Le film Ben M’hidi du réalisateur Bachir Derrais qui retrace la vie et le combat de l’un des héros de la révolution algérienne a fait un carton au Festival du film méditerranéen d’Annaba (24 – 30 avril). Son réalisateur dévoile à TSA quelques secrets de tournage et défends ses choix.
Le biopic a été projeté jeudi au théâtre Azzedine Medjoubi dans le centre-ville de la grande ville de l’est algérien.
Alors la salle archicomble était archicomble, d’autres personnes étaient massées à l’extérieur faute d’avoir pu obtenir un ticket d’accès pour regarder le film.
« L’aspiration populaire, portée essentiellement par un auditoire annabi composé en grande partie de femmes et d’étudiants, s’est traduite par une reconnaissance tangible. Il est à noter que le cours du temps a su rétablir l’équilibre face aux critiques persistantes auxquelles j’ai été confronté durant ces cinq dernières années », a réagi Bachir Derrais dans une déclaration à TSA.
Le film Ben M’hidi a été projeté en avant-première le 4 mars dernier à l’Opéra d’Alger devant plus de 1.600 personnes, dont de hauts responsables de l’État.
Cinéma : le film Ben M’hidi fait un carton au Festival du cinéma méditerranéen d’Annaba
Le Biopic qui raconte l’histoire de l’un des plus importants dirigeants du FLN durant la guerre d’indépendance a été projeté le 5 avril dernier à Paris.
Une projection privée qui a eu lieu devant quelques invités au Club 13. Elle a été organisée par le Conseil mondial de la diaspora algérienne qui a été lancée par Karim Zéribi le 8 mars dernier à Paris.
A Annaba, c’est la première fois que le film Ben M’hidi qui est restée bloquée pendant cinq ans en Algérie, soit projeté au grand public lors d’un festival de cinéma.
Le biopic sera projeté le 8 juin à l’Institut du monde arabe à Paris, avant de prendre part à d’autres festivals de cinéma durant l’été. Pour sa sortie en salle en Algérie et en France, le réalisateur Bachir Derrais prévoit de le faire simultanément dans ces deux pays à l’automne prochain à l’occasion la célébration du 70e anniversaire du déclenchement de la guerre de libération le 1ernovembre 1954.
Film Ben M’hidi : Bachir Derrais pourquoi il a opté pour une « œuvre à caractère politique »
Le film sur le film Ben M’hidi ne comporte pas de scènes de guerre alors que la guerre de Libération nationale est son sujet principal puisqu’il raconte l’histoire de l’un des Six historiques à l’origine du déclenchement de la révolution du 1er novembre 1954.
Le réalisateur Bachir Derrais a choisi d’axer sur l’aspect politique de la vie de Larbi Ben M’hidi, un aspect rarement traité jusque-là dans les autres productions cinématographiques liées à la guerre d’indépendance.
« Notre production a opté pour la réalisation d’une œuvre cinématographique à caractère politique. Historiquement, l’industrie cinématographique algérienne s’est illustrée par la fréquence de films de guerre depuis 1965. Cependant, la mise en scène de conflits armés exige un investissement financier conséquent. Avec un budget restreint ne dépassant pas trois millions d’euros, non convertible en devises étrangères, il était inconcevable de produire des séquences d’action d’une qualité comparable à celles des productions américaines sans risquer la dérision », explique-t-il à TSA.
Bachir Derrais voulait toutefois inclure dans son film « deux séquences de guerre majeures : la reconstitution de l’explosion sur la rue de Thèbes en studio et la scène au Milk bar », mais les autorisations nécessaires « n’ont pas été délivrées ».
Film Ben M’hidi : des forces spéciales de l’ANP pour sécuriser le tournage à Lakhdaria
Bachir Derrais revient aussi sur la genèse du projet cinématographique consacré à cet héros de la révolution algérienne, qui « trouve son origine dans la lecture de l’ouvrage du général Aussaresses, « Le bourreau de Ben M’hidi, et dans le visionnage de l’œuvre de Patrick Rotman consacrée à la bataille d’Alger. »
« L’élaboration du scénario s’est avérée complexe, marquée par une véritable épreuve : le manque de sources, la rareté des témoignages, la nécessité d’obtenir l’approbation de la famille de Ben M’hidi et de répondre à leurs attentes, ainsi que l’acquisition des autorisations des anciens combattants et la plan du financement », confie le réalisateur.
En outre, le tournage du film Ben M’hidi n’a pas été facile en Algérie. En plus des blocages administratifs qu’il a subi, ce biopic était dans le viseur des groupes terroristes, raconte Bachir Derrais.
