Le siège de la société qui produit à Alger les programmes de la chaîne de télévision BRTV a été mis sous scellés dimanche 19 février. Les raisons de cette mesure n’ont été précisées ni par l’administration ni par la société concernée ou la direction de la chaîne.
Dans une déclaration laconique diffusée dimanche soir, BRTV (Berbère Télévision) s’est dite dans l’incapacité « d’assurer sa programmation habituelle », en raison « de circonstances exceptionnelles indépendantes de sa volonté ». La direction de la chaîne a promis d’« expliquer les raisons de cette situation », dans un prochain communiqué.
En attendant que la chaîne ou la société prestataire s’expriment sur les raisons de la mesure prise par les autorités algériennes, le siège demeure fermé et de nombreuses voix assurent que c’est un motif « administratif » qui est derrière la mesure.
Berbère Télévision continue toutefois à diffuser ses programmes à partir de la France où elle est domiciliée.
La mise sous scellés du siège de son prestataire algérois a suscité un élan de solidarité avec la chaîne d’expression amazighe, l’une des rares à émettre dans cette langue.
Les réactions à la fermeture des locaux de BRTV à Alger
« Berbère Télévision présente ses remerciements aux milliers de personnes qui nous ont montré leur soutien à travers leurs messages et leurs publications », a posté la chaîne sur sa page Facebook ce lundi.
De nombreuses personnalités ont aussi réagi à la situation que vit le média, y voyant une atteinte à la liberté d’expression. « Berbère Télévision vivra », a posté le président du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Atmane Mazouz, qui s’est par ailleurs interrogé si l’on cherche à pousser les berbérophones d’Algérie à « s’informer ailleurs, alors que le droit à l’information est garanti par la Constitution ».
Youcef Aouchiche, premier secrétaire du Front des forces socialistes (FFS), a estimé de son côté dans une déclaration mise en ligne ce lundi que « la volonté de réduire au silence toute expression libre et responsable dans le pays laisse la voie ouverte à tous les dangers et à toutes les interprétations ».
Youcef Aouchiche relève qu’au moment où les locaux de Berbère Télévision sont mis sous scellés, « certains médias privés, et certains influenceurs sur les réseaux sociaux continuent en toute impunité de distiller un discours qui heurte frontalement les sensibilités et les symboles du pays ».
Le premier responsable du FFS se demande qui a intérêt à « semer la discorde et la désunion » au moment où « le pays a besoin de faire front pour neutraliser toutes les tentatives extérieures de déstabilisation » et « quels objectifs poursuivent ceux qui font tout pour exacerber les tensions dans le pays ».
Appelant les autorités à « stopper cette spirale dangereuse », Youcef Aouchiche souligne que « si l’insulte, le dénigrement et la propagation de fausses informations et de discours de haine doivent tomber sous le coup de la loi, cela ne peut en aucune manière justifier des atteintes systématiques à la liberté d’expression ».
L’ancien membre de l’instance présidentielle du parti, Hakim Belahcel, a lui aussi dénoncé « un abus d’autorité ».
« Je considère qu’en absence d’un quelconque préavis de fermeture, le recours à cette procédure extrême relève d’un regrettable abus d’autorité », a écrit le cadre du FFS, ajoutant que « le droit à l’information qui est fondamentalement consacré par les lois de la République ne peut en aucune manière être foulé aux pieds par des réflexes d’un autre âge ».