Politique

“Guerre” d’initiatives à la veille de la problématique bataille présidentielle

À quatre mois à peine de la présidentielle d’avril 2019, malin est celui qui prédira ce qui va vraiment se passer d’ici là. C’est le flou le plus total. L’on est toujours à se poser la question de savoir si cette élection capitale pour le pays se tiendra dans les délais fixés par la loi.

D’aucuns, comme le président du RCD Mohcine Bellabas, ne semble pas prêter trop de crédit à cette histoire de report de la présidentielle. En tout cas, l’idée n’émane pas de Bouteflika, soutient-t-il, arguant le grand attachement de ce dernier  au respect des délais constitutionnels impartis aux échéances électorales qui donne du crédit à sa rhétorique de la stabilité politique retrouvée.

« Depuis 1999, Bouteflika a toujours tenu à organiser les élections dans les délais. Le non-respect des délais constitutionnels signifie une situation d’instabilité. Or, malgré une situation alarmante, il a toujours nié des réalités qui minent le pays et préoccupent observateurs et partenaires», a –t-il soutenu dans un entretien accordé mardi à Liberté.

Invité avant-hier dimanche par TSA Direct, l’ancien président de l’APN, Abdelaziz Ziari n’en pense pas moins en qualifiant, un brin méprisant,  l’option du report de la prochaine présidentielle d’une « plaisanterie de mauvais goût » et de « lubie qui n’a aucun fondement ».

« On est dans une situation normale, on sait depuis bientôt cinq ans qu’il va y avoir une autre élection et tout le monde devrait être prêt à aller à cette échéance. Je ne vois pas de raisons de prolonger le mandat ou de changer la nature du système politique dans l’urgence », a-t-il argumenté.

Mais le fait le plus significatif est l’ ‘’intrusion’’ dans le débat du journal gouvernemental El Moudjahid, une des voix officielles, qui, dans l’éditorial de jeudi 13 décembre, s’est montré affirmatif et catégorique : « L’élection présidentielle aura lieu comme convenu, au mois d’avril prochain ».

En revanche, d’autres parties croient déceler, dans les positionnements et déclarations des uns et des  autres, des signes qui militent  pour l’option d’un report de la présidentielle qui serait inspirée d’en haut, c’est-à-dire dans les sphères décisionnelles. Argument avancé ? Plutôt deux : absence de consensus entre les différents clans composant le système sur un candidat, et conditions non réunies pour organiser les élections présidentielles.

Profusion d’initiatives

Il reste que ce moment de grande confusion n’a pas empêché la scène politique nationale de s’emballer quelque peu en enregistrant, ces jours-ci,  quelques initiatives politiques présentées par leurs promoteurs presque comme des panacées à même de régler la crise politique que vit le pays.

Il y a d’abord les partis dits de l’Alliance présidentielle (FLN, RND, MPA et TAJ) qui ne voient pas de salut pour le pays en dehors du maintien du système en place depuis 1962. Après avoir milité pour un 5e mandat,  ils ont subitement, notamment depuis la sortie publique du président Bouteflika le 1er novembre en se présentant dans un très mauvais état, abandonné, dans leur discours bien entendu, cette option en prenant fait et cause pour ce concept fourre-tout et bien vague de continuité.

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Un 5e mandat pour Bouteflika ? Une rallonge de son règne au-delà d’avril 2019 ? Un autre candidat qui fera du  Bouteflika mais sans Bouteflika ? Grande énigme.

Il y a ensuite le président du MSP Abderrezak Makri qui, comme revenu de sa déception de l’été dernier avec son initiative d’une transition inclusive qui a fait pschitt, s’est amené avec une nouvelle offre politique, début de ce mois de décembre : le report de la présidentielle et la rallonge d’un an du règne de l’actuel chef de l’État.

Une offre assortie d’une condition, ceci dit :   le lancement de « réformes politiques consensuelles » qui déboucheront sur  des élections présidentielles transparentes. Une remarque : si la proposition n’est pas rejetée par les partis de l’Alliance, elle n’a pas été adoptée, non plus.

Le président de TAJ Amar Ghoul a vite emboité le pas à son ancien compagnon au sein du parti fondé par Mafoudh Nahnah, en proposant une autre recette politique : l’organisation d’une conférence du consensus nationale sous l’égide du président Bouteflika. « Nous voulons une conférence nationale inclusive qui sera organisée sous l’égide et le haut patronage du président où seront traités tous les sujets sans tabou », a-t-il expliqué, y compris le report de la présidentielle, non sans préciser que cette conférence va mettre sur pied « une Algérie nouvelle, dotée d’institutions fortes et modernes capables de répondre aux attentes des Algériens, relever les défis et faire face aux dangers ».

Ne pouvant objectivement laisser le terrain aux partis du pouvoir et aux islamistes, le président du RCD, Mohcine Belabbas, a, lui, remis sur la table la proposition de la fameuse CNLTD, à savoir l’organisation d’une période de la transition qui, a-t-il précisé, est différente du report de l’élection présidentielle qui donnera, selon lui, « la possibilité aux dirigeants actuels de gérer le pays de manière illégale et pour une durée sur laquelle on n’a pas d’emprise ».

« Il faut que l’on se mette d’accord sur les priorités, le calendrier et les délais avec une définition d’un cahier des charges fixant des préalables démocratiques qui s’imposeront à tous les compétiteurs », a-t-il précisé. Durant cette période de transition, l’on procédera à la mise en place d’une instance indépendante d’organisation des élections, à la révision du Code électoral et de la Constitution avant d’aller  vers un gouvernement d’union nationale, selon le RCD.

Par la voie de Sofiane Djilali, le mouvement Mouwatana, lui, s’en est violemment pris à la proposition de report de la présidentielle d’Abderrezak Makri qu’il a qualifiée d’ « attentat à la morale » et compte organiser une contre-conférence nationale, si d’aventure la grande messe politique proposée par Amar Ghoul viendrait à avoir lieu, pour exiger l’application de la Constitution.

Aux initiatives récentes s’ajoutent l’offre de dialogue d’Ali Benflis. Depuis quelques mois, son parti Talaiou El Houriet milite pour un “dialogue politique inclusif pour une solution consensuelle”. Pour le FFS, la « crise est d’ordre politique » et « qu’on ne peut pas parler d’élections dans les conditions actuelles ». Il n’a pas renoncé à son projet d’organiser une conférence pour le consensus national. C’est la foire aux propositions et contre-propositions !

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