Il avait décollé de l’aéroport parisien d’Orly malgré une fuite de carburant: le parquet de Créteil, près de Paris, a requis jeudi une interdiction de vol de cinq ans sur le territoire français contre un pilote de la Royal Air Maroc.
Le ministère public a également réclamé 10 mois d’emprisonnement et 5.000 euros d’amende. Le pilote, un Marocain de 51 ans, était poursuivi pour mise en danger de la vie d’autrui. Condamné lors d’un premier procès sans jamais être avisé, il a continué à voler jusqu’en mars 2017, date de son interpellation à l’aéroport de Nantes, dans l’ouest de la France.
Les faits remontent à août 2010. La navette Paris-Casablanca atterrit avec une heure de retard et doit repartir. Pressé, le pilote ordonne d’embarquer les 80 passagers pendant que l’on charge les bagages.
Lors de la procédure, plusieurs bagagistes sont aspergés par un liquide émanant d’un mini-réacteur, logé dans la queue de l’avion. Ce petit moteur sert notamment à allumer les deux gros réacteurs sous les ailes.
Le pilote est prévenu qu’il s’agit de kérosène. Il descend, constate une fuite qu’il estime “en train de s’estomper” et signale l’incident au service technique de sa compagnie à Casablanca. Puis sans attendre de réponse, allume les deux turbines, à l’aide du petit réacteur. Une fois les conseils techniques reçus, il coupe ce mini-moteur, et effectue le vol retour sans incident.
“Quatre-vingt personnes assises sur 15.000 litres de kérosène, ça laisse normalement à réfléchir quand on repère une fuite sur un avion”, s’est indigné le procureur.
Selon lui, “la fuite est évidente. (…) Les pompiers ont quand même nettoyé 10m2 au sol”. Le pilote aurait dû “démarrer (les réacteurs) autrement”, à l’aide d’un groupe de démarrage au sol, fourni par l’aéroport.
“Je suis descendu, je n’ai quasiment rien vu”, s’est défendu le pilote. Il a expliqué avoir pensé qu’un drain “évacuait le trop plein des réservoir”. “J’ai respecté les consignes, j’ai traité ce problème”, en coupant le mini-réacteur avant de décoller, a-t-il ajouté.
Dans son rapport, l’expert judiciaire a jugé la décision d’allumer les réacteurs “aberrante”.
“Dans ce dossier, soit on en a trop fait, soit pas assez et il ne devrait pas être seul devant ce tribunal”, a plaidé l’avocat du prévenu, Ralph Boussier.
Le pilote a décollé “avec la bénédiction de tout l’aéroport d’Orly et de la Royal Air Maroc”, s’est-il exclamé. “Si personne n’a fait remonter le problème à la tour de contrôle, c’est qu’on a clos l’incident.”
Le jugement est attendu le 2 novembre.