Politique

Généraux arrêtés, bras de fer à l’APN : et si la crise ne faisait que commencer ?

Parallèlement à la crise qui secoue l’APN, les événements s’accélèrent et, à six mois de l’élection présidentielle. Ils sont légitimement interprétés comme autant de signes qui trahissent peut-être des divergences au sommet de l’Etat quant au plan à retenir pour cette échéance cruciale.

Le bras de fer entre le président de la chambre basse du Parlement et les députés de la majorité qui réclament son départ est sur le point de boucler sa troisième semaine sans que l’une ou l’autre partie laisse montrer le moindre signe de flexibilité.

Depuis quelques jours, on assiste à une étrange situation de ni guerre ni paix, Saïd Bouahadja jouant avec les nerfs de ses détracteurs qui, déboussolés par l’assurance qu’il affiche, commencent à se poser de sérieuses questions. Des interrogations qui taraudent aussi les observateurs et la société.

La présidence de la République est-elle réellement neutre et en retrait de tout ce qui se passe au palais de la rue Zighoud-Youcef ? Quand bien même la constitution consacre la séparation des pouvoirs, comment la présidence peut-elle laisser le bras de fer s’installer dans la durée au risque de déboucher sur une grave crise institutionnelle ? D’où, ou de qui, Saïd Bouhadja puise-t-il sa force et son assurance et, surtout, qu’est-ce qui lui a valu l’inimitié subite et unanime de sa famille politique ? Que signifie le soutien apporté au président de l’APN par des organisations aussi puissantes que celles des moudjahidine et des anciens condamnés à mort ? Pouvaient-elles le faire si l’homme était devenu indésirable aux yeux du président ?

Le flou est tel que tout le monde est à l’affût du moindre signe qui permettrait, à défaut d’une décantation, au moins un début de visibilité.

Dans l’armée, le limogeage de dizaines d’officiers supérieurs puis l’arrestation dimanche de cinq généraux-majors, une première dans l’histoire du pays, est venue ajouter du flou au tableau déjà illisible de la situation politique. Les interrogations ne font que s’accumuler, sans le moindre début de réponse.

Difficile de croire à une simple opération « mains propres » au vu de la simultanéité des interpellations et du poids des officiers incriminés du temps où ils étaient en fonction. On diverge mais toutes les analyses mettent en toile de fond la présidentielle de 2019 et la question du cinquième mandat.

Offensive de charme du président Bouteflika envers la population avant de solliciter le droit de garder pour cinq autres années un pouvoir qu’il a exercé pendant deux décennies, alors qu’il est âgé et sérieusement amoindri par la maladie ? Possible quand on sait la sensibilité de la société vis-à-vis de tout ce qui a trait la corruption dans les hautes sphères du pouvoir, notamment dans l’armée. Ou alors une opération de chasse aux sorcières subséquemment à une opposition au sein de l’armée à l’option du cinquième mandat ? Rien ne permet pour le moment d’étayer une telle hypothèse même si rien non plus n’incite à l’exclure.

En tout cas, de la gestion « médiatique » des événements en cours, il se dégage comme une volonté d’entretenir le flou et l’illisibilité on ne sait pour quel dessein. Le silence de la présidence par exemple devant le bras de fer qui paralyse l’APN déboussole même les chefs des partis de la majorité et ébranle leurs certitudes. De même que la disgrâce qui touche sans distinction des officiers qu’on disait proches de tel ou tel centre de décision. Qu’est-ce qui se trame au sommet de l’État ? L’État de santé du président s’est-il subitement dégradé au point de ne pas pouvoir arbitrer un banal conflit entre ses soutiens ?

Quoi qu’il en soit, les événements de ces dernières semaines sont inhabituels. Suffisamment inhabituels pour qu’ils soient interprétés comme les signes du début des grandes manœuvres en vue de la bataille électorale à venir.

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