Le front social s’agite dans plusieurs secteurs en ce mois de décembre. Alors que les travailleurs du complexe sidérurgique d’El Hadjar sont à leur cinquième jour de grève, ce jeudi, avec un arrêt total de l’activité, les syndicats des imams, de l’éducation et des paramédicaux haussent le ton.
Au complexe sidérurgique d’El Hadjar à Annaba, 1020 travailleurs, dont des ingénieurs et des techniciens supérieurs, sont en grève depuis dimanche. Le complexe emploie près de 6000 salariés.
Les grévistes dont une partie travaillent dans le cadre de contrats de travail aidé (CTA) réclament leur titularisation par des contrats de travail à durée indéterminée. De leur coté, les travailleurs en CDD (contrat à durée déterminée) veulent obtenir des CDI (contrat à durée indéterminée, selon un responsable au ministère de l’Industrie.
Les salaires de ces travailleurs précaires sont « ridicules », a affirmé une source syndicale. « Le salaire d’un ingénieur CTA à El Hadjar est très bas alors que l’État y contribue de 12.000 dinars par mois », explique-t-elle.
Les grévistes ont passé, hier, leur troisième nuit d’affilée dans l’enceinte du haut fourneau. Les rencontres entre la section syndicale UGTA du site et la direction du complexe ont été infructueuses. En attendant le déblocage de la situation, le haut fourneau est complètement à l’arrêt depuis maintenant 5 jours.
« Nous avons profité de la grève pour lancer une opération d’entretien du haut fourneau. Il y a environ 500 CTA et les autres qui participent à la grève sont des CDD. Il y a un groupe d’une trentaine de CTA, qui sont les meneurs de la grève. Ils occupent le haut fourneau de nuit, et dans la journée, ils sont rejoint par 90 autres travailleurs », explique notre source au ministère de l’Industrie, qui assure que cette grève n’impacte pas la production du complexe.
« Les autres installations du complexe fonctionnent normalement. Cette année, le complexe va produire 800 .000 tonnes d’acier et réaliser un chiffre d’affaires de 45 milliards de dinas, avec 80 millions d’exportation. En 2019, nos prévisions tablent sur un chiffre d’affaires de 53 milliards de dinars », ajoute notre source.
Toutefois, malgré le doublement de son chiffre d’affaires, la situation financière du complexe d’El Hadjar demeure difficile.
« Le complexe d’El Hadjar n’a pas les capacités financières pour absorber tous les CTA. Ces derniers sont recrutés dans le cadre de ce dispositif pour être formés et au bout de trois ans, ils bénéficient automatiquement de CDD », explique la source du département de Youcef Yousfi. « Avec les investissements engagés, nous prévoyons de recruter massivement du personnel à partir de 2020-2021. Les effectifs du complexe pourraient atteindre 9000 personnes », assure la même source.
Pour mettre fin au conflit, la direction du complexe pourrait recourir au licenciement des CTA qui occupent le haut fourneau dès la semaine prochaine. « Nous allons appliquer la décision de justice qui a été rendue en notre faveur. La situation actuelle ne peut pas durer », avertit le même responsable.
Éducation nationale : un retour des vacances d’hiver à risque
Les vacances scolaires d’hiver commencent dans une semaine et la rentrée, au début janvier, risque d’être houleuse pour le département de Nouria Benghabrit, plusieurs syndicats ayant menacé de recourir à la grève.
Lundi, cinq syndicats ont signé une déclaration commune dans laquelle ils annoncent « boycotter toutes les réunions et activités qui seront organisées à l’avenir par la ministre de l’Éducation nationale ».
L’Unpef, le Cnapeste, le Snapeste, le Snte et le Satef ont également annoncé leur « retrait collectif de la charte de déontologie du secteur de l’Éducation au vu des engagements non-tenus du ministère ».
Les syndicats ont dénoncé la situation du secteur qu’ils ont qualifiée de « dangereuse » et d’« instable », à cause, selon eux, « des politiques suivies par le ministère de l’Éducation nationale dans la gestion du secteur ».
Une réunion des mêmes syndicats se tiendra avant le retour des vacances d’hiver pour décider d’un éventuel appel à la grève, a-t-on appris auprès de Boualem Amora, président du Syndicat autonome des travailleurs de l’éducation et de la formation (Satef). « Les 20 jours qui restent avant la rentrée seront utiles » à la ministre « pour prendre en compte les revendications des enseignants », explique-t-il.
Les paramédicaux veulent faire tomber Sidi Saïd
De leur côté, les paramédicaux, dont le mouvement social portant sur de nombreuses revendications socio-économiques et professionnelles traîne depuis plus d’une année, demandent le départ pur et simple d’Abdelmadjid Sidi Saïd de la tête de l’UGTA.
Le Syndicat algérien des paramédicaux (Sap) est, depuis quelques semaines, à la tête d’un « mouvement de redressement » au sein de l’UGTA. Il est le syndicat le plus actif sur cette revendication.
Mercredi, un sit-in des paramédicaux a été organisé devant le siège de l’UGTA au 1er Mai à Alger, pour demander le départ de Sid Said et de tous les dirigeants de l’Union syndicale.
« Nous demandons leur départ parce qu’ils n’ont pas accompli leur mission comme ils auraient dû, ils sont responsables de la mauvaise situation dans laquelle nous voyons tous les travailleurs aujourd’hui », a déclaré, fin novembre, le président du Sap, Ghachi Lounes.
Les imams réclament de meilleurs salaires
La Coordination nationale des imams et travailleurs des Affaires religieuses et des Wakfs ont adressé, le lundi 10 décembre, une lettre au ministère de tutelle, l’informant de la tenue d’un rassemblement de protestation à « une date qui sera annoncée ultérieurement ».
Cette décision a été prise par le syndicat des imams « suite aux nombreux appels et demandes adressés au ministère des Affaires religieuses et des Wakfs pour l’ouverture d’un dialogue réel » et « de nombreuses promesses » faites par la tutelle « sans qu’aucune ne soit réalisée », explique la Coordination dans sa lettre.
Les imams dont les revendications portent principalement sur des augmentations de leurs salaires, l’octroi d’avantages matériels et la révision de leur statut font dans l’escalade depuis plusieurs semaines. Le ministre des Affaires religieuses Mohamed Aissa reste quant à lui intransigeant et refuse de parler d’une quelconque hausse des salaires des imams.
Le mouvement social mené par le Secrétaire général de la Coordination, Djeloul Hadjimi est inédit et risque de perturber le secteur sensible des Affaires religieuses en paralysant les mosquées, même si pour l’instant, il est difficile à savoir en quoi consisterait une grève des imams.