Un collaborateur du président français Emmanuel Macron, Alexandre Benalla, mis en cause après la diffusion de vidéos le montrant frappant un manifestant, a été placé en garde à vue vendredi, et son licenciement annoncé pour tenter d’endiguer un scandale de plus en plus embarrassant pour le sommet de l’État.
Alexandre Benalla a été placé en garde à vue dans la matinée pour des faits de violences en réunion par personne chargée d’une mission de service public, d’usurpation de fonctions, de port illégal d’insignes réservés à l’autorité publique et de complicité de détournement d’images issues d’un système de vidéo-protection, a-t-on appris de source judiciaire.
La présidence française a de plus annoncé son prochain licenciement, et trois policiers, dont des hauts-gradés, ont été suspendus pour avoir transmis des images de vidéo-surveillance à Alexandre Benalla, ce que le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb a « lourdement » condamné.
Vincent Crase, un gendarme réserviste qui était avec Alexandre Benalla lors des faits, a lui aussi été placé en garde à vue pour des faits semblables.
Jeudi, ont été lancées simultanément une enquête préliminaire de la justice, une autre administrative par la police des polices et une dernière par l’Assemblée nationale.
La polémique ne cesse d’enfler depuis mercredi soir et la révélation de l’affaire par le quotidien Le Monde, qui publie vendredi de nouvelles révélations : Benalla disposait ainsi, selon le quotidien, d’un « prestigieux logement de fonction », dans un quartier chic de Paris, ainsi que d’une voiture avec chauffeur.
L’affaire risque de dégénérer en scandale d’État et d’emporter la promesse d’une « République exemplaire » faite par Emmanuel Macron, dont le silence est assourdissant.
C’est « la plus grave crise à laquelle Emmanuel Macron est confronté depuis le début de son quinquennat », en 2017, estime Le Parisien qui, comme nombre de quotidiens ce vendredi dénonce le principe du « pas vu pas pris ».
L’Elysée a été mis au courant dès le lendemain des agissements d’Alexandre Benalla, aujourd’hui adjoint au chef de cabinet du président, François-Xavier Lauch.
Une nouvelle vidéo, diffusée vendredi, montre avec encore plus de détails cet ancien responsable de la sécurité de M. Macron, casque de policier sur la tête, molestant une jeune femme puis un jeune homme lors d’une des manifestations qui accompagnent traditionnellement en France le 1er-Mai, Fête du travail.
Le collaborateur, qui dispose d’un bureau à l’Élysée, avait été autorisé à assister au sein du dispositif policier au maintien de l’ordre ce jour-là, mais en tant que simple observateur.
– « Une affaire d’État » –
Le chargé de mission a été suspendu en mai sans salaire pendant deux semaines, soit la sanction « la plus grave » pour un chargé de mission à l’Elysée, s’est défendu jeudi le porte-parole de l’Elysée Bruno Roger-Petit.
Mais la justice n’a été saisie qu’une fois la vidéo des violences mises en ligne par Le Monde. Ce, alors que »tout officier public ou fonctionnaire » est obligé de dénoncer à la justice des faits délictuels.
Le flot roulant de critiques, de part et d’autre de l’échiquier politique, ne se tarit pas. Des députés ont accusé vendredi le ministre de l’Intérieur de « mensonges », après de nouvelles informations de presse laissant entendre que M. Collomb était au courant des violences de M. Benalla.
« Est-ce qu’il a encore la capacité à être ministre de l’Intérieur », s’est demandé Olivier Faure, le patron du PS (opposition de gauche).
Pour le numéro un des députés LR (opposition de droite), Christian Jacob, « c’est le cœur de l’État qui est atteint ».
« C’est une affaire d’Etat incontestablement et maintenant il faut aller jusqu’au bout », a renchéri Eric Coquerel, député LFI (gauche radicale). Le président Macron « devrait faire attention, on n’est pas au-dessus de la République », a-t-il averti.
Le président avait pourtant fait de la moralité de la vie politique un des points forts de son quinquennat, rappelle Arnaud Benedetti, spécialiste en communication politique à l’Université Paris-Sorbonne.
« Son accession à la tête de l’État promettait une république morale, transparente, exigeante, un souffle frais », écrit-il dans Le Figaro.
Un nouveau sondage place M. Macron au plus bas depuis son accession au pouvoir. Les Français sont désormais 59% à afficher leur opposition à Emmanuel Macron (+6 points) et 39% à avoir une bonne opinion de lui (-2 points). Cette enquête BVA a été réalisée les 18 et 19 juillet, avant donc l’affaire Benalla.