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Guerre Palestine – Israël : la posture inconfortable du Maroc

Guerre Palestine – Israël : la posture inconfortable du Maroc

Ce qui se passe en Palestine depuis samedi 7 octobre laisse les pays arabes qui ont normalisé leurs relations avec Israël, comme le Maroc, dans une position très inconfortable.

C’est le cas notamment du Maroc et des Émirats arabes unis. Tenir le bâton par le milieu s’avère un exercice difficile maintenant que leur nouvel allié rase la ville de Gaza et massacre sa population.

Entre des opinions publiques foncièrement pro-palestiniennes et un Israël duquel ils attendent beaucoup, les dirigeants de ces deux pays sont devant des choix impossibles.

Les événements en cours ont trouvé l’Arabie Saoudite au milieu du gué. En septembre, son prince héritier Mohammed Ben Salmane (MBS) a annoncé que chaque jour qui passe rapproche son pays d’un accord de normalisation avec Israël.

Le royaume peut toujours faire marche arrière en mettant fin au processus, d’autant plus qu’il a toujours lié la normalisation avec l’obtention de concessions pour la cause palestinienne.

Le Maroc et les Émirats ont, avec le Bahreïn et le Soudan, franchi le pas en 2020 sans rien exiger pour la Palestine. Les accords d’Abraham, négociés sous l’égide de l’ancien président américain Donald Trump et son gendre Jared Kushner, ont permis au Maroc d’obtenir la reconnaissance américaine de sa « souveraineté » sur le Sahara occidental.

Pour la Palestine et l’opinion publique locale, le roi Mohammed VI s’est contenté de la promesse de la poursuite du soutien au peuple palestinien en sa qualité de « président du Comité Al Qods ».

Ce titre, à la fois pompeux et inconsistant, le roi Mohammed VI l’a hérité de son père Hassan II qui le détenait depuis sa création en 1975.

Pendant toute cette période, qui a vu Israël grignoter chaque jour des terres palestiniennes supplémentaires, réprimer les Intifada successives, bombarder les civils et tout faire pour tuer le rêve d’un État palestinien crédible, le Maroc a traité sous la table avec les gouvernements israéliens successifs, y compris les plus extrémistes.

Après les accords de 2020, les deux parties n’ont fait que formaliser les choses et passer à une étape supérieure dans leur coopération, notamment militaire et sécuritaire.

Le Maroc, obsédé par la suprématie militaire sur le voisin algérien, a beaucoup misé sur cet accord. Ce n’est pas donc le genre de document qu’on déchire avec une grande facilité.

Guerre Palestine – Israël : le Maroc fait profil bas

Néanmoins, la rue marocaine gronde et exploite la moindre brèche pour exprimer son soutien total à la Palestine et sa condamnation ferme d’Israël.

Les supporters du club de football du Raja de Casablanca l’ont fait au cours d’un match de leur équipe dimanche, exhibant dans les tribunes des milliers de drapeaux palestiniens.

Les réseaux sociaux marocains s’enflamment aussi pour la Palestine. La situation est très sérieuse. « Ou le régime fait tomber la normalisation, ou c’est la normalisation qui le fera tomber », a tonné le président du comité marocain contre la normalisation, Ahmed Ouihmane.

La réaction officielle du gouvernement marocain laisse deviner son désarroi. Alors que le roi Mohammed VI a appelé à une réunion de la Ligue arabe que tout le monde sait sans effet, son ministère des Affaires étrangères a renvoyé dos à dos les Palestiniens et leurs bourreaux israéliens en disant condamner « les attaques contre les civils d’où qu’ils soient ». Hormis cette sortie timorée et gênée, c’est le silence total à Rabat.

Le Maroc fait profil bas. Sur le site 360.ma, l’écrivain Tahar Ben Jelloun, réputé proche du Palais royal, a tenté de justifier la position marocaine en faisant le lien entre l’attaque du Hamas et le soutien de l’Iran qu’il a qualifié d’ « ennemi » du royaume.

Mais la Maison Blanche a indiqué qu’elle ne disposait pas d’informations sur l’implication de Téhéran dans l’attaque spectaculaire des combattants palestiniens contre Israël.

Une gêne qui contraste avec la position confortable des autres pays du Maghreb, notamment l’Algérie et la Tunisie, constantes dans leur soutien au peuple palestinien et claires dans leur rejet de la normalisation.

L’Algérie a été l’un des premiers pays, sinon le premier, à condamner fermement, dès la matinée de samedi, les bombardements israéliens sur la bande de Gaza. En Tunisie, sur injonction des plus hautes autorités, tous les élèves du pays ont brandi le drapeau palestinien.

Bien qu’ils n’aient pas d’opinion publique à gérer, les Émirats arabes unis se retrouvent, eux aussi, dans une position inconfortable et ont plus de raisons que le Maroc de ne pas faire machine arrière.

Les Émirats arabes n’ont pas seulement normalisé leurs relations avec Israël en ignorant le sort des Palestiniens, mais ils essaient de recruter d’autres pays arabes pour les amener à rejoindre les accords d’Abraham. Ils ont notamment tenté, en vain, de forcer la main à la Tunisie et à la Libye.

La réaction officielle des Émirats, via son ministère des Affaires étrangères, à ce qui se passe en Palestine et en Israël, renvoie l’image d’un pays qui a brûlé ses vaisseaux avec la cause palestinienne et le monde arabe. Il n’est « consterné » que par « la prise d’otages de civils israéliens ».

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