Une fâcheuse habitude est en train de s’installer dans certains médias français réputés proches de l’extrême-droite. Les faits divers sont surmédiatisés ou ignorés selon qu’ils soient commis par des personnes d’origine musulmane ou immigrée, ou par des individus portant des prénoms à consonance européenne.
Et ce n’est pas une vue de l’esprit. Mediapart a pu, au terme d’une longue enquête, apporter la preuve que c’est ainsi qu’est traitée l’information chez CNews par exemple, la chaîne où a sévi pendant de longues années un certain Éric Zemmour.
« CNews ne s’embarrasse pas des règles déontologiques et des faits quand il s’agit de conforter ses obsessions identitaires et de donner à voir à son public l’image d’une France mise en péril par l’islam et l’immigration », a conclu le journal, fondé par Edwy Plenel, dans une enquête publiée début avril.
Mediapart a fait état d’ « absence de vérification, intox et primauté de l’opinion sur l’info » dans le traitement de ce genre d’information au niveau de la rédaction de CNews.
Ce média et d’autres en France sont soupçonnés depuis longtemps de traiter l’information de manière sélective dans le but de stigmatiser davantage l’immigration, l’Islam et les musulmans. L’enquête de Mediapart en a apporté la preuve formelle.
« Affaire de Cholet, on laisse tomber. Il n’y a eu aucune référence au Coran », a écrit en décembre dernier un rédacteur en chef de CNews dans un message WhatsApp à l’adresse des membres de la rédaction, a révélé le même site.
En décembre 2023, dans un collège de la ville de Cholet (Maine-et-Loire), un élève de 14 ans a agressé un de ses professeurs qui a tenté de lui confisquer son téléphone portable.
L’affaire a perdu de sa banalité quand certains médias ont rapporté que l’adolescent a proféré des menaces en « jurant sur le Coran ». Et lorsque le procureur a démenti catégoriquement cette référence au livre saint de l’Islam, l’histoire est redevenue ce qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être, c’est-à-dire une banale affaire d’indiscipline scolaire. Dans les médias, on a cessé d’en parler.
France : des faits divers traités par des médias en fonction de leur lien à l’Islam
Tout récemment, un cas identique de traitement sélectif de l’information n’a échappé à personne. Il s’agit de l’affaire Samara, la collégienne battue par trois adolescents jusqu’à tomber dans le coma. La jeune fille de 13 ans a été violemment agressée à la sortie de son collège à Montpellier (Sud de la France) au début de ce mois d’avril.
« Parce qu’elle était l’unique fille d’origine musulmane du collège à ne pas porter le voile et à refuser de vivre sous le diktat de la charia », avaient rapporté certains internautes malintentionnés sur les réseaux sociaux.
Suffisant pour qu’une catégorie de médias, toujours les mêmes, s’en emparent pour en faire leur sujet principal, invitant « experts » et « spécialistes » pour tirer une fois de plus la sonnette d’alarme sur « l’islamisation rampante de la société » française.
Dans cette affaire aussi, c’est la justice qui a remis les pendules à l’heure. Après avoir entendu les trois agresseurs, deux garçons et une fille, le procureur de Montpellier a conclu à un règlement de compte entre collégiens. En conférence de presse, il a exclu toute « motivation religieuse » dans cette agression.
Malgré la gravité des faits qui a d’ailleurs valu aux trois adolescents d’être poursuivis pour « tentative de meurtre », ces médias proches de l’extrême-droite, toujours les mêmes, se sont subitement désintéressés de l’affaire.
Dans de nombreux faits divers en France ces derniers mois, les choses se sont passés de la même manière. L’élément central que recherchent en premier certains rédacteurs pour décider de l’importance à accorder au sujet, c’est le prénom du coupable et aussi celui de la victime.
En novembre dernier, lorsqu’un septuagénaire, « français de souche » et visiblement xénophobe, a agressé au couteau un jardinier algérien en proférant des insultes racistes, l’affaire n’a pas eu le retentissement médiatique qu’appelle la gravité d’un tel acte.