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France : vive polémique après l’expulsion de l’imam tunisien Mahjoubi

Les autorités françaises n’ont pas trop tergiversé pour régler le sort de l’imam tunisien Mahjoub Mahjoubi, accusé de propos « anti-France ».

Vendredi 23 février, l’imam a été expulsé vers son pays d’origine. Une décision qui suscite la polémique en France par la célérité avec laquelle elle a été prise et son caractère jugé partial.

Des dérapages autrement plus graves, émanant de représentants d’autres communautés, n’ont pas été sanctionnés, selon les détracteurs de la mesure d’expulsion de l’imam tunisien.

Tout est allé très vite. Lundi 19 février, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a annoncé sur les réseaux sociaux avoir fait un signalement au procureur de la République et demandé l’expulsion de l’imam d’origine tunisienne de Bagnols-sur-Cèze (Gard), Mahjoub Mahjoubi.

L’imam est accusé d’avoir qualifié dans un prêche le drapeau français de « drapeau satanique » qui n’a « aucune valeur auprès d’Allah ». Une vidéo du prêche circulait depuis quelques jours sur les réseaux sociaux.

Mahjoubi s’est défendu en expliquant dans des déclarations au journal Midi-Libre qu’il n’était pas question du drapeau français et que son prêche était destiné aux supporters des équipes de football des pays du Maghreb qui exhibaient des drapeaux lors de la dernière coupe d’Afrique de nations des « drapeaux tricolores ».

Le lapsus est là. L’adjectif « tricolore » désigne habituellement l’emblème français mais l’imam l’a utilisé au pluriel. Sa ligne de défense paraît solide même s’il n’a pas à qualifier les drapeaux des autres pays de « sataniques », mais il semble que les autorités ont fouillé dans ses précédents prêches et trouvé des propos controversés.

Selon Le Monde, le préfet du Gard a indiqué que ses prêches précédents « recèlent bien d’autres choses que ce pseudo-lapsus ».

Selon l’arrêté ministériel d’expulsion, l’imam a tenu précédemment des propos traduisant une « conception littérale, rétrograde, intolérante et violente de l’islam », et de nature à encourager la « discrimination à l’égard des femmes », le « repli identitaire », les « tensions avec la communauté juive » et « la radicalisation jihadiste ».

Néanmoins ce n’est pas tant les propos condamnables de l’imam et le fond de l’affaire mais sa forme qui suscite la controverse en France.

La décision est d’abord critiquée pour avoir été prise par le ministre de l’Intérieur et non par la justice, de surcroît avec une célérité jamais vue. Alors que l’imam, en étant contraint de quitter la France, y laisse cinq enfants, dont un âgé de seulement 7 ans, en rémission d’un cancer.

Polémique après l’expulsion de l’imam Mahjoubi de France vers la Tunisie

« Je suis un bouc émissaire. J’ai été un choix politique pour montrer que la loi immigration fonctionne, c’est incontestable », a réagi le concerné sur France Bleue depuis le gouvernorat de Nabeul (Tunisie) où il est arrivé vendredi. Mahjoubi a fait part de sa détermination à se défendre devant la justice française.

Aurélien Lecoq, co-animateur des Jeunes Insoumis, a indiqué sur CNews qu’il trouvait « hallucinant » le fait que Gérald Darmanin « décide de tout, tout seul depuis Beauvau ».

Selon lui, il fallait laisser la justice faire son travail et « la justice ce n’est pas Gérald Darmanin ».

La décision ne passe pas aussi chez certains pour le « deux poids, deux mesures » qui la caractérisent.

La Psychologue Fanny Bauer-Motti a estimé sur X que cette « énième polémique stigmatisante » souligne l’ « incapacité française à entendre l’autre dans ce qu’il est et non dans ce qu’il représente ».

Selon elle, les mêmes propos, s’ils avaient été tenus par d’autres, n’auraient pas soulevé autant de vagues.

La page Debunker News, toujours sur X, va droit au but et partage des vidéos de propos autrement plus graves tenus par des représentants de la communauté juive en France. Comme celle où le rabbin David Touitou qualifiait la France de pays « pourri » d’où « peuvent sortir les plus grandes pourritures de l’histoire de l’humanité ». « Où vous n’agissez que lorsqu’il s’agit d’Islam ? », s’interroge l’administrateur de la page.

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