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Flambée du Covid-19 : « Le virus est moins dangereux, mais plus contagieux »

Flambée du Covid-19 : « Le virus est moins dangereux, mais plus contagieux »

L’Algérie est confrontée depuis une semaine à une remontée spectaculaire des contaminations quotidiennes au Covid-19. Hier jeudi 5 novembre, 642 nouvelles infections ont été recensées en 24 heures, contre 548 nouveaux cas la veille (mercredi 4) et 405 nouveaux cas mardi.

Sur le terrain, cette recrudescence, qui se traduit par la saturation des hôpitaux, a poussé le gouvernement a déclenché l’alerte générale. Un plan d’action a été dévoilé jeudi 5 novembre pour renforcer le dispositif de lutte contre l’épidémie.

Le même jour, le ministre de la Santé, le Pr Abderrahmane Benbouzid, a tiré une nouvelle fois la sonnette d’alarme sur la situation sanitaire qui risque d’échapper au contrôle. « Il y a péril en la demeure, il y a danger, il y a danger », a-t-il prévenu lors d’une conférence de presse.

« Je peux vous dire que le futur sera plus dangereux. On ne sait pas comment sera la situation dans 2 à 3 mois », a-t-il lancé.  De son côté, le ministre de l’Intérieur, Kamel Beldjoud, a instruit, ce jeudi, les walis de la République en vue de prendre des dispositions « urgentes » et « plus vigoureuses » afin de limiter la propagation de l’épidémie du Covid-19 en Algérie, après avoir constaté un relâchement de leur part dans l’application des mesures barrières dont le port du masque. Un constat maintes fois dressé par les professionnels de la santé qui ont mis en garde contre des conséquences désastreuses sur la santé publique.

 Sans les gestes barrières, « la 2e vague arrivera fatalement »

Si l’épidémie du Covid-19 ne tue pas beaucoup en pourcentage, elle touche beaucoup de personnes donnant lieu à des « chiffres horribles », alerte le Dr Adel Boudahdir médecin-réanimateur au CHU de Blida qui confirme une recrudescence « sérieuse » du nombre de cas Covid-19 « graves et moins graves » au niveau de son établissement.

Une situation qui a imposé d’agrandir les espaces. « Aujourd’hui (mercredi 4 novembre) nous sommes à 38 malades hospitalisés en réanimation. Il y a eu ouverture d’un service pour les cas d’isolement moins graves vendredi passé pour absorber le flux des malades. Donc nous sommes à trois services de Covid isolement et un service de réanimation », précise-t-il pour TSA.

La hausse des contaminations n’est pas « extraordinaire », tempère néanmoins le Dr Mohamed Yousfi, chef du service des maladies infectieuses à l’EPH Boufarik. « Cette hausse n’est pas extraordinaire, car, lorsque plusieurs wilayas sont touchées, cela signifie que le virus circule beaucoup, et automatiquement on va avoir des chiffres qui vont flamber », explique l’infectiologue.

L’Algérie fait-elle face à une deuxième vague de l’épidémie de Covid-19 ? « On pourrait dire que ce sont les prémices. Pour l’instant, nous n’en sommes pas encore à ce stade (de la 2e vague) mais si cela continue, avec le non-respect des mesures-barrières, on y arrivera fatalement », prévient le médecin spécialiste.

Selon Dr Yousfi, une seconde vague de l’épidémie signifie que le virus continue toujours de circuler. « Une deuxième vague ne veut pas dire qu’on a affaire à un nouveau virus ou qu’il est importé d’ailleurs. Cela s’est passé pour toutes les épidémies que le monde a connues », ajoute-t-il. Pour expliquer la hausse des contaminations, le chef du service d’infectiologie de l’EPH Boufarik met en cause « deux acteurs » : les citoyens qui ne respectent pas les mesures-barrières (port du masque, distance physique) et les autorités locales qui ne font rien pour imposer le respect de ces consignes sanitaires.

 Le virus est « devenu moins dangereux pour vivre plus longtemps » 

Pour les médecins, c’est au moment où le Covid-19 a perdu de sa virulence qu’il a tendance à se propager de façon rapide et massive. « À ses débuts, le virus était en progression exponentielle. Aujourd’hui, le danger du virus vient (paradoxalement) du fait qu’il est moins dangereux », analyse le Dr Khaled Saïd président de l’Union des médecins algériens (UMA) pour la région de l’Est.

« Ce virus a un instinct de survie. Au début, quand il a commencé à se propager, lorsqu’il infecte une personne, il la tue. Par conséquent, il ne peut pas évoluer dans une cellule morte. Il s’est donc accommodé et a muté de façon telle qu’il est devenu moins dangereux pour vivre plus longtemps », développe le médecin qui cumule près de 40 ans de pratique médicale.

Autrement dit, le Covid-19 n’a pas intérêt à ce que la personne qu’il infecte décède. C’est l’hypothèse développée par le Pr Kamel Senhadji dans l’entretien à TSA mardi 3 novembre.

Le Pr Senhadji avance l’idée selon laquelle « un changement dans le comportement du virus » a pu survenir de sorte qu’« il s’adapte au corps humain sans le tuer ». « Les virus hautement pathogènes et qui sont tueurs ne peuvent pas survivre s’ils tuent leur cible, parce qu’ils ne peuvent pas prospérer », a expliqué l’immunologue et président de l’Agence nationale de la sécurité sanitaire.

Selon lui, « les mutations par ces mêmes virus se font de façon à ce qu’il y ait une persistance dans leur survie, mais sans tuer la personne qu’ils infectent », ajoutant que cette mutation « va dans le bon sens et c’est cela qui va aider à développer nos défenses immunitaires ».

Mais le revers d’une telle situation est qu’elle risque de se répercuter fatalement sur les personnes vulnérables : personnes âgées de 65 ans et plus, celles souffrant de comorbidités, etc. « Ça semble paradoxal : le danger du Covid-19 est qu’il est devenu moins dangereux et donc se propage très rapidement.  C’est-à-dire que la virulence du virus est inversement proportionnelle à la propagation. Mais attention, la virulence persistera pour les personnes âgées et celles immunodépressives », met en garde le Dr Saïd.

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