En Algérie, le Baccalauréat dont les épreuves se terminent demain jeudi, n’échappe pas aux tentatives de fraude, en dépit de la coupure du réseau internet.
La justice a décidé de frapper fort, en condamnant à la prison ferme de nombreuses personnes pour avoir diffusé les sujets et les réponses sur les réseaux sociaux. Les syndicats de l’Éducation affichent leur satisfaction.
« On ne peut pas construire un pays avec la triche, il faut en finir avec ce phénomène qui a pris de l’ampleur ces dernières années », assène Meziane Meriane, coordinateur du Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Snapest), contacté par TSA.
M. Meriane considère que les mesures prises (emprisonnements) sont « non seulement dissuasives mais surtout salvatrices ». « Un médecin formé avec la triche ce sont des malades tués automatiquement et un ingénieur en bâtiment formé avec la triche ce sont des bâtiments et des ponts qui vont s’effondrer à la moindre secousse », justifie-t-il.
« Lutter contre la triche c’est comme lutter contre la drogue »
Le coordinateur du Snapest regrette qu’on ait mis du temps pour renforcer la lutte contre la fraude au Bac. « Lutter contre la triche c’est comme lutter contre la drogue. C’est un fléau à combattre », compare-t-il.
Le syndicaliste concède volontiers que « c’est dramatique » d’en arriver à couper internet pour prévenir la fraude et la diffusion des sujets. Pour M. Meriane « peut-être avec ces peines d’emprisonnements on n’aura plus à couper internet » durant les épreuves du BAC. Il plaide aussi pour une plus large sensibilisation des élèves sur la question de triche.
Le coordinateur national chargé de la communication au Cnapest, Messaoud Boudiba, rappelle que la famille éducative a vécu ces quatre dernières années sous le « spectre des fuites ».
Ce phénomène a causé « d’énormes problèmes aux élèves » et a dégradé l’image de cet examen, poursuit-il. « Ces fuites ont non seulement porté atteinte à l’image du BAC, elles ont aussi touché au principe de l’égalité des chances et ont plongé les élèves dans un cycle d’angoisses et de pressions à la veille de l’examen », souligne M. Boudiba.
Il fait notamment référence aux candidats qui scrutent les nombreuses pages sur le réseau Facebook qui diffusaient les sujets présumés du lendemain.
« Par conséquent, les mesures dissuasives contre toute personne qui a pour intention de parasiter l’examen, par la diffusion ou la fuite des sujets, sont les bienvenues », estime le syndicaliste.
Il insiste sur l’application des sanctions notamment lorsqu’un enseignant-surveillant fait un rapport contre un élève tricheur.
« La meilleure condamnation pour un élève tricheur c’est l’exclusion »
Interrogé sur la question de la fraude au BAC, le pédagogue Ahmed Tessa, plaide pour une « peine éducative » pour les élèves pris en flagrant délit de triche aux examens, à travers une condamnation « symbolique mais ferme ».
Par « peine éducative », le pédagogue fait référence à l’exclusion pendant 5 ans contre les élèves tricheurs comme le prévoit la loi. « La meilleure condamnation pour un élève tricheur c’est l’exclusion », propose le Pr Tessa.
Ahmed Tessa préconise, en revanche, de sévir contre les adultes qui se rendent coupables de triche dans un examen, dans le but de bénéficier d’une promotion dans l’administration.
« Ceux-là sont des tricheurs et des corrompus en puissance. Là il faut sévir », insiste-t-il, en préconisant en guise de solution au phénomène de la triche, une refondation de l’école et un « changement de paradigme ».
Le Pr Tessa déplore les coupures d’internet adoptées par les pouvoirs publics comme la solution pour lutter contre la fraude aux examens.
Se disant contre cette forme d’évaluation et de passage à l’université qu’est le baccalauréat, « devenu archaïque », Pr Tessa considère que « cet examen porte en lui-même les germes de dérives de toutes sortes » au point de devenir « sacré dans sa médiocrité ».
Et d’asséner que « si l’université reçoit des étudiants c’est à elle de les évaluer ». « C’est à l’université d’organiser les concours d’entrée en fonction des modalités qui lui sont propres », préconise-t-il.