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Gestion des manifs à Alger : la tentation répressive ou comment récupérer l’espace public

Gestion des manifs à Alger : la tentation répressive ou comment récupérer l’espace public

Les étudiants ont célébré la journée du 19 mai, ce dimanche à Alger, en organisant une impressionnante marche pacifique, dans une ville barricadée par les policiers antiémeute, fortement déployés.

Outre les policiers, des éléments des brigades antiémeute ont été déployés en nombre, aussi bien à la place de la Grande Poste, lieu emblématique de la contestation et point de chute de tous les manifestants, que dans certains boulevards et rues du centre-ville de la capitale.

À proximité du siège du Sénat, de l’APN, à la rue Asselah Hocine, l’image est impressionnante : un double cordon sécuritaire, ne laissant aucun espace de passage, formé d’éléments des forces de l’ordre et de fourgons.

Tout comme la Grande Poste transformée en citadelle. Alors que le tunnel des facultés a été fermé, la place Audin a été également quadrillée.

Sur le boulevard Zighout Youcef, qui porte le nom d’un héros de la guerre de libération nationale, un autre cordon de policiers est déployé pour empêcher les étudiants de rendre hommage, comme ils veulent, à leurs aînés, qui ont déserté les bancs des écoles pour rejoindre les maquis de l’ALN, il y a 63 ans, afin de libérer le pays du joug colonial. Tout un symbole. Aujourd’hui, les étudiants se battent aussi pour libérer le pays d’un système corrompu et illégitime.

Et contrairement à la manifestation de mardi dernier, les étudiants, qui ont entamé la marche depuis la Fac centrale, n’ont pu parvenir au tribunal Sidi M’hamed qu’au terme d’un itinéraire où ils étaient contraints à chaque fois de contourner les barricades des policiers.

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Mais que peut bien signifier ce déploiement, sans commune mesure avec ceux des journées de manifs précédentes ? Si dès le début des manifestations, les autorités, certainement en raison de la déferlante populaire, se sont contenté de surveiller les édifices institutionnels, force est de constater qu’au fil des semaines, la stratégie d’encadrement des manifestations a complètement évolué.

D’un déploiement aux alentours de la présidence de la République, et sur les accès qui mènent au palais d’El Mouradia, les forces de sécurité, suivant une stratégie d’encerclement, se sont déplacées vers le boulevard Mohamed V, que les manifestants empruntaient d’ordinaire.

À la neuvième marche, les services de sécurité ont même procédé à la fermeture du tunnel des facultés après les incidents ayant émaillé la fin de la manifestation.

Et progressivement, même au prix d’un recours à l’usage de bombes lacrymogènes ou à la brutalité comme ça a été le cas ce dimanche, ce sont tous les itinéraires des marcheurs et toutes les places, réduites comme peau de chagrin, qui sont « récupérées » par les membres des services de sécurité.

Comme le montre la « bataille » qui se déroule, à chaque manifestation, autour de la place de la Grande Poste. Si le souci du maintien de l’ordre public relève de la mission naturelle des services de sécurité, le renforcement de leur présence, en dépit du pacifisme des marches démontré durant trois mois, et la tentation de plus en plus manifeste à la répression traduit un agacement, voire une impatience du pouvoir. Volonté d’en finir avec le mouvement ou désarroi ? À cela s’ajoute le blocage des accès menant à Alger, la veille de chaque grande manifestation, bloquant sans raison des centaines de personnes sur les routes.

En tous cas, après plus de trois mois de contestation, et malgré quelques acquis, les réflexes autoritaires n’ont pas encore disparu.

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