réclamée.
A l’issue du conclave de ce mercredi 6 mars, Bouchareb a gardé sa place, mais a vu son staff élargi. 22 membres constituent désormais l’instance provisoire dont la mission principale est la préparation du congrès extraordinaire. Mais encore une fois, le vieux parti a prouvé son incapacité à se régénérer et donné amplement raison à la rue qui réclame sa mise au musée.
Mettant les déboires du parti sur le compte de la jeunesse et l’inexpérience de son chef provisoire, le parti a rappelé sa vieille garde, celle-là même qui symbolise les errements et les échecs du système dont le peuple n’en veut plus. En tête de liste de la nouvelle équipe dirigeante, figurent des noms que l’opinion nationale ne connaît que trop bien : Tayeb Louh, Hachemi Djiar, Habba El Ogbi, Abdelkrim Abada, Abderrahmane Belayat, Abdelhamid Si Affif, Salah Goudjil…
Un véritable pied de nez à la jeunesse qui est sortie par millions dans les rues exiger du renouveau. Le jour même du conclave, Saïd Sadi expliquait doctement sur TSA pourquoi un passage de témoin est nécessaire, estimant « anormal d’un point de vue simplement démocratique que la représentation politique ne soit pas fidèle à la sociologie de la Nation composée à 70% de jeunes ».
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Ce coup de vieux donné à une institution clé du régime n’est pas le premier du genre depuis le début de la contestation populaire. Au lendemain des marches des étudiants à travers tout le pays le 27 février, la pouvoir a répondu à sa manière en nommant comme vice-présidents du Sénat deux octogénaires. Djamel Ould Abbes, 84 ans, et Salah Goudjil, 88 ans, sont désignés pour seconder Abdelkader Bansalah, 78 ans.
Ould Abbes avait « démissionné » de son poste de secrétaire général du FLN en novembre dernier officiellement pour des raisons médicales tandis que Goudjil avait étalé toute son impotence le 30 janvier lorsqu’il a présidé la séance d’installation du président du Sénat.
Décidément, le système ne rate aucune occasion pour avouer son incapacité à se régénérer. Comme sa composante, il semble avoir ses limites biologiques. Cette surréaliste histoire de cinquième mandat en était déjà une preuve suffisante.
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