Société

Grève à Algérie Poste : « Pourquoi nous prennent-ils en otage ? »

C’est la débandade ! Rien ne va plus dans les bureaux de poste d’Alger. D’où qu’ils viennent, les clients se heurtent aux portes closes des agences.

Tournée ce matin à Alger-centre. Les Postes de la rue Réda Houhou, de si El Bachir, ou de la rue Ferhat Boussâad, sont toutes fermées. D’interminables queues sont formées devant les distributeurs automatiques. Seuls ceux qui détiennent des cartes bancaires peuvent effectuer des retraits. Les autres ne savent plus à quel saint se vouer en ce troisième jour du mois sacré de ramadan.

La grève surprise déclenchée par le personnel d’Algérie Poste il y a quatre jours pénalise les clients. Sans liquidités, ils ne peuvent pas effectuer leurs achats. Dépités, ils en appellent aux hautes autorités pour débloquer cette situation.

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[Crédits : TSA]

« Pourquoi nous prennent-ils en otage ? »

Jeudi 15 avril. Il est 11 h. Nous sommes devant le bureau des chèques postaux de la Grande –Poste, dans le centre-ville d’Alger. Service minimum et grosse tension.

Une foule compacte joue des coudes pour tenter d’accéder à l’intérieur. Peine perdue, un agent de sécurité tente de les discipliner en leur distribuant des tickets et en leur demandant de respecter leur tour.

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Il y a deux files distinctes : une pour les femmes, l’autre pour les hommes. Mais tout ce beau monde est logé à la même enseigne. Il faudra être très patient avant de pouvoir encaisser un chèque ou effectuer un retrait. Entre trois et quatre heures minimum. Les mines sont déconfites. La colère monte.

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« J’ai le numéro 420 et ils n’en sont qu’au ticket 112, s’énerve un quinquagénaire. Ça fait des heures d’attente dans le vent et le froid sans être sûr de pouvoir encaisser ma paye !  Nous le peuple on en peut plus de souffrir. Je comprends que les postiers aient des revendications sociales et salariales mais pourquoi nous prennent-ils comme ça en otage ? ».

Dans la file d’à côté, une jeune femme s’emporte :  « J’ai raté mon boulot hier et aujourd’hui juste pour retirer de l’argent. Je n’ai plus un sou et je dois faire des courses pour ma famille. Si ça continue comme ça je vais perdre mon boulot ! Cette situation est intenable !  ».

Certains clients font le pied de grue depuis 7 h 30 du matin devant les agences d’Algérie Poste dans l’espoir de retirer des liquidités. « Ça n’avance pas. C’est le service minimum. On va y passer la journée. Et dire que nous sommes en plein mois de jeûne et de pardon !  », nous explique une dame.

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Seuls les distributeurs automatiques fonctionnent

Qu’en est-il des autres bureaux de postes ? Nous nous sommes rendus à la petite poste de la rue Reda Houhou. Derrière la grille de la porte fermée, un employé nous lance : « C’est la grève ! Aucun service en cours ! Toutefois, si vous avez une carte bancaire, vous pouvez retirer votre argent du distributeur ».

Une vielle femme se lamente : « Je n’ai pas de carte ! Comment je vais faire ? ». Devant le distributeur, une longue chaîne humaine se forme. Certains se sentent quelque peu soulagés de pouvoir se dépanner. Ils rejoignent la queue en croisant les doigts.

 « Avec le rush, je ne suis pas certain qu’il y ait de l’argent pour tous », s’inquiète un client en trépignant d’impatience.

À deux encablures de là, le bureau de poste de la rue Ferhat Boussaâd, (Meissonnier) est également fermé. Les clients qui arrivent les uns après les autres, repartent dépités.

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« J’avais un mandat à envoyer à mon père malade et âgé à Annaba. Il ne pourra même pas acheter ses médicaments », lâche une dame, l’air catastrophé.

Un septuagénaire essaye de négocier avec un des employés à travers la grille : « Quand allez-vous reprendre ? Comment fait-on pour manger maintenant que vous nous avez fermé les vannes ? », demande-t-il. L’employé hausse les épaules avant de disparaitre au fond de l’agence.

Direction, la petite poste jouxtant le marché « Si El Bachir » du Telemly. Portail bleu fermé et silence de mort.

Pour rappel, la grève des employés d’Algérie Poste a été  déclenchée, sans préavis, lundi 12 avril, à la veille du début du mois de ramadan.

Les travailleurs réclament le versement de la prime du 13e mois ainsi que l’amélioration de leurs conditions de travail. Cette grève surprise qui coïncide avec le début du mois sacré du Ramadan, avec toutes les exigences que cela implique, pénalise grandement les clients d’Algérie Poste qui ne savent plus sur quel pied danser.

Le service minimum assuré dans de rares postes, ne représente qu’une goutte d’eau dans l’océan. Le débrayage se poursuit et les clients, dépités et désabusés, sont abandonnés à leur propre sort. Jusqu’à quand ?

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