La crise politique en cours en France ne fait pas perdre de vue l’Algérie à l’extrême-droite. L’hostilité de ce courant à l’Algérie tourne décidément à l’obsession. Marine Le Pen, chef de file du Rassemblement national (RN), directement responsable du blocage institutionnel dans lequel se trouve son pays, ne s’est pas empêchée de sortir le bouc émissaire habituel, l’Algérie, à laquelle sont imputés tous les maux de la France.
La fille de Jean-Marie Le Pen évoquait jeudi soir sur CNews la situation difficile des départements d’outre-mer, derniers avatars du colonialisme français. Évidemment, l’Algérie, elle-même colonisée pendant 132 ans, n’est en rien responsable des difficultés de ces territoires et de l’aspiration de leurs populations à l’indépendance.
Mais Mme Le Pen a trouvé la transition pour rebondir sur l’Algérie, un sujet porteur de surcroît dans ce contexte de crise politique en France.
Selon la finaliste des deux dernières présidentielles, l’argent que, selon elle, la France donne à l’Algérie, devrait être destiné aux départements d’outre-mer.
Elle a cité, la Chine, l’Algérie et les Comores parmi les récipiendaires de l’aide française au développement. « On en donne à l’Algérie qui nous crache au visage en permanence », a-t-elle dit.
Marine Le Pen a évidemment fait du réchauffé et repris sciemment une affirmation que tout le monde en France et en Algérie sait fausse.
Cette histoire d’aide française à l’Algérie a été sortie en septembre dernier par Sarah Knafo, députée européenne de l’autre parti extrémiste français, Reconquête !
La parlementaire avait soutenu que la France fournissait chaque année 800 millions d’euros à l’Algérie au titre de l’aide au développement.
Des médias français sérieux, comme TF1, avaient enquêté et démontré que le chiffre avancé par Knafo était exagéré. Le vrai chiffre c’est 800 millions d’euros sur cinq ans (de 2017 à 2021) et non annuellement.
L’Algérie a saisi la justice française pour diffusion de fausses informations. La plainte a été classée sans suite par le parquet de Paris qui a toutefois reconnu que l’affirmation de l’eurodéputé est « insuffisamment vérifiée et plutôt imprécise ».
Pour l’extrême-droite française, l’Algérie est responsable même des problèmes des outre-mer
Il est curieux que l’extrême-droite, si soucieuse de la destination de l’argent public, tourne autour de cette broutille et n’évoque jamais les sommes colossales affectées aux principaux pays qui dépendent de l’aide au développement, particulièrement le Maroc.
L’obsession de l’Algérie est manifeste. Le courant extrémiste français a tout fait ces dernières années pour pousser les deux pays à la rupture. La crise en cours entre les deux capitales est la résultante de la pression mise par le même courant sur le président Emmanuel Macron pour l’amener à se rapprocher du Maroc tout en se détournant de l’Algérie.
Le président français a fini par céder fin juillet dernier en reconnaissant « la souveraineté marocaine » sur le Sahara occidental.
Pendant tout l’été, l’Algérie a constitué un thème des campagnes pour les élections européennes et législatives. L’extrême-droite a fait un point de fixation de l’immigration algérienne, qui n’est pas plus problématique que les autres, de l’accord de 1968 sur l’immigration dont elle réclame la révocation et du refus de toute repentance de la France sur son passé colonial en Algérie.
L’arrestation en Algérie de l’écrivain Boualem Sansal à la mi-novembre est tombée comme une aubaine pour ce même courant qui mène une campagne d’une virulence sans égal pour obtenir sa libération.
L’extrême-droite n’est pas près de se calmer sur l’Algérie avec les débats de cette nouvelle crise politique qui s’annoncent houleux.