L’Archevêque d’Alger Mgr Jean-Paul Vesco s’est exprimé une nouvelle fois sur la crise entre la France et l’Algérie. Dans sa ligne de mire, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, partisan de la ligne dure avec le gouvernement algérien.
Sa méthode de la « riposte graduée » contre le gouvernement algérien pour l’obliger à libérer Boualem Sansal et reprendre les ressortissants algériens sous OQTF est « une posture suicidaire », a tranché Mgr Jean-Paul Vesco dans un entretien au site de la Radio Chrétienne Francophone (RCF), réalisé avant l’entretien téléphonique entre les présidents algérien Abdelmadjid Tebboune et français Emmanuel Macron.
Cet entretien a permis aux deux chefs d’État de clore 8 mois de crise inédite entre les deux pays, et de mettre en place une feuille de route en 10 points pour relancer la relation bilatérale.
Bruno Retailleau s’est imposé comme « méchant » côté français dans la gestion de la crise avec l’Algérie, déclenchée par la décision du président Emmanuel Macron de reconnaître la marocanité du Sahara occidental occupé.
La position de Bruno Retailleau avec l’Algérie est une « position de force »
Cette crise a été ensuite aggravée par la volonté affiché par Bruno Retailleau d’engager un bras de fer avec l’Algérie sur la question migratoire dès sa nomination comme ministre de l’Intérieur le 21 septembre, l’arrestation le 16 novembre dernier à l’aéroport d’Alger de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, l’expulsion ratée de l’influenceur algérien Doualemn le 9 janvier dernier, les restrictions à l’entrée en France de détenteurs algériens de passeports diplomatiques qui sont exempts de visa, et les menaces du gouvernement d’abroger l’accord de 1968 qui régit l’immigration algérienne en France.
« La position du ministre de l’Intérieur est une position de force. On doit faire plier. Et faire croire aux Français que ça va apporter plus de sécurité, c’est un leurre absolu », critique l’Archevêque qui a obtenu la nationalité algérienne en février 2023.
Algérie – France : le divorce, « c’est de la folie »
Mgr Jean-Paul Vesco soutient qu’avec l’Algérie, il « faut tisser des liens », au lieu de demander le divorce. « J’entends des responsables politiques appeler au divorce avec l’Algérie. Mais c’est une folie », poursuit-il.
Pour lui, la solution à la crise entre la France et l’Algérie est à « trouver du côté de notre devise, liberté, égalité, fraternité. C’est de cette fraternité dont on a besoin. C’est tisser des liens. Ne pas les couper. C’est tout le contraire qu’il faut faire ».
Mgr Jean-Paul Vesco qui vit en Algérie depuis plus de 20 ans, a fini par cerner l’origine du mal qui ronge les liens entre l’Algérie et la France. « Je sens cette blessure qu’il y a au fond de l’âme algérienne. J’ai appris à la comprendre, à la discerner. Je crois en effet qu’il y a, entre la France et l’Algérie, un rapport d’abuseur à abusé », selon celui qui a été aussi évêque d’Oran.
L’Archevêque d’Alger s’est exprimé pour la première fois sur la crise franco-algérienne dans un entretien au journal français La Croix le 24 mars dernier.
Il avait critiqué le « ton comminatoire » de Bruno Retailleau, et de ses « injonctions aux autorités algériennes », alors que, a-t-il remarqué, « l’Algérie ne cède jamais face à ce type de discours, spécialement venant de la France ».