Il y a 25 ans, disparaissait l’un des présidents qui ont le plus marqué l’histoire de la France contemporaine. François Mitterrand est décédé le 8 janvier 1996, quelques mois après avoir quitté le pouvoir qu’il a exercé en tant que président de la République pendant 14 ans (1981-1995).
En Algérie, on retient de lui son attitude vis-à-vis de deux événements phares : la Guerre de libération nationale et l’arrêt du processus électoral en 1992.
En novembre 1954, lorsque se déclencha la guerre d’Algérie, Mitterrand était ministre de l’Intérieur de la France. La question étant considérée à l’époque comme une affaire interne, c’est à lui que revenait le rôle de coordonner la riposte tant sécuritaire que médiatique du gouvernement.
Mitterrand tient un discours ferme qui subsistera jusqu’aux derniers mois de la guerre. Il fera montre de davantage de fermeté lorsqu’il devient ministre de la Justice en 1956.
Son attitude a fait l’objet de nombreux écrits après l’indépendance, après son élection comme président de la République française, et même après son décès.
L’image de François Mitterrand, président de gauche qui a changé le visage de la France, ne pouvait s’accommoder d’un passé de défenseur du colonialisme et de ses méthodes.
Les faits sont pourtant difficilement récusables. C’est Mitterrand qui, dès son élection en 1981 a aboli la peine de mort en France, ce qui était à l’époque une énorme avancée, et c’était aussi lui qui, en 1956-1957, laisse guillotiner 45 nationalistes Algériens.
Les historiens lui reprochent aussi son silence devant la torture, érigée en système précisément à partir de son passage comme grade des Sceaux. Ils retiennent aussi ses calculs pour avancer dans sa carrière politique.
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« Il est soupçonné de n’avoir quitté le gouvernement qu’à sa chute, en juin 1957, pour une forte raison : préserver ses chances d’être nommé président du Conseil », écrivait le journal Le Monde en 2001.
Le débat sur son rôle pendant la guerre d’Algérie et son attitude véritable vis-à-vis de la question n’a jamais lâché Mitterrand qu’il expliquera plus tard qu’il aurait de toute façon fini par accorder l’indépendance à l’Algérie.
« François Mitterrand explique, en 1977, que, s’il était resté au pouvoir, il aurait sans doute fini par donner l’indépendance à l’Algérie », écrit l’historien Benjamin Stora dans son livre, « François Mitterrand et la guerre d’Algérie« , dont des extraits ont été publiés par RTBF. Le futur président français avait déjà entamé sa marche et celle du Parti socialiste pour le pouvoir en France. Dans quatre ans, il sera élu, premier président issu de la gauche, sous la Ve République.
« Nous avons échoué car le temps n’était pas venu (…). Je n’essaierai pas d’avoir raison contre le calendrier. J’ajouterai seulement qu’on ne peut juger 1954 sur les données connues de 1977 et dire : Comment se fait-il que des hommes de gauche au pouvoir en 1954, comme Mendès ou Mitterrand, n’aient pas décrété tout de suite l’indépendance de l’Algérie ? », a déclaré Mitterrand en 1977 alors qu’il s’approchait du pouvoir en France.
Il parlait donc de « donner » l’indépendance, alors que les Algériens avaient gagné la guerre, défait le colonialisme et arraché au prix fort leur liberté. Un million et demi de martyrs sont tombés pour que l’Algérie devienne indépendante, et se débarrasse de 130 ans de colonialisme criminel où les pires atrocités avaient été commises contre le peuple algérien.
L’arrêt des élections en 1992, « le moment le plus difficile »
Elu en 1981, président de la République française, Mitterrand fera deux septennats pendant lesquels il engagera de nombreuses réformes. C’est pendant son second septennat que sont survenus les événements importants de la fin des années 1980 et début des années 1990 qui façonneront l’histoire récente de l’Algérie, événements d’octobre, ouverture démocratique, arrêt du processus électoral, et démission du président Chadli Bendjedid et début du terrorisme.
On retient notamment que la France mitterrandienne s’est prononcée contre l’annulation des législatives de décembre 1991 remportées par les islamistes du FIS.
Beaucoup à l’époque avaient expliqué l’attitude de François Mitterrand par l’amitié de ce dernier avec Chadli Bendjedid. D’autres, comme l’ancien agent des services de renseignements français (DGSE), Jean-Charles Marchiani, avaient soutenu qu’en réalité, Mitterrand avait donné son feu vert à la décision de l’armée. Les langues se délieront au fil des années et des débats, pour apporter de nouveaux éléments.
Hubert Védrine, alors secrétaire général de l’Élysée, révèlera plus tard que la décision des autorités algériennes constitua pour François Mitterrand « le moment le plus difficile » de la relation avec l’Algérie. « Il ne pouvait pas fermer les yeux sur l’arrêt d’un processus électoral », explique-t-il.