Le Maroc a peut-être crié trop vite victoire lorsque l’ancien président américain Donald Trump a reconnu sa souveraineté sur le Sahara occidental en contrepartie de la normalisation de ses relations avec Israël.
En deux ans, Joe Biden a multiplié les attitudes qui laissent penser que, même s’il ne l’a pas révoqué, il ne partage pas l’engagement de son prédécesseur.
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La réticence américaine s’est de nouveau manifestée par rapport au sommet du Néguev, initialement prévu au printemps prochain à Dakhla, ville du Sahara occidental occupé.
Le sommet devait réunir les chefs de la diplomatie d’Israël, des Etats-Unis et des pays arabes ayant normalisé leurs relations avec Tel-Aviv. Il est aussi appelé le « Sommet des accords d’Abraham », car il est censé commémorer les accords de normalisation conclus en 2020.
La première édition s’est tenue fin mars 2022 dans le désert du Néguev (d’où son nom). La seconde ne devrait pas se tenir à la période et au lieu prévus, soit au printemps prochain à Dakhla occupé. Selon des médias israéliens, elle sera reportée et délocalisée.
« Rabat n’a pas fixé de date », a déclaré un fonctionnaire américain à Times of Israël. Le journal israélien Hayom est, lui, formel. Il annonce le report du sommet. Citant des sources anonymes, le quotidien avance même que l’événement se tiendra « éventuellement » aux Etats-Unis.
Dans certains titres de la presse israélienne, il est expliqué que le report est dû à la colère du Maroc devant les agissements de certains membres du nouveau gouvernement israélien, « le plus à droite de l’histoire », vis-à-vis de la question palestinienne.
Forum du Néguev : le Maroc veut imposer sa politique du fait accompli au Sahara occidental
Le 13 janvier, Itamar Ben-Gvir avait fait une intrusion sur l’esplanade de la mosquée d’Al Aqsa. Un geste perçu comme une énième provocation à l’égard des Palestiniens et des musulmans à quelques semaines du mois de ramadan.
Cet acte n’aurait pas été bien accueilli par le Maroc qui craindrait des troubles dans la ville sainte et le reste des territoires occupés, qui le mettraient dans une situation inconfortable vis-à-vis de son opinion publique, toujours selon la presse israélienne. Le geste de Ben-Gvir a du reste été condamné par les États-Unis et les Emirats arabes unis, pays qui a également normalisé ses relations avec Israël en 2020.
C’est cette version qui est privilégiée au Maroc car elle sert en quelque sorte la propagande du royaume qui poursuit le renforcement de ses relations militaires avec Israël.
A la signature des accords de normalisation en décembre 2020, la communication officielle marocaine avait tenté de convaincre que le Maroc n’abandonnera pas la cause palestinienne, mettant en avant que le roi Mohammed VI était le président du comité Al Qods, titre qu’il avait hérité de son père Hassan II.
Des médias israéliens ont néanmoins dévoilé le véritable motif de cette remise en cause du sommet. Il s’agit de la réticence des Etats-Unis de cautionner le lieu de sa tenue.
« Washington aurait exprimé des réticences quant au lieu du Sommet, à savoir Dakhla », écrit le journal marocain Yabiladi, reprenant la presse israélienne.
En plus de son refus d’ouvrir une ambassade à Dakhla, Joe Biden a aussi mis son veto, l’été 2022, à la tenue des exercices militaires conjoints « African Lion » au large du Sahara occidental.
Plus surprenant encore, si les États-Unis de Donald Trump ont reconnu la souveraineté marocaine sur les territoires sahraouis occupés en contrepartie de la normalisation, Israël ne l’a pas encore fait.
En janvier dernier, le site américain Axios avait révélé que Rabat conditionnait l’ouverture d’ambassades respectives par une déclaration formelle du gouvernement israélien reconnaissant la « marocanité » du Sahara occidental.