Le directeur de cabinet d’Emmanuel Macron, un de ses plus proches collaborateurs, sera auditionné sous serment mardi par les députés sur son rôle dans l’affaire Benalla qui secoue la France depuis six jours et se rapproche du président, toujours mutique.
Patrick Strzoda, 66 ans, prêtera serment devant la commission d’enquête de l’Assemblée nationale vers 14H30 GMT avant d’être sans nul doute soumis à un feu roulant de questions de parlementaires d’opposition très remontés, en pleine tempête médiatique et politique au cœur de l’été.
“C’est une première étape”, a déclaré mardi matin Eric Coquerel, député de la France insoumise (gauche radicale), qui réclame que le président Macron lui-même vienne répondre aux députés.
“Nous sommes dans une présidence du mensonge”, a dénoncé le socialiste Olivier Faure, au lendemain d’une première série d’auditions qui ont pointé la responsabilité de l’Élysée dans la gestion de l’affaire Alexandre Benalla, cet ancien proche d’Emmanuel Macron filmé le 1er mai en train de molester des manifestants.
Les auditions du ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, du préfet de police de Paris et d’un autre responsable policier n’ont pas éclairé toutes les zones d’ombres, mais l’entourage de M. Macron s’est retrouvé pointé du doigt.
L’opposition estime que le gouvernement a tenté de couvrir M. Benalla, notamment en ne signalant pas à la justice ses actions violentes illégitimes, et dénonce l’opacité des vastes prérogatives et avantages octroyés à cet ancien pilier de l’appareil sécuritaire de la présidence, certains évoquant une “police parallèle”.
– ‘Ca va être chaud!’ –
Après M. Strzoda mardi, un autre proche d’Emmanuel Macron, le secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kohler, véritable bras droit du président, sera interrogé jeudi par les sénateurs. Plusieurs autres auditions de responsables sont prévues, soit à l’Assemblée, soit au Sénat.
Les parlementaires vont aussi s’en donner à cœur joie ce mardi lors des questions au gouvernement dans l’après-midi. Les ministres vont devoir faire bloc pour protéger l’Élysée désormais “à découvert”, comme titre le journal de gauche Libération. “Les projecteurs se tournent vers l’Élysée”, titre quant à lui le quotidien catholique La Croix.
“Ça va être chaud!” a prévenu M. Coquerel.
Cette crise politique est la plus grave pour Emmanuel Macron depuis son élection en 2017.
Le jeune président qui fait passer ses réformes à un train d’enfer et a bâti son action politique sur la rupture avec la vie politique ancienne est aujourd’hui éclaboussé à cause de son cénacle.
“Un an après le début du quinquennat, la +génération Macron+ se retrouve soudain happée par une réalité éternelle de la vie politique: la tentation de l’abus de pouvoir”, éditorialisait vendredi le journal suisse Le Temps.
“La révélation du comportement douteux d’un rouage important du dispositif de sécurité élyséenne sidère le pays: rien ne changera donc jamais dans les allées du pouvoir”, juge mardi le quotidien français de droite Le Figaro dans son éditorial.
“Nous avons fait campagne sur le fait que la politique devait être plus propre, et je m’aperçois que c’est le pire du monde d’avant, donc forcément c’est un peu déstabilisant”, a commenté sur France Bleu un député de la majorité parlementaire, Paul Molac.
– ‘Stop à l’hystérie’ –
Pris dans la tourmente, le camp d’Emmanuel Macron fait bloc et appelle à la retenue, alors que le chef de l’État reste silencieux sur le dossier. Il a décidé de ne pas se rendre sur le Tour de France, il n’a pas pris la parole publiquement et s’il s’est exprimé mardi sur Twitter, mardi matin, c’est pour marquer la solidarité de la France avec la Grèce et la Suède, frappées par d’importants incendies.
“Il ne s’agit pas d’une affaire d’État. Gardons la mesure des mots”, a commenté sur Twitter l’ancien Premier ministre Manuel Valls, apparenté au parti présidentiel La République en marche.
“Il ne s’agit pas de sous-estimer l’affaire dite Alexandre Benalla, mais il ne faut pas la surestimer non plus”, a commenté le ministre de l’Action et des Comptes publics Gérald Darmanin.
“Stop à l’hystérie collective!” s’exclame l’essayiste Edouard Tétreau, proche de M. Macron, dans une tribune au Figaro.