Alors que l’Algérie vit une période de transition complexe, le Forum des chefs d’entreprises (FCE) s’est précipité pour annoncer un soutien inconditionnel à l’armée.
« Les chefs d’entreprise saluent la position de l’institution militaire et lui expriment leur soutien pour garantir la stabilité et la réussite de la transition, en vue de sauvegarder la sécurité du pays et des citoyens dans cette étape historique que vit l’Algérie », écrivait l’organisation dans un communiqué publié mardi 23 février au moment où le général Gaid Salah réaffirmait le maintien de la solution constitutionnelle contre l’avis du peuple et de la classe politique.
La réaction du FCE pose plusieurs problèmes. D’abord, la direction actuelle du Forum est intérimaire. De ce fait, elle devrait se contenter de gérer les affaires courantes et surtout préparer l’élection du successeur d’Ali Haddad. En attendant, elle pourrait s’exprimer sur la situation économique, défendre les entreprises, mais sans parti-pris politique.
Ensuite, les patrons membres du FCE ont-ils autorisés la direction à prendre une telle position dans le débat politique ? Nous n’avons pas entendu parler d’une assemblée générale qui a validé un tel positionnement. Comme l’ensemble de la société algérienne, le FCE est sans doute traversé par des clivages politiques. Ses membres ne sont pas tous d’accord sur la période de transition. La direction intérimaire s’exprime au nom d’entreprises et de patrons alors que personne ne lui a demandé de le faire.
On croyait que le départ de Bouteflika, l’emprisonnement d’Ali Haddad et les enquêtes sur la corruption qui ciblent de nombreux chefs d’entreprise allaient servir de leçon définitive aux dirigeants du FCE. Cette situation est en effet le résultat d’une trop grande proximité entre le patronat et la politique durant les 20 dernières années. Mais au lieu de corriger cette anomalie en éloignant définitivement le FCE de la politique, la nouvelle équipe intérimaire ne trouve rien de mieux à faire que de prêter allégeance au nouveau pouvoir.
Discrédité par la proximité avec le pouvoir politique et son soutien au 5e mandat de Bouteflika, le FCE doit plutôt s’atteler à gérer sa transition, et se doter d’une nouvelle direction légitime capable de défendre les intérêts de l’entreprise, et d’être une force de proposition au service de l’économie nationale.