Le président français Emmanuel Macron a annoncé son intention de “changer de méthode” pour sortir de l'”assignation à résidence” les habitants des quartiers défavorisés, en réunissant mardi plus de 600 habitants et acteurs des banlieues à l’Elysée.
“Je ne vais pas annoncer un plan ville, un plan banlieues”, a déclaré en préambule le chef de l’Etat.
Cette méthode de plans dédiés est “aussi âgée que moi”, né dans les années 1970, a ajouté M. Macron, 40 ans. Elle “a apporté des choses” mais “on est au bout” de ce que cela a pu produire, et “aujourd’hui poursuivre dans cette logique est poursuivre dans l’assignation à résidence, la politique spécialisée”. “Je n’y crois pas”, a-t-il martelé.
Les banlieues “ne demandent pas d’assistance” mais leur “place dans la République”, avait auparavant déclaré Jean-Louis Borloo, ancien ministre de gouvernements de droite, auteur d’un rapport sur l’avenir des 1.300 quartiers prioritaires en métropole où habitent cinq millions de personnes.
Le plan qu’attendent ces quartiers où “il y a plus de besoins, plus de jeunesse dans une situation plus complexe, et moins de moyens globaux”, est “un plan massif de créations d’emploi” et “de reconquête républicaine,” a martelé M. Borloo, appelant à “changer radicalement la donne”.
“L’objectif de notre politique est de faire que partout, dans tous les lieux de la République, chacune et chacun retrouve sa dignité”, a répondu M. Macron.
Rappelant que des policiers avaient été mis en joue lundi par des hommes armés de kalachnikovs dans une cité sensible de Marseille (sud-est), le chef de l’Etat a annoncé un plan de lutte contre le trafic de drogue “d’ici juillet”.
“Oui nos quartiers ont du talent, mais oui dans nos quartiers il y a aussi de la violence, il y a des choses qui ne vont pas, et c’est explosif”, a-t-il poursuivi, évoquant “des raisons inadmissibles” de cette tension “qu’on a laissé s’enkyster”.
Egalité hommes-femmes
Avant la réunion, M. Macron a débattu avec les 25 membres du Conseil présidentiel des villes, “une force de proposition” regroupant des habitants, des entrepreneurs ou des acteurs locaux, comme un proviseur de lycée.
Cette “mobilisation pour les quartiers” est “un rendez-vous à ne pas rater” et “on doit absolument mettre en place un outil qui permette, sur l’ensemble du territoire, à tous les talents discriminés de pouvoir rentrer dans les entreprises françaises”, a déclaré durant la réunion Saïd Hammouche, président-fondateur de Mozaïk RH, appelant à “s’engager sur les stages, sur l’alternance”.
“Nous ne demandons pas des milliards mais que la Republique soit forte”, a déclaré la cinéaste Bouchra Azzouz, lors de ce débat animé par l’humoriste Yassine Belattar. “On ne peut pas penser un plan banlieue sans intégrer dans l’équation la question de l’égalité” homme-femme, a-t-elle ajouté, en souhaitant qu’aucun territoire de la République” ne soit “confisqué aux femmes”.
L’Elysée avait averti ces derniers jours qu’il n’y aurait pas “un avant et un après rapport Borloo” ni “un avant et un après 22 mai”. En clair: ne pas s’attendre à un énième “plan banlieue” à coups de milliards comme la France en a produit depuis la naissance de la politique de la ville il y a quarante ans, mais une proposition dans la continuité de la politique gouvernementale.
Cette mise au point avait fait redouter à certains un enterrement du “rapport Borloo”, remis en avril dans une ambiance euphorique parmi les élus de banlieue, très mobilisés autour de sa rédaction.
Le patron du parti Les Républicains (opposition de droite), Laurent Wauquiez, a critiqué mardi la “politique spectacle” d’Emmanuel Macron, l’accusant d’avoir voulu faire une opération sans “rien derrière”.