« Le processus de tournage a été entravé à de multiples reprises en raison de complications administratives, notamment des conflits avec l’ex-ministre de la Culture, Azzedine Mihoubi. De surcroît, la production a été confrontée à une menace sécuritaire de taille : un groupe terroriste armé avait planifié un attentat et envisageait l’enlèvement de techniciens européens lors du tournage à Lakhdaria. Cette situation périlleuse a nécessité la mobilisation de 80 membres des forces spéciales de l’Armée nationale populaire pour assurer la sécurité de l’équipe et permettre la poursuite du tournage », raconte Bachir Derrais.
La période du tournage de la séquence du film à Lakhdaria à 70 km à l’est d’Alger a coïncidé avec l’enlèvement tragique du Français Hervé Gourdel. Ce guide de haute montagne a été enlevé le 21 septembre 2014 par des terroristes dans le massif du Djurdjura près du village Ait Ouabane, avant d’être décapité.
Toutefois, note Bachir Derrais, malgré ces obstacles, le film Ben M’hidi a « pu être achevé, mais il a été confronté à la censure et a subi un blocage de cinq années avant d’être diffusé. Peu de personnes auraient eu la résilience et la capacité physique de persévérer face à de tels défis. »
Film Ben M’hidi : Derrais explique le choix de Khaled Benaïssa pour le rôle principal
Dans le film Ben M’hidi, l’acteur Khaled Benaissa campe le rôle principal. Le comédien s’est glissé, avec succès, dans la peau de l’un des Six historiques de la Révolution algérienne. Dans un entretien à TSA publié le 8 avril dernier, Khaled Benaïssa a expliqué comment il a obtenu ce rôle et comment il s’est préparé pour interpréter Ben M’hidi.
« Il a fallu d’abord une préparation physique. Pour me mettre dans la peau de Larbi Ben M’hidi, j’ai dû suivre un régime alimentaire strict et élaguer 10 kg », a-t-il expliqué. « C’est une chance inouïe d’avoir décroché ce rôle », se félicite-t-il.
Bachir Derrais explique que le choix de Khaled Benaissa pour incarner Ben M’hidi s’est « imposé après une série d’auditions rigoureuses ». « Sa détermination à obtenir le rôle s’est illustrée de manière éloquente : il a entrepris de perdre 15 kilogrammes en amont de la confirmation de sa participation. Une telle initiative témoigne de son engagement professionnel et de sa volonté manifeste de se consacrer pleinement au personnage », confie encore le réalisateur du biopic sur Larbi Ben M’hidi.
Train bleu, champion d’Algérie d’équitation, effets spéciaux….
Bachir Derrais explique aussi que la scène train bleu qui apparaît dans le film a été tournée à Tozeur en Tunisie. « C’est un train qui s’appelle le lézard rouge. Il a été restauré pour des voyages touristiques dans le désert tunisien. On voulait réparer un train d’époque, mais on nous a dit que l’Algérie a offert tous ses trains des années 40 et 50 à la Mauritanie », explique le réalisateur du film Ben M’hidi.
La production du biopic n’a eu recours aux effets spéciaux, sauf pour les scènes où Larbi Ben M’hidi est un avion en direction du Caire pour y rencontrer Ahmed Ben Bella. Les hélicoptères bananes qui apparaissent dans le film sont également virtuels.
« Nous avons utilisé les effets spéciaux pour l’avion et les hélicoptères bananes qui n’existent plus aujourd’hui », affirme Bachir Derrais qui révèle que l’enfant qui chevauche merveilleusement un cheval blanc au début du film est le champion d’Algérie d’équitation de sa catégorie. « Il avait entre 8 et 10 ans », précise-t-il.
Pour les voitures utilisées dans le film, elles sont toutes réelles. « On a loué toutes les voitures de l’époque qui existent en Algérie, on a utilisé de vraies voitures », assure Bachir Derrais qui raconte une anecdote croustillante quand il tournait la scène du congrès de la Soummam.
Un jour, on tournait dans la Soummam et soudain ….
« Un jour, on tournait à la Soummam, je me suis éloigné du plateau. Il faisait nuit. À un moment, j’entends le bruit des armes, je pensais que c’était des terroristes. Je me suis retrouvé entouré de soldats, armes à la main. On s’est rendu compte qu’on était gardé par 80 parachutistes sans qu’on le sache ».
Bachir Derrais relève en exclusivité à TSA que le film Ben M’hidi sera projeté le 7 mai à Sétif et ce la veille de la commémoration des massacres du 8 mai 45 qui ont fait plus de 45.000 morts en Algérie.