Des médias français comme BFMTV, Cnews ou Europe1 suscitent la controverse à cause de leur couverture de la guerre que mène Israël à Gaza depuis le 7 octobre dernier.
Volontairement ou sous forte pression du lobby pro-israélien, de nombreux médias français suscitent des critiques à l’égard d’une partie du paysage médiatique français, très marqué à l’extrême-droite.
Une enquête de la version anglophone de la chaîne qatarie Al Jazeera lève une partie du voile sur des pratiques en porte-à-faux avec l’éthique journalistique.
Depuis le début de la guerre en cours, au moins deux polémiques retentissantes ont éclaté en France par rapport au traitement de l’actualité liée à ce conflit.
Il y a d’abord le désaveu public apporté par la direction de TV5Monde à son journaliste d’origine algérienne Mohamed Kaci auquel est reprochée la manière dont il a mené une interview avec un porte-parole de l’armée israélienne.
L’affaire a fait du bruit en France et suscité le mécontentement du collectif de rédaction de la chaîne. Certains journalistes ont rapporté les propos de leur direction qui leur aurait avoué avoir subi des « pressions » pour sanctionner Mohamed Kaci.
L’un des auteurs de ces pressions a été nommément cité dans les témoignages recueillis par le site Arrêt sur images. Il s’agit de l’animateur télé Arthur, qui se distingue par un fort activisme pro-israélien depuis le début de la guerre.
TV5Monde a pourtant une partie non négligeable de son audience en Afrique, particulièrement dans les pays du Maghreb où la cause palestinienne est fortement soutenue.
Dans cette affaire, le journaliste Mohamed Kaci risque le licenciement parce que le porte-parole de l’armée israélienne n’a pas apprécié ses questions et TV5Monde met en jeu sa place ainsi que le softpower français au Maghreb et en Afrique.
La seconde grosse polémique concerne la célèbre journaliste Ruth Elkrief, accusée par Jean-Luc Mélenchon d’être une « manipulatrice » et une « fanatique » antimusulmane.
Sur le plateau de LCI, Elkrief s’est accrochée avec un cadre de La France Insoumise (LFI) sur la place des musulmans en France mais aussi sur la réalité de ce qui se passe en Palestine.
La résurgence de ce genre de polémiques est révélatrice d’un malaise. D’autant plus que les griefs ne manquent pas à l’encontre de certains médias comme LCI, BFMTV, Cnews et Europe 1 et leur façon de traiter l’actualité liée à ces sujets.
La rhétorique utilisée par de nombreux médias français et leurs invités qui semblent triés sur le volet ne laissent pas de doute quant à leur partialité : « terroristes du Hamas », « riposte et légitime défense d’Israël », ou encore « victimes collatérales » pour désigner les milliers de Palestiniens morts dans les bombardements sur la bande de Gaza.
Ces mêmes médias ont repris à la lettre la propagande israélienne qui a suivi les attaques du 7 octobre, avec un flot d’affirmations jamais prouvées, comme le meurtre d’enfants et le viol de femmes par les commandos du Hamas.
Des journalistes comme David Pujadas et de nombreux analystes passant sur des chaînes françaises connues pour être proches de l’extrême-droite ont tenté de convaincre qu’il y a une différence entre les enfants tués « intentionnellement » par le Hamas (ce qui n’est même pas prouvé) et ceux qui sont morts sous les bombes de l’armée israélienne.
Médias français : « Il y a une impunité quand il s’agit d’Israël »
Une petite enquête d’Al Jazeera anglais a permis de mieux comprendre ce qui se passe dans les rouages de certains titres influents du paysage médiatique français.
L’enquête s’est intéressée particulièrement à BFMTV, première chaîne d’informations en France. Il en ressort que depuis le début de la guerre, la chaîne utilise comme principale source les contenus de la chaîne israélienne i24 News, proche du gouvernement de Benyamin Netanyahou.
Or, il se trouve que BFM et i24 News ont le même propriétaire, le milliardaire franco-israélien Patrick Drahi. Par exemple, le journaliste qui fait état sur la chaîne française de 40 enfants tués au premier jour de l’attaque ne travaille pas pour BFM mais pour i24 News.
« BFMTV a servi de relais aux messages de l’armée israélienne », dénonce l’activiste franco-palestinienne Rima Hassan, qui estime que cela « pose un problème d’éthique ». La militante se demande ce qui se passerait si une chaîne française se mettait par exemple à diffuser du contenu russe. « Il y a une impunité quand il s’agit d’Israël », résume-t-elle.
Ancien président de Médecins sans frontières, Rony Brauman a soulevé le problème du manque d’équilibre dans le traitement de la guerre à Gaza.
Autre grosse anomalie, les intervenants sur les plateaux de la chaîne française sont souvent des pro-Israéliens et cela a fini par irriter les responsables de la rédaction qui se sont plaints d’un « manque d’équilibre ».
Al Jazeera cite un certain Julien Bahloul, souvent invité et présenté comme un spécialiste de la société israélienne mais qui est en réalité un ancien porte-parole de l’armée israélienne qui a travaillé par le passé pour i24 News.
L’auteur de l’enquête reconnaît que la couverture par les médias publics est plus équilibrée, néanmoins, il déplore qu’il « en reste encore beaucoup d’autres dans un paysage médiatique de plus en plus marqué à droite ».
L’ancien Premier ministre Dominique de Villepin, l’un des critiques de la position française par rapport à ce conflit, a récemment mis le doigt sur « la domination financière » qui empêche certains médias de faire leur travail avec objectivité.
« Ils ne peuvent pas dire ce qu’ils pensent, tout simplement parce que les contrats s’arrêtent immédiatement », a dénoncé l’ancien chef de la diplomatie française sur la chaîne TMC.
Aussitôt, le lobby pro-israélien en France l’a accusé d’antisémitisme.
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